Monsieur le ministre de la culture et de la communication, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, le groupe socialiste radical et citoyen a entendu les appels à soutenir ce texte, au nom du risque encouru de constater, le 22 décembre prochain, l'impossibilité de continuer à percevoir la rémunération pour copie privée
Cette rémunération a vocation à financer le droit d'auteur par un paiement forfaitaire, et contribue également au dynamisme culturel et au développement de l'activité créatrice en France grâce à l'affectation de 25 % des montants perçus, soit 50 millions d'euros annuels, au soutien d'environ 5 000 manifestations culturelles l'ensemble du territoire.
Le groupe socialiste, radical et citoyen répond toujours présent quand il s'agit de soutenir le financement de la création. (« Que c'est beau ! » sur les bancs du groupe UMP.) Il reste que ce texte a été présenté, discuté et va être voté dans une telle précipitation que nous avons considéré – pour le regretter – qu'il ne pouvait être l'occasion d'un vrai débat.
Pourtant, le système doit évoluer et nous sommes un certain nombre dans cet hémicycle à l'avoir souligné. Si personne ne conteste désormais le principe d'une rémunération de la copie privée, le fonctionnement du dispositif tel que nous le connaissons depuis plus de vingt-cinq ans est, lui, régulièrement mis en cause. J'en veux pour preuve le fait que les cinq dernières décisions adoptées par la commission de la copie privée ont fait l'objet de recours devant la juridiction administrative.
Nous parons aujourd'hui collectivement au plus pressé, mais dans l'attente d'un réel débat, nécessairement plus global, sur la question de la rémunération de la création à l'ère numérique. Car nous considérons, je l'affirme avec force, qu'il est plus qu'urgent de mettre l'ouvrage sur le métier, et nous espérons avoir la possibilité dans quelques mois de mener une réelle concertation avec les acteurs concernés afin de mettre en place un système pérenne, juste et efficace.
À cet égard, la loi Lang de 1985 sur la copie privée était un modèle du genre. En effet, conscient des usages de nos concitoyens qui effectuaient des copies d'oeuvres qu'ils avaient acquises pour leur usage privé, le législateur a pris acte de l'impossibilité technique de contrôler chaque acte de copie réalisé par les consommateurs. Il a donc décidé d'instituer un système permettant de concilier la possibilité pour le consommateur de réaliser des copies privées et la rémunération de l'activité créatrice de l'auteur. Cette loi reposait sur la compensation d'un manque à gagner par l'ouverture d'un droit à rémunération et ne cherchait pas à modifier ou à empêcher l'usage des modes de reproduction offerts. C'est toute la différence avec la loi HADOPI, qui, en mettant en place un dispositif répressif, avait la folle ambition de dicter leurs comportements à nos concitoyens.
La loi de 1985 constitue donc une dérogation non seulement au droit d'auteur mais également au principe du paiement à l'acte, en permettant un versement forfaitaire comparable à la licence légale pratiquée en radiodiffusion. Tout le contraire, là encore, de la philosophie de la loi HADOPI, qui entend maintenir le paiement à l'acte là où une rémunération forfaitaire serait mieux adaptée aux usages numériques actuels.
C'est dans cet esprit qu'il faut selon nous aborder les débats à venir, à côté desquels le Gouvernement est complètement passé. Les lois de retardement et de colmatage des brèches ne peuvent cacher la réalité : nous devons nous doter d'un système de rémunération du droit d'auteur qui soit adapté à la réalité des usages numériques.
Pour ce qui nous concerne, comme nous avons su le faire en 1985 et dans le même esprit de recherche d'un nécessaire consensus, en associant tous les acteurs concernés, nous avons pour ambition de prendre à bras-le-corps l'immense chantier de la création à l'ère numérique. Ne peut-on rêver d'une perspective plus exaltante ?
Dans cette attente, notre groupe votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)