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Intervention de Dominique Raimbourg

Réunion du 28 septembre 2011 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg :

Ce texte est assez étonnant : son exposé des motifs commence, en effet, par une description assez catastrophiste de la délinquance juvénile qui pourrait être rédigée par un membre de l'opposition dans la perspective des prochaines élections présidentielle et législatives. C'est un véritable réquisitoire, établissant clairement que la situation s'est considérablement aggravée.

Il nous est proposé, en réponse, un dispositif dont je ne nie pas l'intérêt, mais qui reste assez minimaliste : comme le rapporteur l'a indiqué, les centres auxquels les mineurs pourraient être confiés par la justice jouissent d'une très bonne considération, mais ils n'accueillent qu'environ 2 200 stagiaires par an – des majeurs volontaires, acceptant de se plier à une discipline qui leur convient et qui peut leur être utile. L'accueil des mineurs ne représentera qu'une partie des places disponibles : il a été question d'un taux de 10 %, soit 220 jeunes. Même si leur nombre était réévalué, il resterait bien mince à côté des 60 000 mineurs traduits devant la justice chaque année.

Vous nous expliquez, par ailleurs, qu'il convient d'instaurer une solution intermédiaire entre les foyers habituels pour mineurs et l'enfermement. Or, le dispositif est limité à trois cas : la composition pénale, l'ajournement de peine et le sursis avec mise à l'épreuve. Seuls des mineurs ayant commis des actes assez peu graves seront donc concernés : on est loin des mineurs récidivistes qui « polluent » certains quartiers, et pour lesquels il faudrait effectivement trouver une solution. Vous ne répondez donc pas à la situation décrite dans l'exposé des motifs. Au demeurant, on aurait pu se contenter de modifier le statut de l'EPIDe pour lui permettre d'accueillir des jeunes avec l'accord de la justice.

Outre ce hiatus entre le discours et la réalité, je constate l'absence d'étude sur la nécessité du dispositif, sur le fonctionnement des foyers relevant de la protection judiciaire de la jeunesse – qui est assez similaire à celui de l'EPIDe, la disciplinaire militaire en moins –, et sur celui de l'EPIDe lui-même. Il y a pourtant lieu de s'interroger sur la capacité des centres à recevoir des mineurs certes volontaires, mais ayant fait l'objet d'une sanction, sachant qu'ils seront en outre mêlés à des majeurs. Il aurait été également utile d'étudier l'impact de la mesure sur le service civil, de nature volontaire : s'il est peu ou prou associé à une sanction, son image sera dégradée.

Il manque, en dernier lieu, une étude d'impact sur l'image de l'armée. Le général qui dirige la direction du service national nous a rappelé, lors de son audition, que celle-ci avait considérablement pâti du souvenir, même lointain, des bagnes militaires, les « Bat d'Af » ou « Biribi », et des guerres coloniales ; il ne souhaite, en aucun cas, que l'armée soit présentée comme une institution où l'on exécute une punition, surtout à une époque où l'on a besoin de volontaires : l'armée doit rester au service de la nation sans devenir un lieu de punition.

Pour toutes ces raisons, je m'étonne que le texte arrive aussi vite en discussion, alors que seuls 200 ou 300 mineurs devraient être concernés et qu'il est possible de leur trouver une autre place. Afin de nous donner le temps de repenser ce dispositif, nous appelons à voter contre.

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