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Intervention de Jean-Claude Viollet

Réunion du 9 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Défense

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Viollet, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour l'air :

Monsieur le président, monsieur le ministre, l'année 2011 aura été marquée par l'engagement de l'armée de l'air sur de nombreux théâtres, au premier rang desquels la Libye. Cet engagement a illustré les compétences et savoir-faire, mais également le savoir-être des personnels de notre armée de l'air. Il a aussi permis d'apprécier la capacité des équipements à répondre aux besoins de la mission.

S'agissant des personnels, l'opération Harmattan a révélé toutefois quelques fragilités qui, au-delà de l'engagement total des personnels d'activé, n'ont pu être dépassées qu'avec l'utilisation d'«  abonnés » ou de réservistes et la réduction de certaines activités. Une réflexion s'impose donc a minima dans des spécialités critiques dont les effectifs dimensionnés au temps de paix ne sont pas en mesure de répondre aux besoins du temps de guerre. Je pense aux interprètes images et aux armuriers, mais cela vaut aussi pour les mécaniciens, lorsque les théâtres se multiplient ou qu'un nombre important de bases est engagé.

Au-delà, il nous faut aussi veiller à la régénération du potentiel. Rapporteur du budget air depuis 2008, j'avais l'habitude d'indiquer que les heures d'entraînement des pilotes étaient comptées au plus juste. Mais la multiplication des engagements a creusé le déséquilibre entre des pilotes expérimentés, fortement sollicités, et les plus jeunes, insuffisamment aguerris pour être envoyés en OPEX et qui ne bénéficient pas des minima d'heures de vol requis pour cet aguerrissement Cette situation pourrait devenir très préoccupante si nous ne rattrapions pas le retard accumulé.

S'agissant des équipements, j'ai souvent évoqué la disponibilité de nos avions de transport tactique, mais cela vaut aussi pour nos avions de combat, dont la diversité des flottes et le nombre des points de déploiement compliquent le soutien. Priorité étant donnée à l'opérationnel, cela crée des tensions sur les bases arrière, avec des disponibilités moindres.

En outre, Harmattan entraînera des coûts récurrents de maintien en condition opérationnelle bien au-delà de 2011 qui, n'étant pas éligibles au décret d'avance, devront être financés sur les crédits courants, limitant d'autant les marges de manoeuvre. Cela doit nous inciter à réfléchir à un assouplissement dans la prise en charge des surcoûts OPEX pour tenir compte de façon glissante des dépenses intervenant ex post pour la régénération du potentiel.

Voilà pour le RETEX, le retour d'expérience, de l'opération Harmattan. Mais cela renvoie à l'exécution de la loi de programmation militaire 2009-2014, en particulier à l'état d'avancement des grands programmes d'équipement.

Le Rafale a fait en Libye la démonstration de sa polyvalence et, partant, de sa supériorité opérationnelle sur tous ses concurrents du moment.

S'agissant des Mirage, grâce à l'amendement adopté l'an passé, le pod ASTAC va être transféré du F 1 CR sur le 2000 D, ce qui permettra de conserver la capacité d'entrer en premier. Mais il est urgent d'engager la rénovation du Mirage 2000 D, pour tendre vers la cible de 300 avions de combat polyvalents.

Quant à l'aéromobilité, l'A 400 M devrait arriver en 2014. En attendant, nous continuons de souffrir d'un déficit capacitaire et la perte de compétences reste critique, malgré l'arrivée salutaire des Casa CN 235.

Mais là où la situation est la plus inquiétante, c'est pour les ravitailleurs, dont la commande n'a cessé d'être repoussée et pour lesquels une rupture capacitaire remettrait en cause toute projection de forces et même notre composante aéroportée de la dissuasion. Vous avez décidé d'engager, en 2012, les études de définition et de levée de risques pour lancer cette acquisition ; nous aurons l'occasion de revenir sur ce point avec l'amendement adopté par notre commission.

Pour les drones, vous avez retenu la proposition Dassault Aviation de fourniture d'un nouveau MALE, ou drone « moyenne altitude, longue endurance », sur la base d'une plateforme Héron TP d'IAI, Israel Aerospace Industries. Ce nouveau système qui, sous réserve du bon aboutissement des discussions en cours, entrerait en service début 2014, doit nous garantir contre le risque de rupture capacitaire. Au-delà, il positionne notre base industrielle et technologique pour le MALE franco-britannique de nouvelle génération, ce qui, avec la poursuite du programme NEURON, doit permettre à l'Europe d'être à même de développer encore un avion de combat à l'horizon 2030-2040.

Enfin, et pour m'en tenir à l'essentiel, il nous faut réaliser rapidement la modernisation de notre système de commandement et de conduite des opérations aériennes, le SCCOA, si nous voulons garantir le niveau de protection de notre territoire.

S'agissant de mon dernier rapport pour avis sur ce budget air, je ne peux donc que m'en remettre à la prochaine commission et au prochain exécutif, pour qu'ils n'oublient pas que l'armée de l'air devra faire l'objet d'une attention particulière lors de la préparation de la prochaine loi de programmation, si nous voulons qu'elle reste l'armée de premier rang qu'elle est encore aujourd'hui.

Pour l'heure, eu égard aux interrogations nombreuses qui marquaient cette année encore ce projet de budget, je m'en suis remis à la sagesse de notre commission pour l'adoption des crédits « Air » pour l'année 2012. Celle-ci les a adoptés. Au-delà de mes réserves, notre assemblée fera sans doute de même.

Dès lors, monsieur le ministre, mes chers collègues, je forme ici le voeu qu'il en soit fait le meilleur usage. Nous le devons aux hommes et aux femmes de notre armée de l'air : leur engagement nous oblige. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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