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Intervention de Michel Bouvard

Réunion du 18 octobre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Bouvard :

Mes chers collègues, la crise de la dette souveraine qui atteint de nombreux pays européens nous rappelle l'importance de maîtriser notre budget et de réduire notre déficit. Il ne s'agit pas, comme cela a été dit tout à l'heure, de satisfaire aux desiderata, aux exigences de telle ou telle agence de notation, mais de prendre en compte le fait qu'une dette peut atteindre un point de non-retour – comme l'illustrent le cas grec ou les difficultés dans lesquelles s'enfonce notre voisin italien – à partir duquel cette dette excessive fait boule de neige : s'ensuit immanquablement une hausse des taux d'intérêt, donc de la charge de la dette, qui réduit nos marges de manoeuvre.

Si cette situation devait se produire en France, ce sont nos concitoyens, ne l'oublions pas, qui, les premiers, en paieraient le prix à travers les sacrifices douloureux qu'ils devraient consentir. Avec la perte de toute marge de manoeuvre budgétaire, c'est aussi, comme le rappelait Philippe Séguin, une part de notre souveraineté nationale qui s'évanouirait.

Je souscris donc pleinement aux orientations du présent projet de loi, qui doit permettre de ramener notre déficit de 95,5 milliards d'euros en 2011 à 81,7 milliards d'euros en 2012, et de respecter ainsi l'objectif d'un déficit de 4,5 % du PIB. Compte tenu des incertitudes qui pèsent sur l'année à venir, je souscris également au voeu exprimé par notre rapporteur général d'améliorer ce solde au cours de notre discussion.

Le projet de loi de finances pour 2012 est placé sous le signe du rétablissement des finances publiques et d'un effort qui porte sur tous les secteurs : effort supplémentaire demandé aux plus aisés de nos concitoyens ; effort de maîtrise de la dépense fiscale ; effort de maîtrise des dépenses de l'État ; effort de maîtrise des dépenses des opérateurs.

Côté recettes, le PLF prévoit une hausse des prélèvements obligatoires de l'ordre de 0,6 %, qui, dans le contexte actuel, participe de la crédibilité du redressement de nos comptes publics. Sans cet effort, l'objectif de déficit public ne pourrait être atteint. Le montant prévisionnel des recettes fiscales nettes atteint ainsi 283,4 milliards, contre 265,5 milliards, et dépasse enfin le niveau de 2008.

Outre la croissance spontanée des recettes fiscales, le PLF pour 2012 conjugué au collectif budgétaire de septembre prévoit 9,3 milliards de ressources supplémentaires, pour lesquelles l'effort est partagé entre les ménages et les entreprises.

Du côté des particuliers, un effort significatif a été demandé aux Français lors du collectif budgétaire de septembre, avec l'alourdissement de la fiscalité sur les plus-values immobilières. Dans ce texte, nous retrouvons cette logique avec la mise en place d'une taxation exceptionnelle sur les hauts revenus. Sur ce point, j'adhère pleinement à la proposition de la commission des finances de ramener son seuil de 500 000 à 250 000 euros par part et d'en adapter le taux. Cette proposition permettra de porter le rendement de la taxe de 200 à 410 millions, tout en restant un bon point d'équilibre et en maintenant l'attractivité fiscale de notre pays.

Le retour à l'équilibre ne saurait reposer cependant sur la seule quête de nouvelles recettes. Il exige pour une part au moins égale la « sécurisation des recettes existantes », pour reprendre une expression qu'affectionne notre rapporteur général.

Le présent projet de loi fixe un objectif de dépenses fiscales pour 2012 à 65,9 milliards, en baisse de 1,6 milliard d'euros. L'orientation est bonne, et l'inscription dans la loi d'un objectif de dépense fiscale restera un acquis de cette législature et de cette majorité.

