Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, chers collègues, nous examinons à partir de ce soir le dernier projet de loi de finances initial de ce quinquennat. J'insiste sur le mot « initial » car nous ne savons pas encore à combien de projets de loi de finances rectificative nous aurons droit d'ici à la fin de la session parlementaire. On peut légitimement s'interroger au vu du très grand nombre de celles-ci pour la seule année 2011, la dernière ayant été discutée ici même hier soir. La veille de l'examen du budget pour 2012, on en était donc encore à débattre d'une loi de finances rectificatives pour 2011 ! Certes, on peut considérer que cette discussion était liée à un événement extérieur puisqu'elle portait sur Dexia, mais avec les lois rectificatives précédentes, le Gouvernement a passé son temps à défaire ce qu'il avait fait auparavant.
Le « meilleur » exemple reste bien sûr le bouclier fiscal, mesure phare du début du mandat de Nicolas Sarkozy, annoncée dès juillet 2007. Le Gouvernement se sera finalement rendu compte de son erreur, erreur dans laquelle il a persisté plusieurs années. Le coût moyen de cette mesure aura été de 600 millions à 700 millions d'euros par an et en 2014, date à laquelle le bouclier fiscal sera supprimé, son coût global atteindra plus de 4,5 milliards, somme qui correspond aux économies censées avoir été réalisées en année pleine au bout de cinq ans grâce au non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux.
Voilà bien ce qui caractérise le bilan de ce quinquennat.
Un Président, se croyant en quelque sorte tout permis en matière fiscale, a joué aux apprentis sorciers en demandant au Parlement d'avaliser successivement la suppression de la taxe professionnelle, après avoir fait une annonce tonitruante qui n'était absolument pas préparée, et la baisse de la TVA dans la restauration, qui a conduit, en pleine période de déficit, à rayer de notre budget près de 3 milliards d'euros de recettes fiscales.
La réalité, c'est que ces erreurs ont eu des effets parfois dramatiques sur l'équilibre de nos finances publiques. Il faut rappeler quelques chiffres en cette heure de bilan du quinquennat. Lors de l'élection de Nicolas Sarkozy, la dette publique représentait 64,2 % du PIB et le déficit 2,7 % ; aujourd'hui, nous atteignons un record avec une dette publique à 83,3 % du PIB et un déficit à plus 7 %. En valeur absolue, rappelons que le déficit est actuellement évalué par vos services, monsieur le ministre, à plus de 95 milliards d'euros, ce qui laisse à penser que l'on frôlera les 100 milliards d'euros à la fin de l'année 2011.
Je sais que vous serez tenté, monsieur le ministre, de nous dire que c'est la crise qui explique cette situation. Mais – et nous devons le rappeler chaque fois que l'occasion nous en est donnée – les rapports de la Cour des comptes, institution on ne peut plus sérieuse, objective et neutre, sont très clairs : près des deux tiers du déficit sont structurels, ce qui correspond à près de cinq points de PIB, conséquence directe des politiques fiscales aussi injustes qu'inefficaces que vous avez mises en place depuis plus de quatre ans. Si nous n'avions pas eu à subir le poids extrêmement lourd de ces mesures successives, notre déficit serait passé d'ores et déjà sous la barre des 3 % de PIB.
Le schéma qui guide le Gouvernement en matière de finances est malheureusement assez simple : il annonce en grande pompe la mise en place d'une nouvelle mesure parée de toutes les qualités, censée résoudre tous les maux ; ensuite, il se rend compte, au mieux, que la mesure ne fonctionne pas ou, au pire, qu'elle aggrave la situation des finances de la France ; alors, soit il annule purement et simplement la mesure, comme ce fut le cas tardivement pour le bouclier fiscal, soit il la compense en allant en quelque sorte faire les poches des Français, ce qui est plus grave. C'est un véritable concours Lépine auquel le Gouvernement s'est livré, monsieur le ministre, pour inventer de nouvelles taxes.
On peut saluer l'imagination dont il a su faire preuve lorsqu'il s'est agi de s'attaquer avec tant de constance au porte-monnaie des classes moyennes : cela a été la taxe sur les factures de téléphone et d'internet, puis la taxe sur les contrats de complémentaire santé, deux fois alourdie, ensuite, cette incroyable invention de la hausse de la TVA sur les parcs à thème, plus récemment la taxe sur les sodas, auparavant, il y avait eu le relèvement de la redevance télévisuelle pour les personnes âgées à laquelle nous avons réussi à faire échec en révélant le projet aux Français. J'en passe et des pires.
En ce qui concerne les promesses restées sans effet, je voudrais insister sur la baisse de la TVA dans la restauration qui a créé une nouvelle niche fiscale totalement injustifiée et toujours aussi inefficace. En tout cas, ses effets bénéfiques pour l'économie n'ont toujours pas été démontrés. J'en veux pour preuve les propos que le Président de la République lui-même adressait au tenancier d'un café …