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Intervention de Jean-Claude Fruteau

Réunion du 2 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Écologie développement et aménagement durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Fruteau, rapporteur pour avis de la commission du développement durable pour les transports aériens :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », les dotations demandées pour 2012 s'élèvent à 2,217 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 2,205 milliards d'euros en crédits de paiement, soit 4 millions de plus que les crédits de 2011. Encore faut-il préciser que cet accroissement résulte du transfert de quarante équivalents temps plein travaillé depuis le budget général vers le budget annexe.

En 2012, il est prévu de supprimer 149 emplois dans le but de dégager des marges de financement pour les programmes stratégiques du ciel unique européen, à savoir la constitution du bloc d'espace fonctionnel Europe centrale, qui constitue le volet organisationnel de l'intégration européenne des services de navigation aérienne, et la création de l'entreprise commune SESAR, qui vise à développer un nouveau système de navigation qui devrait permettre d'assurer la fluidité du trafic aérien à l'horizon 2020.

Le budget annexe est alimenté par le produit de nombreuses redevances : les redevances de navigation aérienne en métropole, la redevance océanique pour l'outre-mer et les redevances de surveillance et de certification. Il est également alimenté par une quotité de la taxe de l'aviation civile, fixée pour 2012 à 80,91 % de l'ensemble, le reste tombant dans le budget général. Malgré ces ressources, le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » est malheureusement en déséquilibre depuis de nombreuses années.

Cette situation d'endettement, dénoncée notamment par le Cour des comptes et tout à l'heure par M. de Courson, notre rapporteur spécial de la commission des finances, n'est pas saine, puisqu'une partie de l'emprunt est consacrée à des dépenses de fonctionnement. L'unique solution pour un retour à l'équilibre à l'horizon 2020 serait d'attribuer la totalité de la taxe de l'aviation civile à ce budget annexe.

Au-delà de la situation budgétaire, je voudrais aborder trois préoccupations.

Le premier sujet de préoccupation est la fragilité de la reprise du trafic. On a assisté à une véritable reprise en 2010 puis dans les premiers mois de 2011, après une crise très sensible en 2009. En 2011, la hausse est d'environ 6 %, en dépit de certains événements négatifs pour le transport aérien, comme le tsunami au Japon et le printemps arabe. Pour 2012, les incertitudes paraissent beaucoup plus fortes. Depuis le mois de juin, on observe une baisse sur les activités de fret, ce qui est en général un signe avant-coureur de crise. Si Air France-KLM a connu, de la même façon, une forme de rebond, notamment au premier semestre 2011, l'entreprise n'a en réalité récupéré que 50 % des pertes qu'elle avait enregistrées les années précédentes. Son résultat d'exploitation reste tout juste au niveau de l'équilibre, ce qui est insuffisant pour préparer l'avenir. L'environnement économique n'est d'ailleurs pas favorable aux compagnies européennes, en raison notamment de la crise financière du mois de juillet et de l'augmentation du prix des carburants.

Le redémarrage est donc très fragile et la croissance à venir tout à fait incertaine. Ce diagnostic est d'ailleurs confirmé par l'International Air Transport Association, qui vient d'annoncer une baisse de 50 % des prévisions des bénéfices pour l'ensemble des compagnies.

Deuxième sujet de préoccupation, la concurrence des compagnies du Golfe : Fly Emirates, Etihad Airways ou encore Qatar Airways. Ces compagnies ont connu une progression de leur trafic de 50 % en trois ans. Témoignant d'un vrai dynamisme, disposant de positions géographiques favorables, ces compagnies, qui n'ont pas au départ de véritable marché, savent néanmoins capter dangereusement les flux des compagnies européennes – celui d'Air France en particulier – grâce à la constitution de hubs permettant de contourner pour les vols long courrier les grands aéroports d'Europe. Cette concurrence peut presque être qualifiée de déloyale car les compagnies du Golfe bénéficient d'avantages comparatifs importants par rapport aux nôtres en termes fiscaux, sociaux et en matière de coûts d'accès aux aéroports.

Il sera donc nécessaire de trouver dans un avenir proche des réponses rapides à ce grave phénomène de captation des flux de correspondance qui menace nos compagnies, nos aéroports et, au-delà, notre économie.

Mon dernier point de préoccupation concerne les questions environnementales. Je pense particulièrement aux dotations de l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, dont les crédits de personnel et de fonctionnement n'évoluent toujours pas, et alors même que l'ACNUSA s'est vue attribuer de nouvelles compétences importantes. Cette situation ne me paraît pas conforme aux engagements que nous avons pris dans le cadre du Grenelle de l'environnement.

En conclusion, dans ce contexte difficile pour les transports aériens, le budget qui nous est présenté ne me semble pas de nature à faire face à la situation. En effet, puisque les recettes reposent sur des hypothèses de croissance qui ne sont plus d'actualité aujourd'hui, le déséquilibre du budget annexe ne peut que s'aggraver, l'emprunt constituant alors l'unique recours nécessaire. J'avais donc émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de ce budget annexe. Malgré cela, la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire s'est prononcée pour leur adoption. Le groupe SRC ne suivra certainement pas son avis aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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