Le groupe Nouveau Centre estime que ces mesures devraient être amplifiées pour éviter un dérapage des déficits en 2011 et en 2012, mais également adaptées pour les rendre socialement plus justes, compte tenu de la gravité de la situation.
Pour l'exercice de 2011, le Gouvernement constate une dégradation du déficit spontané du budget de l'État de 4, 5 milliards : 3 milliards de pertes de recettes – relevant pour l'essentiel de l'impôt sur les sociétés – et 1,5 milliard lié aux intérêts de la dette. Il propose 500 millions d'économies sur les dépenses et 600 millions de majoration des recettes du budget de l'État afin de réduire le dérapage à 3,4 milliards et de porter le déficit à 95,7 milliards.
Remarquons tout d'abord que, mis à part le dérapage de 1,5 milliard sur les intérêts de la dette, le Gouvernement ne tient pas compte de certaines sous-budgétisations qui nécessiteront des redéploiements budgétaires importants. Ainsi, le coût des OPEX dépassera le milliard d'euros alors que seuls 630 millions d'euros avaient été budgétés. Il en est de même pour l'aide médicale d'État et certaines dépenses sociales dont le coût est plus élevé que prévu du fait du ralentissement économique.
Il est fort probable que, intérêts de la dette et pensions compris, les dépenses de l'État vont croître de 2 % environ et que la double règle consistant en une croissance zéro en valeur des dépenses, hors intérêts de la dette et pensions, et en une croissance zéro en volume, intérêts de la dette et pensions compris, aura bien du mal à être respectée dans sa seconde composante.
La thèse du Gouvernement selon laquelle le dérapage de 3,4 milliards d'euros du budget de l'État sera compensé par une amélioration du solde des comptes sociaux et du budget des collectivités territoriales est, nous semble-t-il, imprudente.
En effet, les plus-values de recettes constatées dans les organismes de sécurité sociale au premier semestre risquent d'être annulées au second semestre du fait du ralentissement économique. Quant aux collectivités locales, leurs besoins de financement, estimés à moins de 2 milliards d'euros en 2011, pourraient se détériorer très vite pour ce qui est des départements et des communes si le Gouvernement maintenait sa position sur la nouvelle taxation des plus-values immobilières à compter du 24 août. En effet, les notaires nous avertissent tous que ces mesures risquent de geler une partie du marché immobilier pendant plusieurs mois.
L'inadaptation aux règles de justice sociale et d'efficacité économique de trois des cinq mesures fiscales qui nous sont proposées mérite d'être corrigée.
En premier lieu, la mesure relative au passage de 5,5 % à 19, 6 % de la TVA sur les entrées des parcs à thème, à laquelle le Gouvernement vient de renoncer, aurait coûté plus cher à l'État qu'elle ne lui aurait rapporté. Pourquoi ? Parce que les accords signés entre l'État et le groupe Disney auraient entraîné un contentieux relevant d'un arbitrage à Genève, qui aurait probablement coûté cinq fois plus que le produit escompté, soit 400 millions à 500 millions d'euros. Qui plus est, l'État aurait subi une forte dévalorisation de son patrimoine puisqu'il est actionnaire d'une partie de ces parcs, via la Caisse des dépôts. Enfin, d'un point de vue social, il faut souligner que cette mesure aurait frappé les familles, ce qui n'est pas souhaitable.
Le Gouvernement propose comme recette de substitution une taxe de 2 % sur les hôtels dits de confort. Le groupe Nouveau Centre a fait d'autres propositions.
En deuxième lieu, la mesure fiscale visant à supprimer les abattements qui aboutissent à une exonération au bout de quinze ans des plus-values immobilières et à les remplacer par un calcul des plus-values fondé sur la différence entre le prix de vente et le prix d'achat indexé est dangereuse économiquement et socialement. Elle aboutirait en effet à une forte contraction des transactions et à une forte chute de la construction pour deux raisons : les propriétaires fonciers céderaient moins facilement leur foncier, et plus le prix augmenterait, plus ils renonceraient à vendre ; les épargnants, quant à eux, réduiraient leurs investissements dans le logement locatif estimant qu'une nouvelle fois, ils ont été trompés, ce qui aboutirait à aggraver le déficit en logements, particulièrement marqué dans les zones tendues.
Le groupe Nouveau Centre, dès la semaine dernière en commission, a proposé une solution plus raisonnable : la réduction de 10 % à 5 % de l'abattement sur les plus-values, ce qui revient à une exonération au bout de vingt-cinq ans au lieu de quinze ans. À cet égard, il convient de rappeler que le délai d'exonération était de vingt-deux ans jusqu'en 2006 et qu'il dépassait, à la fin des années quatre-vingt-dix, plus de trente ans. Notre solution a pour avantage de rester dans la logique du système existant. Cependant, elle ne rapporterait que 1,3 milliard au lieu des 2,2 milliards prévus par la mesure gouvernementale.
Rappelons, en outre, que l'estimation du Gouvernement était surévaluée car elle ne tenait pas compte de la modification du comportement des propriétaires de logements locatifs qu'aurait immédiatement entraînée sa mesure s'il l'avait maintenue en l'état.
