Cet amendement, cosigné par de très nombreux députés et qui pose une vraie question, a toutefois été repoussé par la commission.
Je comprends bien que vous vouliez que le maire, officier de police judiciaire, premier magistrat de la commune, soit informé de l'arrivée dans sa commune d'un individu qui peut se trouver dangereux.
Il ne s'agit pas ici de recommencer le débat qui a déjà eu lieu lors de l'examen de deux autres textes dont j'étais d'ailleurs le rapporteur, la loi pénitentiaire de novembre 2009 et la loi du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle, Richard Mallié et ses collègues ayant déposé pratiquement le même amendement.
Je ne voudrais pas que cette disposition soit un piège pour le maire. Le maire, et lui seul, sera destinataire de cette information : il ne pourra pas donner d'information sur l'éventuelle dangerosité d'un individu à son propre directeur de police municipale, non plus qu'à ses adjoints ou aux policiers municipaux, sous peine de tomber sous le coup de la loi.
Que peut faire le maire de cette information ? En réalité, pas grand-chose. Il risque de se retrouver dans la situation délicate d'avoir été informé de l'arrivée dans sa commune d'un individu présentant éventuellement une certaine dangerosité qui fait par ailleurs l'objet de contrôles dans le cadre d'une surveillance judiciaire ou de sûreté, mais de ne pouvoir en parler à quiconque ni de pouvoir agir.
Si, par malheur, l'individu en question commet à nouveau des faits, ce qui peut malheureusement arriver, les victimes potentielles pourront se retourner contre le maire et lui dire qu'il n'a rien fait alors qu'il était au courant.
Même si je comprends le souci exprimé par mes collègues, je rappelle que l'article 706-53-7 du code de procédure pénal donne déjà accès à certaines procédures d'information aux maires, aux présidents de conseil général et aux présidents de conseil régional. Ils peuvent en effet avoir accès, par l'intermédiaire des préfets, au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, le FIJAIS, pour « les décisions de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation concernant des activités ou professions impliquant un contact avec les mineurs, ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions ». En clair, le maire peut déjà, par l'intermédiaire du préfet, avoir un certain nombre d'informations sur des personnes qu'il pourrait par exemple être amené à recruter.
Aussi, je le dis très franchement, je me demande si cet amendement ne risque pas de se révéler dangereux pour le maire lui-même.
Enfin, je rappelle que, dans le cadre d'autres structures, le maire collabore avec les services de police, de gendarmerie, les conseils intercommunaux de sûreté et de prévention de la délinquance, c'est-à-dire avec les acteurs locaux avec lesquels il a des contacts permanents. Il est forcément au courant d'un certain nombre d'informations.
Je vous livre mon avis personnel sur cette question. Cela dit, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée et j'entendrai avec intérêt le ministre de la justice sur cette question.
Je le répète, je ne voudrais pas que le maire soit la première victime d'une intention qui, si elle est bonne au départ, peut finalement se retourner contre lui.