Je souhaiterais faire trois remarques.
D'abord, le débat qui nous occupe ce soir est particulièrement intéressant : c'est un débat de droit mais aussi un véritable débat de société. Les avocats, notamment ceux qui ont plaidé devant des juridictions pénales, savent tous que la place de la partie civile dans le procès pénal est bien singulière. Dans les cours de déontologie prodigués par les barreaux, on apprend aux étudiants avocats que, lorsqu'ils défendront une partie civile, ils ne prendront pas part au procès pénal pour requérir une peine, mais qu'ils seront simplement aux côtés d'une victime qui est souvent plaignante, pour renforcer l'accusation lorsqu'elle vise à faire reconnaître une culpabilité. D'ailleurs, les mots ont un sens. Les plaidoiries des parties civiles se terminent toujours par des formules qui ne visent pas à réclamer une condamnation, mais qui demandent au tribunal d'entrer en voie de condamnation ou de déclarer coupable l'accusé ou le prévenu. Cette situation est très ambiguë car, si la partie civile demande une condamnation, on entre de plain-pied dans la justice privée : celui qui a subi un préjudice demande au juge de condamner ; peu importe son indemnité, ce qu'il veut, c'est une condamnation. Voilà la justice dont nous ne voulons pas : celle qui consiste à indemniser un intérêt privé par une sanction pénale.
Deuxième observation : je n'ai pas signé cet amendement à la demande d'une association mais parce que, depuis une vingtaine d'années, il s'agit d'un sujet de premier plan ; il suffit de lire les revues de droit pénal pour s'en convaincre. Les cours d'assises de France rendent, bon an mal an, 2 500 arrêts. J'aurais aimé citer les chiffres précis, mais nous ne les avons pas.