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Intervention de George Pau-Langevin

Réunion du 28 septembre 2011 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorge Pau-Langevin, rapporteur :

Cette proposition de loi de Victorin Lurel vise à prévoir les adaptations nécessaires à la situation de la Guadeloupe. La question du statut en outre-mer est récurrente et a donné lieu à des débats passionnés. La réforme de 1982 avait déjà fait l'objet d'une censure du Conseil constitutionnel. Plus récemment, en 2003, les Guadeloupéens, consultés sur l'évolution des institutions, ont rejeté à 73 % la collectivité unique. Victorin Lurel avait alors pris la tête de la croisade contre le projet du Gouvernement.

Alors que la Martinique et la Guyane faisaient des choix différents en la matière, les élus guadeloupéens ont demandé au Gouvernement un délai pour réfléchir à l'évolution statutaire de l'archipel. En juin 2009, on leur a ainsi laissé dix-huit mois pour travailler à des propositions. Mais, en 2010, le Gouvernement a inclus la Guadeloupe dans les dispositions relatives à la réforme générale des collectivités territoriales sans attendre ces propositions. Les élus ont cependant continué de travailler et ont soumis en décembre 2010 un projet alternatif, rejetant l'application pure et simple de la loi sur les collectivités territoriales. Les deux adaptations proposées ont malheureusement été jugées inconstitutionnelles par le Président de la République.

C'est la raison pour laquelle Victorin Lurel nous présente aujourd'hui cette proposition de loi. Ce texte n'est pas révolutionnaire. Tout l'objet du débat est de savoir jusqu'où on peut adapter les lois générales dans le cadre de l'article 73 de la Constitution. L'examen de ce texte m'a donné l'occasion, et je m'en réjouis, d'assister, comme cela est dorénavant permis par la Constitution dans le cadre d'une proposition de loi, aux discussions devant le Conseil d'État.

Les deux propositions visaient, pour l'une, à porter le nombre des conseillers territoriaux à 65, au lieu des 81 conseillers régionaux et généraux existant aujourd'hui ou des 45 prévus par la loi votée l'été dernier et, pour l'autre, à prévoir un scrutin adapté aux caractéristiques et contraintes particulières de la Guadeloupe. C'est à la lumière de l'avis du Conseil d'État qu'elles doivent être aujourd'hui examinées.

Le Conseil d'État a considéré que, dans le cadre d'une adaptation dans une région d'outre-mer, on pouvait prévoir une diminution du nombre de conseillers moindre que celle arrêtée par le Gouvernement. Dans la loi du 26 juillet 2011, on passe en effet de 81 élus au conseil général et au conseil régional à 45 élus. Or c'est une diminution infiniment supérieure à celle qui a été décidée dans la plupart des cas en métropole. Ce chiffre n'est pas comparable non plus à celui retenu pour la Martinique et la Guyane, qui sont l'une et l'autre moins peuplées. Le Conseil d'État a estimé que le chiffre proposé par les élus guadeloupéens était tout à fait acceptable compte tenu de ce qui est prévu dans d'autres régions. Ainsi, le ratio observé pour la collectivité corse appliqué à la Guadeloupe donnerait 147 conseillers territoriaux ! Il est clair que la Guadeloupe a été particulièrement défavorisée. Le Conseil d'État a également souligné qu'il fallait tenir compte des contraintes et caractéristiques particulières de la Guadeloupe et du fait qu'il s'agit d'un archipel et d'une région monodépartementale. Elle sera quasiment la seule dans ce cas puisque la Martinique et la Guyane ont dorénavant un régime spécifique.

S'agissant du mode de scrutin, celui qui était proposé tenait compte à la fois de la représentation territoriale de la Guadeloupe, qui est composée de plusieurs îles, et du fait que les élus, dans le cadre d'une région monodépartementale, sont compétents dans les matières relevant du département et dans celles relevant de la région. Il introduisait donc une dose de proportionnelle afin que l'intérêt régional soit également pris en compte. Il s'inspirait de ce qui existe notamment en Allemagne. Le Conseil d'État a cependant estimé moins certaine la validité de cette proposition au regard de l'article 73 de la Constitution. Étant profondément légalistes, nous respecterons l'avis du Conseil d'État.

Aujourd'hui, nous pouvons faire le choix d'aller de l'avant et de voter ce qui est indiscutable, c'est-à-dire l'article 1er. La consultation du Conseil d'État aura été à cet égard extrêmement fructueuse pour tout le monde, y compris pour le Gouvernement. Il n'y a pas d'obstacle juridique ou constitutionnel à porter à 65 le nombre des conseillers territoriaux en Guadeloupe. L'adaptation du scrutin reste, quant à elle, à définir. La balle est dans le camp du Gouvernement, qui peut désormais, à partir de l'avis énoncé clairement par le Conseil d'État, faire des propositions en matière d'évolution du statut de la Guadeloupe.

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