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Intervention de François Vannson

Réunion du 13 décembre 2011 à 15h00
Limite d'âge des magistrats de l'ordre judiciaire — Discussion après engagement de la procédure accélérée d'un projet de loi organique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Vannson, rapporteur :

de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous sommes saisis en première lecture d'un projet de loi organique, déposé le 23 novembre dernier, visant à appliquer aux magistrats l'accélération du calendrier de la réforme des retraites prévu pour les fonctionnaires des trois fonctions publiques par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 adopté le 22 novembre dernier.

En 2010, notre pays a engagé une réforme des retraites destinée à parvenir à l'équilibre des comptes de la branche vieillesse, tous régimes confondus, à l'horizon 2018. La moitié des économies permises par cette réforme repose sur la modification progressive des bornes d'âge légal de départ à la retraite et des bornes d'âge de départ à taux plein. Suivant cette logique, la « fenêtre » d'ouverture des droits à pension a été uniformément décalée de deux ans pour tous les régimes de retraite.

Ainsi, l'âge d'ouverture du droit à la retraite a été relevé de 60 à 62 ans à l'horizon 2018 pour les générations nées après le 1er janvier 1956, tant pour le régime général que pour les catégories sédentaires de la fonction publique. La limite d'âge, à savoir l'âge auquel une retraite est attribuée « à taux plein » même en l'absence de la durée d'assurance nécessaire, a quant à elle été portée de 65 à 67 ans suivant des modalités différentes entre secteur public et secteur privé.

La situation de nos finances publiques dans le contexte de l'actuelle crise financière a conduit le Gouvernement à engager une accélération du calendrier de relèvement de l'âge d'ouverture des droits à la retraite sans décote. Il a donc présenté, dans le cadre de la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, un amendement appliquant le relèvement de deux ans une génération plus tôt. Le calendrier de relèvement de la limite d'âge est accéléré dans les mêmes conditions : la limite d'âge pour les fonctionnaires passera ainsi à 67 ans dès la génération 1955.

L'accélération du calendrier de relèvement de l'âge d'ouverture des droits des magistrats de 60 à 62 ans se fera dans le cadre général du PLFSS. En revanche, s'agissant de la limite d'âge, une loi organique est nécessaire, en application de l'article 64 de la Constitution, qui dispose qu'« une loi organique porte statut des magistrats ». La limite d'âge fait, en effet, partie intégrante du statut des magistrats.

L'article 1er du présent projet de loi organique a donc pour objet de faire application aux magistrats du dispositif adopté pour les fonctionnaires. L'âge de départ à taux plein sera fixé à 67 ans pour les magistrats nés en 1955, étant précisé que cet âge est relevé de manière croissante pour ceux nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1954 à raison de quatre mois par génération pour les assurés nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1951 et à raison de cinq mois par génération pour les assurés nés entre le 1er janvier 1952 et le 31 décembre 1954.

La semaine dernière, lors de la discussion du texte devant la commission des lois, le Gouvernement a en outre décidé de déposer quatre amendements portant articles additionnels et touchant à la carrière des magistrats. Il s'agit de dispositions contenues dans le projet de loi organique relatif au statut des magistrats déposé le 27 juillet 2011. Compte tenu de l'encombrement de l'ordre du jour parlementaire, il n'y avait que peu de chance que ce texte soit soumis à notre discussion d'ici à la fin de cette législature. Il paraissait donc opportun que ces amendements relatifs au statut des magistrats soient discutés dans le cadre du présent projet de loi organique ; d'autant que les dispositions en question avaient d'ores et déjà fait l'objet d'une concertation avec les principaux syndicats de magistrats. Le rapporteur que je suis a donc donné un avis très favorable à l'ensemble de ces amendements qui ont été adoptés par la commission.

Il s'agit, tout d'abord, d'aménager le régime des magistrats placés en mettant fin aux difficultés apparues à la suite d'arrêts récents du Conseil d'État. Pour ce faire, le nouvel article 2 du texte soumis à notre discussion vise tout d'abord à exclure de la priorité d'affectation les emplois qui correspondent à des fonctions d'encadrement intermédiaire requérant des profils particuliers. La jurisprudence du Conseil d'État n'était pas satisfaisante en la matière puisque des magistrats n'ayant démontré aucune capacité particulière d'encadrement et d'animation au cours de leur carrière pouvaient prétendre, du fait de la priorité d'affectation qui fait suite à une période de placement de deux années, à des postes d'encadrement intermédiaire.

