Cet amendement important vise à régler un problème que nous avons déjà évoqué à plusieurs reprises. La commission des lois a adopté cet article complétant le code de procédure pénale afin de permettre à la victime de former appel sur l'action publique contre les arrêts d'acquittement rendus par les cours d'assises en l'absence d'appel du ministère public. Une telle modification soulève un certain nombre de problèmes de principe de nature juridique et pratique : sur le plan juridique, elle bouleverserait assez profondément notre système d'action publique et, sur le plan pratique, elle soulève plusieurs questions.
Sur le plan des principes, je sais que nous avons tous de la considération pour les victimes et que nous souhaitons qu'elles puissent vivre le procès pénal dans des conditions qui les satisfassent dans leur désir de réparation et qui leur permettent d'anticiper au mieux ce qui est pour elles la procédure de la vraie réparation, c'est-à-dire le débat sur les intérêts civils.
Permettre à la partie civile d'enclencher l'action publique, c'est déjà chose faite, M. Blanc l'a excellemment rappelé dans son intervention. Si le ministère public ne déclenche pas l'action publique, la victime peut le faire au moyen de plusieurs procédures – la citation directe, la plainte avec constitution de partie civile, l'appel sur l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
Mais il y a bien évidemment une différence fondamentale entre déclencher et exercer l'action publique. Dans notre droit, c'est l'État qui exerce l'action publique, dans l'intérêt de la loi et pour réparer un accroc fait au pacte social. La victime a bien sûr le droit d'obtenir réparation pour ce qu'elle a subi, mais la peine pénale n'est pas la réparation pour la victime : c'est la réparation pour la société. Il faut en avoir pleinement conscience. Changer cela, ce serait changer très profondément notre droit…