Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget de la mission « Défense » est emblématique à plus d'un titre.
Il est tout d'abord le dernier budget de cette législature, marquée par la volonté du Parlement d'inscrire nos armées au coeur d'une stratégie globale et ambitieuse de défense, notamment sur la base du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, et de la loi de programmation militaire votée en 2009 pour les années 2009-2014.
Ce budget s'inscrit ensuite dans le contexte particulièrement difficile de la crise financière et économique que traversent la France et l'Europe tout entière. Ainsi, tout en préservant les orientations fondamentales fixées par le ministère, comme les dépenses d'équipement, ce budget tient compte de l'impératif de maîtrise des dépenses publiques et de la participation de la défense à la réduction des dépenses de l'État. Au total, en 2012, les ressources de la mission « Défense » s'élèveront, hors pensions, à 31,45 milliards d'euros.
Enfin, il s'agit d'un budget particulier dans la mesure où il sera voté au terme d'une année intensément active pour nos armées, engagées sur de nombreux théâtres d'opération, en particulier, ces derniers mois, en Libye.
Sur ce dernier point, permettez-moi de rendre hommage au succès des actions menées cette année par la France.
Au-delà des succès politiques et diplomatiques, c'est surtout la victoire de nos militaires et de leurs chaînes de commandement que nous devons saluer. Le dévouement et le professionnalisme de nos armées, qui n'ont jamais été autant sollicitées, sont exemplaires.
L'opération Harmattan en Libye est arrivée à son terme fin octobre. Il convient donc de rendre un hommage appuyé aux équipes qui ont contribué à ce succès. Vous le ferez d'ailleurs demain, monsieur le ministre, à Mont-de-Marsan, entouré de certains d'entre nous.
Outre la Libye et l'Afghanistan, où nos hommes ont été ou sont encore militairement engagés, il faut aussi saluer l'action de nos forces mobilisées dans des opérations de maintien de la paix ou de coopération militaire, notamment au Liban, au Kosovo ou en Afrique.
En tant qu'ancien officier de la troisième génération du feu, je suis fier de ces réussites, de l'engagement et du professionnalisme de nos forces armées. Le succès de leurs actions ne peut que faire honneur à leurs prédécesseurs et à tous nos soldats tombés au champ d'honneur, dont le souvenir sera célébré dans deux jours au cours des célébrations nationales du 11 novembre.
Au demeurant, les succès à venir de nos armées ne seront assurés que si l'on maintient les budgets, notamment d'équipement.
Permettez-moi d'insister sur ce point tant il conditionne l'engagement militaire de la France sur les théâtres d'opérations extérieures. En effet, depuis la guerre du Golfe, l'armée française n'a jamais été aussi engagée en OPEX. Comment, dès lors, assurer le maintien et la sécurité de nos militaires ? Comment conserver une armée professionnelle, instruite et équipée, si les budgets d'équipement, tant pour les hommes que pour les engins ou les armements, ne suivent pas ?
Fort heureusement, pour 2012, la priorité en faveur de l'effort d'équipement sera maintenue. Après une très forte hausse des crédits d'équipement en 2009, de l'ordre de 20 %, correspondant à un nombre record de commandes pluriannuelles liées à la mise en oeuvre de la loi de programmation militaire, les crédits d'équipement pour 2012 sont en progression de près de 3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2011 et devraient atteindre 16,5 milliards d'euros.
Je ne peux que saluer ces décisions qui permettront d'assurer l'envoi, le maintien et la sécurité de nos militaires en opérations extérieures ou en opérations de maintien de la paix. C'est une condition sine qua non pour garantir le succès de nos opérations.
Malgré un contexte économique difficile nous intimant des restrictions budgétaires, il s'agit aussi d'assurer les crédits suffisants pour former et entraîner nos armées afin que nous continuions de réussir nos interventions.
La question de l'entraînement a été très clairement posée par le général Bertrand Ract-Madoux, chef d'état-major de l'armée de terre, que nous avons récemment auditionné dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012. En effet, lorsqu'il n'est pas engagé sur un théâtre d'opérations, la vocation principale d'un militaire est de s'entraîner pour être prêt le jour où il sera mobilisé.
Or il semblerait que la préparation opérationnelle soit actuellement insuffisante. Les ressources strictement indispensables à la préparation des opérations ont aujourd'hui atteint un niveau plancher qui peut menacer à court terme la préparation opérationnelle de nos forces. De même, la réduction du nombre de militaires en OPEX, avec le départ programmé de l'Afghanistan par exemple, va automatiquement réduire le nombre de journées d'activité opérationnelle, qui devraient théoriquement être compensées par des journées de préparation opérationnelle. Il est donc important d'être vigilant sur ce point, même si je sais, monsieur le ministre, que vous en avez pleinement conscience.
En ce qui concerne l'intervention militaire de la France en Libye, elle a certes mis en évidence le professionnalisme et le savoir-faire de nos soldats mais elle a aussi coûté très cher. Cette année, les surcoûts des opérations extérieures, du fait de l'opération Harmattan, battent des records, surcoûts que vous estimiez d'ailleurs, fin septembre, entre 300 et 350 millions d'euros.
C'est malheureusement le prix de la paix, de la démocratie et de la lutte contre le terrorisme. Sans remettre en cause la légitimité de notre intervention, la question du financement des surcoûts liés à l'opération Harmattan est posée.
Depuis 2009, les surcoûts liés aux OPEX sont pris en charge sur la réserve de précaution interministérielle au lieu de faire l'objet de ponctions sur les crédits d'équipement – nous avons connu cela en d'autres temps et je me souviens très bien que le fameux titre V était amputé très fréquemment avant la fin de l'année. Nous pouvons par conséquent nous rassurer puisque ces surcoûts sont pris en charge par la réserve interministérielle.
Permettez-moi enfin, pour conclure, quelques mots pour rendre hommage aux soldats morts cette année en Afghanistan. L'année 2011 fut particulièrement lourde pour nous puisque, depuis le mois de janvier, 23 soldats sont morts alors qu'on compte 75 morts pour l'ensemble de l'opération depuis 2001. Ces hommes ont donné leur vie pour leur pays et pour une certaine idée de la paix et de la démocratie ; il est indispensable que la nation sache, en retour, leur rendre hommage.
Je souscris donc pleinement aux propositions formulées en octobre dernier par le général Bernard Thorette, ancien chef d'état-major de l'armée de terre et actuellement président de l'association Terre fraternité, qui visent à ériger à Paris un monument dédié à la mémoire des militaires français de la quatrième génération du feu, morts depuis 1962 au cours d'une opération extérieure. J'y vois là l'hommage légitime et la reconnaissance de la nation à ces soldats et à leurs familles ainsi qu'un lien avec les autres générations du feu. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous assurer de la prochaine mise en oeuvre de cette proposition ? (M. le ministre acquiesce.)
Enfin, il va sans dire que je voterai le budget de la défense. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)