Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collèges, oui la France traverse une période de crise autant morale que financière qui jamais, dans les temps récents, n'a menacé de dissoudre la nation et l'État, c'est-à-dire le lien social, la cohésion nationale et la sécurité pour tous et pour toutes.
Deux crises majeures et deux écueils nous guettent ; nous en voyons déjà les effets qui commencent à peine à peser dans nos économies et nos budgets.
Le premier, c'est une crise démographique. Nous vivons dans un pays où, depuis quelques années, le budget des comptes sociaux est supérieur à celui de la nation, où les possibilités budgétaires de l'État se limitent à peu plus de 20 milliards d'euros d'investissements, dont la moitié pour les efforts de défense nationale et de sécurité.
Cette crise démographique ne fait que commencer. Le vieillissement de la population lié aux progrès de la science au cours du XXe siècle, qui a vu l'espérance de vie passer de quarante ans en 1900 à plus de quatre-vingts ans aujourd'hui, menace lourdement l'équilibre de nos économies. Si nous n'y prenons garde, à un moment l'entrée de nouveaux actifs sera inférieure à la sortie des seniors. Des mesures courageuses ont déjà été prises mais nous sommes lucides : nous savons bien qu'elles sont insuffisantes et que de nouvelles mesures, encore plus courageuses, seront nécessaires. Ces mesures courageuses auront la particularité pour les gouvernants du moment d'être contradictoires avec les intérêts électoraux à court terme : l'état d'esprit, les sondages, les opinions publiques évoluent beaucoup plus lentement que la réalité des faits économiques.
La deuxième crise majeure est plus sociale : elle concerne plus particulièrement les classes moyennes, ces classes laborieuses qui créent des entreprises constituées de salariées, d'artisans, de commerçants, de paysans, d'agriculteurs, qui sont la source de la cohésion nationale et qui ont vu leur pouvoir d'achat quasiment stagner, en tout cas moins augmenter que celui des classes supérieures. Si nous n'y prenons garde, le sentiment de déclassement, l'arrêt de l'ascenseur social et républicain créeront une dissolution lente encore plus terrible avec une prolétarisation et une paupérisation accentuées. Et certaines mesures fiscales proposées par la représentation nationale, en fusionnant l'impôt sur le revenu et la CSG, ne feraient qu'améliorer dans le pire cette situation terrible pour les classes moyennes.
Nous ne pouvons pas non plus, madame la ministre, rester insensibles aux nécessaires réformes de la gouvernance mondiale et européenne. Il faudra bien que la France fasse à nouveau fortement entendre sa voix pour réformer la Banque centrale européenne.