Je m'interroge cependant sur sa fiabilité, les objectifs précédents ayant été systématiquement dépassés, monsieur le ministre, en raison notamment d'une évaluation par trop conservatrice de l'évolution « naturelle » de ces dépenses et d'une mauvaise évaluation tout court de certaines d'entre elles. D'année en année, le coût de la prime pour l'emploi est ainsi systématiquement sous-évalué de 200 millions, celui du crédit d'impôt pour le développement durable a longtemps erré et reste, avec une estimation à 1,9 milliard pour 2011, sujet à caution, et je ne parle pas du bilan du bonus-malus automobile évoqué ici même hier.

Pour atteindre cet objectif, le PLF comprend donc des mesures destinées à contenir la dépense fiscale. Ces mesures sont légitimes, mais on peut se demander, au regard de la difficulté à respecter cet objectif, si elles ne devraient pas être amplifiées. Comme d'autres, j'apporterai ma contribution à cet ouvrage à travers quelques amendements. On peut cependant regretter que, cette année encore, le recours à un coup de rabot général ait été retenu, au détriment d'une approche plus ciblée, à laquelle le rapport rendu par l'Inspection générale des finances, pour perfectible qu'il soit, devait ouvrir la voie. Nous avions pourtant été nombreux à insister sur la nécessaire discrimination dans ce domaine. En effet, nombre de dépenses fiscales répondent à un objectif parfaitement légitime, et il ne faudrait pas que leur atténuation aboutisse à vider le dispositif de son intérêt.

Il convient aussi, dans le même ordre d'idées, d'être attentif à ne pas créer de distorsions d'attractivité entre différents dispositifs, à la faveur d'un changement de périmètre ou de taux ou d'un coup de rabot. En 2009, une telle distorsion avait ainsi amené à l'arrêt total des investissements dans les résidences, de tourisme ou pour seniors, nécessitant l'adoption d'un dispositif parallèle pour ces résidences. De la même façon, la réforme du dispositif Malraux a certes permis de diviser son coût, passé de 50 millions en 2008 dans l'ancien système à 5 millions en 2011 dans le nouveau, mais cela s'est fait au détriment de nombre d'opérations de restauration dans les centres anciens.

Enfin, quels que soient les progrès qui pourront être faits en matière de recettes, il n'y aura pas de réduction significative du déficit et de la dette sans réduction des dépenses de l'État et un meilleur contrôle des opérateurs.

Ce PLF est le second à appliquer la règle du « zéro valeur hors charge de la dette et pensions » introduite par la loi de programmation des finances publiques. L'application de cette nouvelle norme devrait théoriquement aboutir, en 2012, à un recul en volume de 0,02 %. En l'occurrence, les mesures volontaristes prises par le Gouvernement permettront d'aller jusqu'à 0,2 %. Des efforts importants d'économies ont été réalisés par l'État pour tenir ce double objectif, et l'on ne peut que s'en féliciter.

Il en va ainsi de l'évolution de la masse salariale. Les effectifs de la fonction publique d'État n'ont cessé d'augmenter jusqu'en 2006 pour frôler, malgré les transferts de la décentralisation, les 2 400 000 équivalents temps plein travaillé. Les efforts de réduction menés depuis 2007 à travers le non-remplacement d'un départ en retraite sur deux aboutiront enfin, en 2012, et pour la première fois depuis 1945, à une réduction de la masse salariale de l'État de 167 millions. Ces dernières années, la réduction du nombre de personnels de l'État n'avait en effet pas suffi, à elle seule, à réduire la masse salariale, les économies brutes engrangées étant consommées par les mesures catégorielles, l'évolution du glissement vieillesse technicité et les redistributions. En 2012, les suppressions nettes de poste s'élèveront à 30 512 ETPT, permettant une économie brute de 970 millions et une économie nette de 167 millions. Les efforts entrepris depuis 2007 commencent donc à payer, grâce à la suppression de près de 150 000 ETPT autorisant une économie brute sur le quinquennat de 4 milliards d'euros.

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