Les années se suivent et se ressemblent : vous reprenez les mêmes recettes, vous changez quelques ingrédients, une toute petite pincée de taxe sur ce que vous appelez les hauts revenus – encore ne s'agit-il vraiment que des très hauts revenus –, un peu moins de sucre dans les boissons et le tour est joué. Cela vous amène évidemment à affirmer que vous avez trouvé l'équilibre. Il n'en sera rien : les mauvaises recettes ne font pas de bons plats et je crains que le vôtre ne soit quelque peu indigeste !
Indigeste pour les salariés tout d'abord qui doivent ajouter un cran à la ceinture qu'ils se serrent un peu plus chaque jour et qui ont la très désagréable sensation qu'on les oublie. Vous aviez promis une prime de 1 000 euros dans de nombreuses entreprises, mais il n'en sera rien – il serait intéressant que nous fassions très rapidement le point sur cette promesse. Pire, la taxe supplémentaire que vous prélevez sur les mutuelles que vous contraignez, malgré vos affirmations, à augmenter leurs cotisations, puisque la taxe sera reconduite chaque année, aura des répercussions sur le pouvoir d'achat et bien entendu sur la santé puisque de plus en plus de gens, on le vérifie déjà, ne peuvent plus se faire soigner correctement.
Je ne peux m'empêcher de penser à mon lointain prédécesseur, lui aussi élu de la Creuse, Martin Nadaud, député ouvrier des années 1870 et 1880, auteur de la loi sur les accidents du travail, laquelle reconnaissait la responsabilité des employeurs, quand je constate que vous vous apprêtez à taxer les indemnités réparatrices – car il s'agit bien d'indemnités réparatrices. Cela me choque profondément.
Indigeste aussi pour les demandeurs d'emplois, toujours plus nombreux et qui ne comprennent pas votre entêtement à maintenir contre tous les avis d'experts les exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires qui profitent certes à quelques-uns – ne le nions pas – mais qui en pénalisent tellement d'autres. Ce déficit de l'emploi, nous le regrettons comme vous ; mais vous n'agissez pas réellement en dehors des emplois aidés que vous avez pourtant critiqués à de nombreuses reprises quand nous les avions mis en place. Vous ne parvenez pas à réduire significativement le chômage, ce que nous regrettons.
Vous avez eu le temps – dix ans –, vous avez bénéficié de la stabilité politique avec des majorités importantes à l'Assemblée et au Sénat, mais vous n'avez pas pris, contrairement aux pays qui nous entourent, les mesures qui s'imposaient. Vous évoquiez les 35 heures ; si vous les jugiez aussi néfastes que cela, la loi peut changer la loi et il fallait donc le faire !
Indigeste également pour les collectivités territoriales. Vous voulez leur demander un nouvel effort. Pourquoi pas ? Mais, bien entendu, vous le faites sans prendre en compte les réelles capacités contributives de chacune.
La bonne idée de la péréquation – car c'est une bonne idée – ne semble en effet correspondre à aucune réalité de rééquilibrage. Cette mesure sera par conséquent totalement contre productive. Moins de moyens, ce sont moins d'investissements, et moins d'investissements, ce sont les entreprises locales qui vont pour l'essentiel en subir les conséquences. Avez-vous, par l'intermédiaire de vos collaborateurs, des contacts avec elles ? Rencontrons-nous les mêmes ?
Vous faites l'inverse de ce qu'il faudrait faire pour certaines collectivités. C'est simple, madame la ministre, aidez les collectivités à investir : les maires ont dans leurs cartons de nombreux projets, des projets intéressants. Ce serait bon pour les entreprises, bon pour l'emploi. Malheureusement, cela ne sera pas le cas.