La proposition de résolution européenne sur la protection temporaire du groupe socialiste concerne le problème des Afghans qui se pose en France, en Europe et à l'international. Il suffit de voir les conditions actuelles en Afghanistan pour comprendre que le problème est loin d'être réglé. Ses auteurs voudraient que la France appelle à négocier au niveau européen pour accueillir ces populations dans de bonnes conditions, au moins de manière temporaire, dans des pays européens engagés par ailleurs dans ce conflit militaire, et ne pas les renvoyer dans leur pays d'origine.
Elle propose de s'inspirer de la directive de 2001 qui avait créé un dispositif de protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées, à la suite de la crise du Kosovo. Cette protection temporaire, d'une durée d'un an ou deux ans maximum, répartit les charges de l'accueil de ces populations entre les Etats membres de l'Union européenne.
Je vais essayer de vous démontrer que les trois conditions du déclenchement de cette protection temporaire en faveur des déplacés afghans pourraient être remplies.
Premièrement, on peut discuter de la notion d'afflux massif qui permet au Conseil de décider à la majorité qualifiée, sur proposition de la Commission européenne éventuellement à la demande d'un Etat membre, de déclencher la protection temporaire. Mais un flux de demandeurs d'asile afghans vers l'Union européenne de plus de 9 000 personnes au premier semestre 2009, qui les place au troisième rang après l'Iraq et la Somalie, est déjà significatif et on doit en outre interpréter ce critère sur le plan politique.
Deuxièmement, si cet afflux ne désorganise pas le système d'asile des Etats membres et notamment celui de notre pays, la France pourrait développer un mécanisme d'asile subsidiaire en faveur des Afghans par l'interprétation d'une autre directive de 2004 portant notamment sur la protection subsidiaire, à côté de la protection accordée en application de la Convention de Genève sur les réfugiés. Si l'on pense que la France va ainsi créer un appel d'air et déstabiliser son système d'asile national et qu'un Etat membre ne peut pas répondre seul à ce problème, alors il faut se tourner vers l'Union européenne pour trouver une solution à ce niveau et créer en Europe une protection temporaire spécifique pour les Afghans.
Troisièmement, pour déclencher la protection temporaire, les conditions d'insécurité doivent être telles dans le pays d'origine qu'elles ne permettent pas aux personnes déplacées d'y retourner.
Or l'Afghanistan n'est pas un pays sûr. La plupart des réfugiés afghans sont au Pakistan, mais le programme de rapatriement en Afghanistan des réfugiés installés au Pakistan a été interrompu cet été. On peut donc considérer aujourd'hui que l'Afghanistan n'est pas un pays suffisamment sûr pour permettre le retour des réfugiés et déplacés.
Nous demandons d'activer la protection temporaire pour répondre à une situation qui n'est pas satisfaisante, notamment la situation anglaise. Les pays se renvoient la balle et la France ne trouve pas un mode de règlement satisfaisant avec le Royaume-Uni sur ce sujet. Le Nord de la France subit toujours un afflux important, le trouble est sensible en gares du Nord et de l'Est, ce qui a amené la ville de Paris à ouvrir un centre d'hébergement pour accueillir ces populations.
Quant aux retours forcés, vous connaissez notre opposition à une procédure dont les conditions de sécurité ne sont pas satisfaisantes, même si elle reste très limitée quant au nombre des personnes afghanes concernées.
On ne règle donc pas le problème de ces populations dont la situation crée des difficultés à la population française. Or la détérioration de la situation en Afghanistan va rendre encore plus aigu le sort de ces personnes. Il faut donc régler cette question, soit dans le cadre de la protection temporaire, soit dans le cadre d'une discussion au niveau européen pour harmoniser les systèmes d'asile dans l'Union européenne.
Nous serions d'accord pour l'extension d'une protection subsidiaire. Cela se fait à Malte avec un accord conclu au niveau européen de répartition dans les différents Etats membres, dès que l'asile est accepté. Le Royaume-Uni a également décidé unilatéralement une protection temporaire pour la population venant du Darfour. Il est donc possible dès maintenant au niveau européen que des Etats membres prennent des décisions unilatérales de protection temporaire ou que des décisions communautaires soient mises en oeuvre pour accueillir ces populations.
En conclusion, je propose que la France pose la question des Afghans au niveau européen pour régler de manière temporaire le problème de l'accueil de ces populations en Europe.