Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le renforcement du transport de marchandises par le fleuve est une des priorités du Grenelle de l'environnement, adopté à la quasi-unanimité à l'initiative de Jean-Louis Borloo. C'est aussi une des priorités du député de Conflans-Sainte-Honorine, capitale de la batellerie, que je suis.
La discussion de ce projet de loi, au-delà de son objet de clarification du rôle et des missions de VNF, doit être pour nous le moment de nous interroger aussi sur les enjeux du transport fluvial, notamment à la veille de la mise en chantier de projets majeurs, comme le canal Seine-Nord-Europe et d'autres infrastructures importantes, mais aussi à l'aube de l'avènement du Grand Paris, appelé par certains Paris-Seine-Normandie, ou de l'opération d'intérêt national Seine Aval. Ce texte, d'ailleurs, aurait pu, aurait dû, être adopté dans le cadre du Grenelle 2.
C'est aussi le moment d'aborder les problèmes auxquels les bateliers sont confrontés et les inquiétudes qui sont les leurs face à l'avenir. À peine arrivé à l'Assemblée nationale, j'ai eu la chance de rencontrer des bateliers et d'embarquer avec eux entre Conflans-Sainte-Honorine et Rouen. Le bilan que j'ai tiré de cette expérience est assez préoccupant, monsieur le ministre.
En plus d'être confrontés à de graves défauts d'entretien de la voie d'eau, des berges, et surtout de certaines écluses, qui obligent à des attentes prolongées, ou encore à la présence de nombreuses épaves non enlevées, les bateliers français doivent faire face à une concurrence étrangère sauvage. Si une lecture globale du secteur d'activité montre, en 2010, une remarquable résistance à la récession du transport fluvial de marchandises, une part des acteurs de la profession est en crise, notamment les bateliers artisanaux. Les pavillons étrangers naviguant sur la voie d'eau française ne sont pas soumis aux mêmes contraintes financières, économiques et sociales que leurs homologues français. Souvent, sous la pression des donneurs d'ordre, ils pratiquent des tarifs que les pavillons français ne peuvent suivre, à moins de travailler à perte.
L'essor du transport fluvial, secteur libéralisé et très atomisé, semble, de fait, entravé par des pratiques tarifaires illisibles et des taxations de VNF très lourdes, plus importantes pour les pavillons français que pour les pavillons étrangers. Il en va ainsi de la taxe de circulation exigée pour l'entretien des canaux, ou encore du péage et du droit de port. Là où les étrangers peuvent choisir entre l'un ou l'autre, les Français paient les deux.
Cette concurrence européenne débridée a aussi pour conséquence que les bateaux étrangers, non soumis aux mêmes obligations, peuvent travailler à des coûts beaucoup moins élevés. Mais les charges, qui ne sont pas de la responsabilité de VNF, et les cotisations sociales que doivent acquitter les bateliers français sont également une vraie préoccupation, sans parler des poursuites dont ils peuvent être l'objet de la part du RSI ou d'autres services de l'État.
Tout cela justifie, et c'est l'objet d'un amendement que j'ai proposé, la création d'un observatoire des prix et des marges, tel celui que nous avons eu la bonne idée d'instituer il y a quelques mois pour les produits alimentaires. Le sujet est compliqué, certes, mais à l'époque, ce qui semblait impossible a pourtant pu être mis en oeuvre.
Comme Alain Gest et notre rapporteure, je pense nécessaire d'organiser une interprofession du fluvial. Ce ne sera pas simple non plus, mais le fait de l'inscrire dans la loi devrait nous permettre de réussir assez vite.
S'agissant de l'ensemble de notre réseau fluvial, tant les fleuves et les canaux que les barrages et autres ouvrages, il n'est pas dans un état optimal. On constate même, ce qui fera plaisir à M. Paul, une diminution tendancielle du réseau.