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Intervention de Patrick Braouezec

Réunion du 14 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Pensions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Braouezec :

Madame la ministre, voilà des années que le Gouvernement auquel vous appartenez maquille en politique vertueuse de gestion des comptes publics une croisade idéologique contre l'État et les services publics.

L'objectif prioritaire de votre politique de révision générale des politiques publiques, qu'il faudrait rebaptiser politique de régression générale des politiques publiques, n'est pas d'améliorer le fonctionnement de nos administrations et la qualité du service rendu aux usagers, sinon à la marge, mais d'accompagner la réalisation de vos objectifs de réduction des effectifs : 150 000 postes sur la période 2007-2012, soit 7 % de la fonction publique d'État.

Les conséquences en sont désastreuses dans les secteurs de l'éducation, de la justice, de la sécurité publique, de la formation professionnelle et de l'emploi, pour ne rien dire des hôpitaux, sommés aujourd'hui de se soumettre à l'unique critère de la rentabilité et qui connaissent, eux aussi, leur lot de fermetures de services, de suppressions de postes – 1 000 par an à l'Assistance publique de Paris – et la division par trois ou quatre de leurs investissements.

Il en va de même à la direction générale des finances publiques, issue de la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, qui a connu, ces dernières années, des vagues successives de suppressions d'emplois d'une ampleur rare : deux départs à la retraite sur trois ne sont pas remplacés, 15 % des effectifs auront été perdus entre 2002 et 2011 !

Vous présentez ces suppressions d'emplois comme la contrepartie de gains de productivité découlant, notamment, de l'informatisation. Or, comme l'ont souligné les syndicats, cet argument ne tient pas : si l'informatisation a effectivement progressé dans les services, elle s'est, en réalité, traduite par de nouveaux modes d'organisation du travail, parfois même par une hausse de la charge de travail. Elle n'a, par ailleurs, pas empêché, bien au contraire, la hausse structurelle de la charge de travail : hausse de l'accueil, hausse du nombre de dossiers, hausse des appels téléphoniques, évolution de la législation fiscale, fraude fiscale plus complexe, hausse du nombre de comptes de collectivités locales.

La Cour des comptes, dans son rapport consacré aux effectifs de l'État de décembre 2009, avait contesté l'approche qui est la vôtre en matière de gestion des ressources humaines. Elle ne voyait aucune logique à une réduction aussi systématique des effectifs de la fonction publique, qui fait l'impasse sur une véritable réflexion sur l'évolution des missions de l'État.

Contrairement à ce que vous affirmez, les Français, eux non plus, ne sont pas dupes : la plupart jugent très sévèrement votre politique à l'égard des services publics. Le sondage TNS Sofres, réalisé en avril dernier, est sans appel : 71 % de nos concitoyens jugent que votre politique de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux est « une mauvaise chose », 66 % estiment que les moyens alloués aux administrations pour remplir leurs missions sont insuffisants, 51 % estiment que l'État maltraite ses agents.

Les risques que votre politique fait peser sur les missions de la direction générale des finances publiques sont flagrants. Je n'en prendrai qu'un exemple. Nous savons que la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, l'efficacité du contrôle des montages financiers visant l'optimisation fiscale, représentent un enjeu considérable, se chiffrant en dizaines de milliards d'euros. N'y a-t-il pas contradiction à supprimer des postes selon une logique comptable, pour une économie finalement peu significative, au risque de compromettre ces missions de contrôle ? Voilà le type de contradiction où vous conduit l'approche dogmatique qui est la vôtre.

Le dogme du « plus avec moins » n'est que le paravent d'une stratégie délibérée d'appauvrissement de l'État, qui menace dangereusement l'exercice des missions de l'État, y compris les plus régaliennes. Nous ne saurions évidemment cautionner une démarche comptable si peu soucieuse de servir l'intérêt général, et ne voterons donc pas les crédits de la présente mission.

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