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Intervention de Lionel Tardy

Réunion du 20 octobre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Après l'article 5, amendement 73

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Mes chers collègues, j'ouvre ici un débat en posant un certain nombre de questions purement politiques. Depuis la création de la rémunération pour copie privée en 1985, ses bénéficiaires doivent en consacrer 25 % au développement de la création. Cela représente aujourd'hui 50 millions d'euros par an, ce qui est loin d'être négligeable.

La première question que je souhaite soulever est la place de chacun – sociétés de gestion de droits et ministère de la culture – dans le dispositif. À qui doivent revenir la maîtrise et la gestion de la politique d'aide à la création ? Faut-il que l'État fasse tout, qu'il laisse les acteurs privés totalement libres, ou faut-il une solution intermédiaire ? Je pense qu'il est nécessaire que l'État intervienne sur deux plans : celui de la cohérence de la politique et celui de la rigueur de la gestion.

Il est indispensable de coordonner toutes ces actions, sous peine d'aboutir à un saupoudrage stérile, faute d'avoir concentré les moyens sur quelques thèmes. On voit bien que les sociétés de gestion de droits ne sont pas toutes d'accord entre elles, et bien souvent incapables de se coordonner.

C'est à l'État d'assurer cette coordination et la cohérence globale des aides.

Sur la rigueur de gestion, on se rend bien compte qu'à côté des grosses sociétés qui ont les moyens de le faire, il y en a de plus petites où c'est beaucoup moins efficace. Là encore, il faut une structure de mutualisation. Je suis parfaitement conscient des oppositions que je suscite, car je propose d'enlever du pouvoir aux sociétés de gestion de droits pour en redonner à l'État. Je dérange aussi, car cette redevance – 180 millions d'euros en 2009 – est devenue une part importante des revenus des sociétés de gestion de droits.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris : derrière cette question de l'aide à la création se pose celle de la redevance pour copie privée. C'est un peu un trou noir législatif, avec un contrôle indigent puisque sans sanction. Elle échappe très largement à notre contrôle, puisque nous n'en fixons ni la taxe ni le taux, pas plus que l'assiette, la répartition et les modalités de recouvrement.

Les sociétés de paiement et de répartition des droits nous disent qu'il s'agit d'un revenu de substitution globalement analogue à ce qu'ils auraient dû toucher si les auteurs de copies privées avaient acquitté des droits. Mais alors, comment se fait-il que les ayants droit aient accepté qu'un quart de ce qui est une rémunération destinée à compenser une perte qu'ils subissent puisse aller au financement d'une politique générale ? Il y a un problème de cohérence dans la définition de la nature juridique exacte de cette redevance pour copie privée.

La Cour de justice de l'Union européenne, dans son arrêt Padawan, a une définition un peu différente, à laquelle nous devrons nous plier tôt ou tard. Elle voit la redevance copie privée comme une indemnisation d'un préjudice. Cela autorise des modes de gestion financière beaucoup plus souples et éventuellement l'instauration d'une taxe.

Les juges français et européens sont en train de mettre le système actuel à terre. Les supports professionnels sont d'ores et déjà exclus de l'assiette par le Conseil d'État.

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