Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je veux apporter quelques mots de réponse à tous les orateurs. Ils ont été nombreux – plus de trente, me semble-t-il – à pendre la parole, ce qui est un signe de l'intérêt que soulève ce texte, quoi que certains aient pu en dire dans leurs interventions !
La plupart des orateurs ont suivi le plan du texte, se prononçant successivement sur le tribunal correctionnel avec citoyens, sur la correctionnalisation et sur la justice des mineurs. Les critiques ont été à peu près les mêmes ; je veux essayer de répondre aux arguments avancés.
En ce qui concerne tout d'abord des citoyens assesseurs, il s'agit de faire participer des citoyens à un tribunal. Je ne vois pas pourquoi certains ont peur qu'il y ait des citoyens dans une juridiction. C'est là quelque chose de tout à fait naturel, qui existe déjà pour la juridiction criminelle. Vouloir faire en sorte que le tribunal correctionnel puisse accueillir lui aussi des citoyens, qui seront des assesseurs et non des jurés, constitue un progrès pour l'appropriation de la justice par les Français.
À un moment où l'on demande, d'une façon générale, de plus en plus de justice et où l'on attend beaucoup de la justice – peut-être plus d'ailleurs qu'elle ne peut donner –, il me semble sain d'associer les citoyens à son travail pour que chacun puisse se rendre compte de la difficulté qu'il y a à juger. C'est donc un acte civique qui est proposé aux Français. À partir de là, on peut se livrer à des calculs et se demander s'il y aura plus ou moins de citoyens appelés à cette tâche par rapport à la situation actuelle. Chaque année, des citoyens seront amenés à se prononcer dans environ 40 000 dossiers, pour à peu près 2 700 aujourd'hui en cour d'assises. C'est donc forcément un progrès.
Ce dispositif va d'abord être expérimenté : nous commencerons dans deux cours d'appel avant de l'étendre. S'il y a lieu de procéder à des améliorations, nous le ferons. À cet égard, je ne dis pas du tout que l'histoire s'arrête aujourd'hui ; je crois au contraire qu'elle commence. Il peut être intéressant d'associer les citoyens à la justice.
Contrairement à ce que certains – M. Dolez, notamment –ont dit, il n'y aura pas de justice à deux vitesses. Simplement, une formation supplémentaire sera mise en place pour la correctionnelle. Il existe déjà dans notre droit des juridictions spécialisées. Comme on vient de le voir avec un procès qui s'est tenu à Paris, il y a une cour d'assises spéciale pour certains crimes. Des procédures particulières sont prévues pour le terrorisme ou encore la criminalité en bande organisée.
S'agissant de la protection des jurés – puisque M. Urvoas a soulevé la question –, les jurés de cour d'assises sont déjà protégés et il n'y a pas, de ce point de vue, de changement fondamental.
Je veux dire maintenant quelques mots sur la question de la correctionnalisation. On peut considérer que ce phénomène est dû à une définition inadéquate des incriminations, avec pour conséquence le fait qu'on ne parvient pas à faire appliquer la décision du Parlement. D'une certaine façon, cela est parfaitement scandaleux. Il faut donc que l'on y mette un terme.
Pour ce faire, deux méthodes peuvent être envisagées. D'une part, on peut dire que les crimes n'en sont plus. Pour cela, il faut un vote du Parlement. Que les choses soient claires : ce n'est pas ce que je vous propose. D'autre part, on peut continuer à considérer qu'un crime est un crime. Dans ce cas, il faut tout mettre en oeuvre pour le juger comme tel, et non comme un délit. Sinon, nos concitoyens ne pourront pas croire en la justice. C'est la raison pour laquelle nous voulons trouver la bonne solution. Y sommes-nous parvenus ? Peut-être pas ; peut-être avons-nous simplement progressé et nous faudra-t-il encore travailler. Le Gouvernement avait fait une proposition. Le Sénat a choisi une autre voie, tandis que votre rapporteur propose sur ce point une solution sur la constitutionnalité de laquelle le Gouvernement s'interroge – mais nous y reviendrons au court du débat. Comme dirait M. Garraud, il faut du contradictoire dans le débat. (Sourires.)