Constant dans son comportement responsable, le groupe Nouveau Centre avait proposé d'autoriser le Gouvernement à négocier avec l'État suisse une convention lui permettant d'obtenir un prélèvement forfaitaire de 15 % à 30 % sur les revenus des comptes localisés en Suisse des résidents français, que ces derniers n'auraient pas déclarés au fisc français. D'après les indications fournies par l'État suisse, le montant de ces comptes est de l'ordre de 86 milliards d'euros contre, par parenthèse, 186 milliards pour nos voisins allemands et près de 90 milliards pour nos voisins italiens. L'Allemagne et le Royaume-Uni ayant signé le mois dernier une telle convention, on voit mal la France faire bande à part, d'autant qu'elle rapporterait de l'ordre de 1 milliard d'euros par an à l'État et qu'elle contribuerait à réduire fortement l'intérêt de ne pas déclarer au fisc français le revenu de ses placements en Suisse, ce qui renforcerait la lutte contre la fraude.
Le Gouvernement propose de porter de quinze ans à trente ans la période au-delà de laquelle l'exonération est totale. Ce délai est acceptable. Cependant, nous pensons que les taux de 2 %, 3 % et 10 % sont trop progressifs. Le groupe Nouveau Centre déposera un sous-amendement à l'amendement gouvernemental proposant 2 %, 4 % et 8 %, ce qui devrait être à peu près équivalent en termes de recettes. En revanche, nous sommes d'accord pour ce qui est du report : le choix du 1er février 2012 paraît tout à fait raisonnable.
En troisième lieu, les dispositions proposées par le Gouvernement en matière de plafonnement du mécanisme de report en avant et en arrière des déficits des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés vont dans la bonne direction puisqu'elles vont dans le sens de l'harmonisation fiscale franco-allemande. Cependant, il convient de bien rappeler que les PME sont exclues de ce dispositif dans la mesure où ce sont les grandes entreprises qui en bénéficient massivement – à hauteur de 95 %.
En quatrième lieu, le doublement de 3,5 % à 7 % de la taxe sur les conventions d'assurance des mutuelles de santé n'est pas acceptable en l'état. Il conviendrait d'exonérer de l'augmentation de cette taxe les catégories les plus modestes – étudiants, travailleurs pauvres – et d'améliorer le dispositif du crédit d'impôt pour soutenir les Français les plus modestes. Le groupe Nouveau Centre a d'ailleurs proposé plusieurs amendements allant dans ce sens. Il rappelle qu'il importe de soutenir les contrats solidaires favorisant les parcours de soins et les bonnes pratiques médicales ainsi que la prise en charge des dépassements dans le secteur optionnel, ce qui avait été négocié avec le monde mutualiste.
Enfin, l'augmentation de 2,2 % à 3,4 % du taux de l'imposition sur les revenus du capital va dans le sens, souhaité par le groupe centriste, d'un rapprochement entre la fiscalité des revenus du capital et des revenus du travail. Nous soutenons cette disposition.
Je voudrais, dans une deuxième partie de mon intervention, évoquer les mesures concernant la dette souveraine grecque. Pour nous, elles ne sont pas suffisamment adaptées à la gravité de la situation de l'État grec.
Il y a dix-huit mois, lorsque nous avons voté le premier plan d'aide à la Grèce, j'avais indiqué au ministre de l'économie de l'époque, Mme Lagarde, que ce plan était inadapté pour trois raisons.
Premièrement, les banques privées ne participaient pas à l'effort de redressement en annulant une partie de la dette, en réduisant les taux d'intérêt et en allongeant la durée des prêts, en un mot, en contribuant à restructurer la dette grecque. La moitié des 1l0 milliards de ce premier plan de prêts des États, encore solvables, de la zone euro était utilisée pour rembourser les créanciers privés de la Grèce. Ainsi, on substituait un endettement public à un endettement privé, sans contrepartie du côté des banques. Or, nous autres, au groupe Nouveau Centre, avons toujours plaidé la responsabilité : on ne peut pas prêter à une structure qui est en train de s'enfoncer, fût-ce un État, sans engager sa responsabilité ; en droit des affaires, cela s'appelle du soutien abusif. Nous avions donc demandé à ce qu'une participation des banques figure dans ce premier plan.
Deuxièmement, la Grèce ne peut rembourser une dette qui, par rapport à la richesse créée, ne cesse de s'aggraver : elle atteindra près de 170 % du PIB à la fin de 2011 avec un taux d'intérêt, je vous le rappelle, mes chers collègues, très faible puisqu'il s'élève à 4 % alors que sur les marchés, il s'élève à 15 % – il devrait cependant augmenter et passer en 2013 à 5 %. La Grèce ne peut rembourser qu'une partie de sa dette. En effet, il faudrait que l'État grec ait un budget primaire en excédent d'un montant égal à près de 9 % de son PIB pour pouvoir payer ses seuls intérêts, et même de 19 % pour rembourser sa dette en seize ans. Du reste, le président de la commission de contrôle du budget grec a récemment écrit dans son rapport : « la dynamique de la dette est maintenant hors de contrôle ». Il a même dû démissionner pour avoir dit la vérité, à savoir que la Grèce ne peut consacrer 170 % de la richesse au remboursement de sa dette publique. C'est impossible !