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Intervention de Jean-Paul Chanteguet

Réunion du 2 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Écologie développement et aménagement durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Chanteguet :

En effet, en 2012 comme en 2011, le secteur de l'environnement n'échappera pas à une politique d'austérité, puisque le nouveau coup de rabot sur le crédit d'impôt développement durable réduira de 600 millions la charge pour le budget de l'État. Par ailleurs, votre gouvernement ne s'attaquera pas aux niches fiscales grises, celles qui sont défavorables à l'environnement et dont le coût a été évalué en 2009 par le Sénat à 5,3 milliards d'euros.

Est-il pertinent de continuer à réduire ce crédit d'impôt, alors que le rapport du Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales montre qu'il a contribué à atteindre les objectifs environnementaux, qu'il s'agisse de la réduction des consommations d'énergie ou des émissions de gaz à effet de serre ?

De même, le choix fait par votre gouvernement de donner la priorité aux rénovations lourdes pour le CIDD et l'éco-prêt ne permettra pas, en l'absence d'un plan massif de financement de la rénovation des logements sociaux, d'atteindre l'objectif du Grenelle de 400 000 rénovations en 2013, puisque, en un an et demi, seulement 150 000 éco-PTZ ont été accordés.

C'est aussi l'austérité pour plusieurs opérateurs de l'État, puisque l'Assemblée nationale a adopté en séance publique deux amendements modifiant pour 2012 les budgets de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques et du Conservatoire du littoral et voies navigables de France qui verront leurs recettes prévisionnelles réduites de 94 millions d'euros par rapport à celles prévues au PLF 2012.

Alors que le ministre de l'agriculture constate que la consommation de pesticides en France est restée stable entre 2008 et 2010 et que, selon lui, on peut faire mieux pour atteindre l'un des objectifs du Grenelle de l'environnement dans le cadre du plan Écophyto 2018, portant à terme sur une réduction de 50 %, le Gouvernement le fragilise en mettant la main de façon machiavélique sur 55 millions d'euros provenant des redevances pour pollution diffuse, bafouant ainsi le principe pollueur-payeur.

Nous devons relever dans ce budget une autre mesure : la modification, à partir du 1er janvier 2012, du seuil de déclenchement du malus annuel à partir de 190 grammes d'émissions par kilomètre au lieu de 245 grammes actuellement. Nous devons également conduire une réflexion sur ce sujet car l'étude réalisée par l'INSEE sur l'impact environnemental du bonus-malus lors de sa première année d'application conduit à douter de son intérêt écologique.

En effet, le constat est sévère. Un mauvais calibrage de la mesure a entraîné une hausse des ventes de voitures et donc des émissions totales de CO2. Il ne suffit pas de crier haut et fort, madame la ministre, que la révolution écologique est en marche, comme vous le faites régulièrement à l'occasion de vos déplacements, par exemple dernièrement en région Rhône-Alpes ; encore faut-il que les faits vous donnent raison.

« La crise ne peut servir de prétexte à un désengagement en faveur de l'écologie », dites-vous, oubliant de préciser que, dans votre esprit, cela concerne les collectivités territoriales, les entreprises et les autres acteurs locaux, mais pas l'État, dont le budget en matière d'environnement est fortement impacté et n'apparaît pas comme une priorité du Gouvernement.

Aujourd'hui, vous n'êtes pas en mesure de présenter un bilan à la hauteur des espoirs qu'avaient fait naître les déclarations du Président de la République. Lorsque vous vous risquez à le faire, ce bilan est le plus souvent celui des collectivités territoriales, à la tête desquelles les socialistes ont montré leur capacité à agir. Dans les nombreux départements, régions, agglomérations et communes qu'ils animent, ils ont pris des engagements en matière de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre et sont allés souvent au-delà des objectifs européens qui s'imposent à nous depuis décembre 2008. Ils ont montré que les modes de transport peuvent être plus partagés, plus collectifs, et cela sans réduire la qualité de vie – bien au contraire. Ils ont construit des centaines de bâtiments à haute efficacité énergétique, montrant par là que le bilan économique de ces investissements est positif.

Ils ont encouragé de nouveaux modes de production et de consommation, en incitant des industriels et des producteurs à éco-adapter leur production, leur permettant de trouver de nouveaux débouchés.

Ils ont vérifié que lorsque l'on met des signaux prix utiles et compréhensibles pour la population, des aides et du soutien, les comportements changent rapidement et se traduisent par des investissements pertinents, des conditions de vie meilleures et un pouvoir d'achat renforcé.

Pour nous socialistes, la diversité des territoires et leur capacité d'innovation et d'expérimentation sont des atouts qui doivent nous aider à engager et porter la transition écologique. Il est un peu osé de votre part, pour ne pas dire plus, madame la ministre, de lancer un appel aux collectivités territoriales à ne pas réduire leur budget en faveur de l'environnement alors que la politique mise en oeuvre par votre Gouvernement, marquée par des transferts de compétences et de charges non compensées, les a asphyxiées : Depuis le vote de la loi de finances de 2010, elles sont privées de toute autonomie financière et fiscale.

L'actualité, au travers de plusieurs dossiers, met cruellement en évidence, madame la ministre, le peu de poids de votre ministère dans le domaine de la lutte contre la pollution des eaux souterraines et de surface.

C'est tout d'abord la Commission européenne qui, le 18 juillet, a adressé à la France un rappel à l'ordre, ou plutôt un réquisitoire au sujet de la pollution de l'eau des rivières de Bretagne et la prolifération d'algues vertes qu'elle entraîne sur le littoral. Pour Bruxelles, il ne saurait être question d'accorder un nouveau délai au gouvernement français. D'ailleurs, la Commission souhaiterait savoir si les autorités françaises estiment que cette pollution requiert l'adoption immédiate de mesures à caractère juridique contraignant, et savoir aussi combien d'exploitations agricoles illégales ont été régularisées ces deux dernières années, autorisant du même coup des milliers d'animaux d'élevage non déclarés en surnombre.

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