Le nouvel article 2 prévoit, d'autre part, d'augmenter la durée maximum d'exercice des fonctions de magistrat placé. Récemment, le Conseil d'État a considéré que la limitation à six années de l'exercice des fonctions de magistrats placés devait s'étendre sur l'ensemble de leur carrière. Il s'agit de revenir sur cette jurisprudence en assouplissant cette contrainte et en faisant en sorte que ces fonctions puissent être exercées dans la limite de six années consécutives et de douze années sur l'ensemble de la carrière. Ce nouvel encadrement des fonctions de magistrat placé répond ainsi aux voeux de certains magistrats mais aussi aux besoins des juridictions.

La commission des lois a également adopté, sur proposition du Gouvernement, une disposition visant à réduire la proportion d'anciens magistrats référendaires à la Cour de Cassation devant être nommés aux fonctions de conseiller ou d'avocat général à la Cour. Actuellement cette proportion est de un sur quatre, ce qui a pour conséquence de pénaliser de brillants candidats aux fonctions de la Cour de Cassation qui n'ont pas été référendaires dans cette même juridiction. Par ailleurs, il peut arriver que l'on ne trouve pas d'anciens conseillers ou avocats généraux référendaires présentant le profil requis pour prétendre à une telle nomination. Le nouvel article 4 du projet de loi organique propose donc de diminuer la proportion d'anciens magistrats référendaires en la faisant passer de un sur quatre à un sur six.

Autre sujet abordé lors de la discussion en commission : la compétence du comité médical national créé par la loi organique du 5 mars 2007 pour connaître des demandes de placement d'office en congé maladie des magistrats. La rédaction de cette loi organique datant de 2007 privait ces dispositions de toute application. Conscient de ces difficultés, le Gouvernement a fait adopter en commission un amendement visant, d'une part, à expliciter la compétence du comité médical national en matière de congé longue durée et, d'autre part, à créer un comité médical national d'appel. Tel est l'objet du nouvel article 5.

Enfin, le Gouvernement a souhaité saisir l'opportunité de la discussion de ce texte sur le statut des magistrats pour lever les contraintes qui pèsent sur la mobilité statutaire. Tel est l'objet du nouvel article 6 du présent projet de loi organique qui aménage l'obligation, faite par la loi organique de 2007, d'effectuer une mobilité statutaire avant d'accéder aux emplois hors hiérarchie. Trois types de difficultés se posaient, cet article permettra de les lever.

La durée de cette période de mobilité constitue une première difficulté : d'un an, renouvelable une fois, elle n'est adaptée ni aux fonctions pouvant être exercées dans le cadre de la mobilité externe ni aux contraintes du calendrier de nomination des magistrats. Le texte propose donc d'étendre cette période à deux ans.

Le champ de la mobilité statutaire, actuellement trop limité, constitue une deuxième difficulté. Le texte adopté en commission permettra de remédier à ce constat en offrant aux magistrats la possibilité d'accomplir leur mobilité statutaire auprès des juridictions administratives, financières ou internationales. Cette nouvelle possibilité se justifie d'autant plus que la majorité des détachements de magistrats s'effectue actuellement au sein de ces institutions. Cela représente pour les intéressés un véritable dépaysement, que ce soit par la nature du contentieux traité ou par l'environnement de travail.

Enfin, le nouvel article 6 lève une troisième contrainte qui pèse sur la mobilité statutaire en précisant que les services accomplis au titre de cette mobilité sont assimilés à des services effectifs dans le corps judiciaire.

Voilà pour ce qui concerne les amendements du Gouvernement adoptés en commission auxquels j'apporte tout mon soutien.

Je ne reviens pas sur la question des décorations publiques. Dans le cadre de la réunion de la commission qui s'est tenue, au titre de l'article 88 du Règlement, en début d'après-midi, nous avons accepté un amendement de suppression de la disposition qui avait été introduite dans le projet de loi organique sur l'initiative de M. Dosière. C'est une bonne chose car nos magistrats auraient probablement mal ressenti cette démarche…

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