Austérité aveugle du côté des dépenses, avec des coupes dans tous les budgets, et notamment une baisse de 12 % du budget de l'emploi ; autant de mesures qui ont un impact fortement dépressif sur l'activité économique.
Et que dire de la poursuite de la politique de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ? Déjà, en 2009, Philippe Seguin dénonçait le caractère absurde de cette politique, dont il disait à juste titre qu'elle était caractéristique d'un État incapable d'analyser ses besoins et de programmer ses effectifs. J'ai eu souvent l'occasion de dire, quand nous discutions de la RGPP, que celle-ci aurait pu être une politique intelligente. Bien sûr, il faut moderniser l'État, le rendre efficace. Mais coiffer toute cette politique par un dispositif absurde de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, c'est dénaturer complètement l'exercice. C'est ce qui s'est produit, avec les résultats que l'on connaît. Le dispositif devait rapporter 1 milliard par an ; en réalité, ce ne fut guère plus de 200 ou 300 millions. Cette politique a conduit à des situations difficiles dans certains secteurs de notre administration, pour un bénéfice extrêmement limité en termes budgétaires.
Pour ce qui est de l'austérité aveugle du côté des recettes, madame la ministre, vous aviez en main tous les éléments pour supprimer les niches fiscales injustes et inefficaces. Vous aviez le rapport de l'Inspection générale des finances et le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, sur lequel nous nous sommes beaucoup appuyés, de notre côté, pour rédiger les amendements que nous déposons depuis un an afin de supprimer nombre de niches de notre imposition. Vous aviez en main tous les éléments pour supprimer ces niches injustes et inefficaces sans provoquer d'effet dépressif sur l'activité économique. Quand vous supprimez un dispositif qui ne sert à rien, vous faites une économie nette sans effet dépressif.
Mais lorsque vous inventez de nouveaux impôts – dans ce domaine, vous avez une inventivité illimitée ! – qui pèsent sur les revenus et sur la consommation, vous exercez un effet dépressif sur l'activité. C'est le cas de la hausse de la CSG, de la taxe sur les mutuelles et de la taxe sur les produits sucrés, qui vont peser sur tous les Français.
Votre inventivité en matière fiscale, madame la ministre, le président de la commission des finances l'a relevée hier dans son intervention : vous avez inventé une trentaine d'impôts en taxant les clés USB, les disques durs, vous avez taxé le droit d'ester en justice et celui de faire appel. Vous avez même failli taxer les poissons, les crustacés et les mollusques si la Commission européenne ne vous avait pas arrêtée en chemin ! Aujourd'hui, en taxant les mutuelles, vous voulez réduire les déficits en empêchant les plus modestes de se soigner.
Cette politique, qui aggrave la situation de l'emploi, le pouvoir d'achat et la croissance pour tenter de réduire les déficits, est clairement une impasse. En cassant un peu plus la croissance, vous cassez les recettes. En cassant les recettes, vous aggravez les déficits. Par conséquent, vous courez continuellement après la réduction des déficits sans jamais atteindre votre but. C'est malheureusement le cercle vicieux des politiques d'austérité dans lequel l'ensemble des pays européens s'enfonce.
Mais le résultat, c'est ce qui se produit aujourd'hui : alors même que nous discutons du budget, le Premier ministre annonce qu'il y aura un nouveau plan de rigueur pour s'ajuster à une croissance plus faible. Ce plan ralentira encore un peu plus la croissance. On peut imaginer que, si on ne vous arrêtait pas, vous continueriez ainsi à accumuler des plans réduisant la croissance sans vraiment diminuer les déficits.
Dès l'année 2011, on note un dérapage des déficits, puisque le déficit budgétaire est supérieur de 3,9 milliards à celui voté en loi de finances initiale. « Nous resterons dans les clous de Maastricht », nous dites-vous. Sans doute ! Vous comptez, en effet, sur les collectivités locales et peut-être sur quelques recettes qui viendraient abonder les comptes de la protection sociale. Je trouve profondément choquant, madame la ministre, qu'un État, qui est seul responsable de la dérive de la dette et des déficits, se permette de ne pas indexer les dotations aux collectivités locales alors que ces dotations ont remplacé des impôts qui, eux, augmentaient au gré de l'inflation et de la croissance. Quand nous avons, pour notre part, remplacé des impôts par des dotations, nous les avons indexées sur l'inflation et sur la moitié de la croissance.