Mon intervention porte sur les crédits de la défense et, là, ce sont quelques dizaines de millions qui sont en jeu, sinon plus.
Les sénateurs ont jugé que l'acquisition de drones MALE de type Reaper était préférable au choix du Gouvernement et ils ont sérieusement amputé les crédits dédiés à cette opération pour imposer leur point de vue.
Pour ma part, j'estime que les rapporteurs du Sénat ont manqué d'objectivité. Ainsi, la liaison satellite du Reaper est qualifiée de « performante » alors qu'elle est inférieure à celle du Harfang ; le « caractère opérationnel » du Héron TP « fait débat » alors que je viens de visiter l'aérodrome où ils sont basés en Israël ; c'est un « drone d'observation » assènent-ils. Ont-ils vérifié ? J'arrête là le florilège des affirmations gratuites qui émaillent leur rapport.
Pour comparer les coûts, les sénateurs ont sollicité une proposition de l'entreprise américaine General Atomics et non pas d'une association entre General Atomics et Cassidian. Il s'agit donc clairement d'un achat sur étagère.
Cette proposition, officieuse, m'a également été communiquée par General Atomics et je l'ai comparée à celle de l'offre initiale de Dassault-IAI.
À ce stade, les deux offres ne sont pas comparables car les périmètres ne sont pas identiques. Le Sénat lui-même s'y perd, qui, dans son tableau comparatif, donne 67 millions d'euros pour sept Reaper, deux stations sol et la logistique initiale.
Ce qui me semble tout aussi important, c'est qu'à ce prix, on n'a qu'une version d'observation, loin de toutes les capacités attendues des militaires.
Disons-le clairement : sans définition précise des besoins, pas d'offres comparables, et c'est bien regrettable, même s'il est plus que vraisemblable que le Reaper soit moins cher que son concurrent car il est produit en grande série.
D'un point de vue militaire, le Reaper a largement fait ses preuves et certains points faibles seront corrigés sur le block 5.
La comparaison avec le Héron-TP israélien est difficile car cet appareil entre en service opérationnel dans l'armée israélienne, et celle-ci fait preuve d'une extrême discrétion sur ses capacités et ses performances réelles. Je me suis rendu récemment en Israël pour lever certaines interrogations, et il est clair que le Héron TP diffère peu en réalité du Reaper.
À mon sens, les choix techniques finaux relèvent de l'expertise du ministère de la défense. En tout état de cause, j'ai pu vérifier que les Israéliens sont aussi très ouverts à une coopération approfondie.