Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, l'année 2011 a été une année exceptionnelle pour notre marine, avec son engagement dans l'opération Harmattan. Engageant vingt-quatre bâtiments et 5 500 marins de la force d'action navale, cette opération est tout simplement la plus importante pour la marine depuis l'opération Trident au Kosovo, il y a douze ans. La quasi-totalité des moyens dont elle dispose a été représentée au large de la Libye : des frégates escortant le groupement aéronaval aux avions de patrouille maritime, en passant par les sous-marins nucléaires d'attaque.
Il est encore trop tôt pour en tirer un bilan complet puisque la Task Force 473 a quitté la zone d'opération le 25 octobre dernier. Néanmoins, l'on peut en retenir des motifs de satisfaction.
Tout d'abord, la qualité des nouveaux matériels. Les frégates de défense aériennes Chevalier Paul et Forbin ont confirmé leurs excellentes performances. Les nouveaux missiles de croisière, Scalp, ont fait preuve, au cours de leurs quinze tirs, de leur extrême précision. Le bâtiment de projection et de commandement a prouvé une nouvelle fois sa grande adaptation et son efficacité dans ce genre d'opération, en embarquant dix-huit hélicoptères de l'ALAT, et en accueillant l'état-major de conduite des opérations.
Ensuite, la qualité des services de soutien. L'opération a été soutenue par la base de défense de Toulon. La marine a su répondre dans des délais très courts et soutenir cet effort dans la durée. Je pense notamment au Charles-de-Gaulle qui aura cumulé 270 jours de mer dans l'année. La disponibilité des matériels aura été très bonne.
Ces deux points démontrent, si besoin était, la pertinence des choix opérés par le Livre blanc et la loi de programmation militaire 2009-2014.
Mais le principal motif de satisfaction vient naturellement de la qualité des équipages. Je tiens à mon tour à rendre hommage à leur courage, leur détermination et leur combativité. J'ai rencontré beaucoup de nos marins au cours de mes déplacements à Toulon et à Brest. Tous m'ont dit leur fierté d'avoir participé à cette opération exceptionnelle, au service d'une cause louable. Alors qu'ils étaient nombreux à rester cantonnés à des missions de sauvegarde maritime, cette guerre représente pour eux une rupture et va marquer, j'en suis sûre, toute une génération de marins.
Quelques motifs d'inquiétude ne peuvent cependant être passés sous silence. La marine a dû réduire sa participation ou annuler plusieurs missions. Cela démontre la fragilité du format actuel de notre flotte. La possibilité d'assurer une permanence de frégate de lutte aérienne et une permanence de frégate anti-sous-marine est, par exemple, aujourd'hui fragile.
Des programmes d'entretien ont été décalés et cela aura des conséquences sur le maintien en condition opérationnelle des navires les plus anciens. Je pense notamment à nos pétroliers ravitailleurs, qui ne disposent plus de toutes leurs capacités opérationnelles. C'est pourquoi, avec François Cornut-Gentille, nous avons proposé un amendement, adopté par la commission, visant à débloquer les crédits nécessaires à l'engagement d'études pour les moderniser ou les remplacer.
Dans le contexte extrêmement difficile que nous connaissons, le budget 2012 peut être jugé satisfaisant dans la mesure où il permet de poursuivre l'effort de modernisation et de rationalisation engagé depuis quatre ans. Les récentes décisions gouvernementales qui sollicitent un effort supplémentaire du budget de la défense ne remettent pas fondamentalement en cause ces équilibres, ce qui me rassure.
L'année 2012 devrait voir l'admission au service actif du troisième bâtiment de projection et de commandement, ou BPC, le Dixmude, né du plan de relance, ainsi que la livraison de la première FREMM, frégate multimissions, l'Aquitaine.
Le 21 octobre dernier a été réceptionné à Lorient le patrouilleur hauturier L'Adroit, développé sur fonds propres par DCNS, selon une stratégie inédite.
L'année 2012 verra aussi la commande de trois patrouilleurs de type supply ship, dont nous avons tant besoin pour les missions de sauvegarde maritime.
La marine poursuit également sa mue des métiers de soutien. Les deux bases de défense que j'ai visitées, Toulon et Brest, qui fut une base expérimentale, sont maintenant pleinement opérationnelles.
L'organisation retenue – soutien spécialisé, soutien spécifique et groupement de soutien de la base de défense – donne satisfaction en termes d'efficacité opérationnelle. Mais le fonctionnement n'est pas encore complètement entré dans les moeurs. Ne faudrait-il pas, monsieur le ministre, créer un échelon intermédiaire de coordination de l'ensemble des services de soutien ?
Si les crédits de préparation et d'emploi des forces navales restent stables, les crédits d'entretien programmé du matériel augmentent pour tenir compte de l'arrivée de matériels modernes, tels les FREMM, NH 90 ou Rafale, aux coûts de maintenance supérieurs.
J'en viens aux crédits consacrés à la déconstruction des bâtiments, un sujet qui m'est cher puisque j'en parle chaque année. Ils s'élèvent à 9,2 millions d'euros pour 2012 et traduisent la démarche exemplaire entreprise par la marine depuis l'épisode du Clemenceau, ce dont je me réjouis.
En conclusion, notre marine aura besoin de choix cohérents et ambitieux si l'on veut que notre pays continue à peser sur les équilibres du monde, comme il a su si bien le faire cette année. Je vous encourage donc tout naturellement, mes chers collègues, à voter les crédits qui nous sont proposés. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)