Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le texte que nous a présenté le Gouvernement modifie la loi fondamentale de notre pays. Il a pour objet de tirer les conséquences des évolutions de la Ve République depuis 1958 : d'abord l'élection du Président de la République au suffrage universel, ensuite et surtout l'instauration du quinquennat et la concomitance des élections présidentielle et législatives, qui ont considérablement renforcé l'exécutif vis-à-vis du législatif.
Ce projet de loi a donné lieu à un long débat et à un travail parlementaire dense, vous l'avez rappelé, monsieur le Premier ministre. Je dois dire que nous avons trouvé, à cette occasion, une ouverture plus large qu'à l'accoutumée de la part du Gouvernement mais aussi de tous les groupes de l'Assemblée, qui ont effectué un travail équilibré.
L'objectif annoncé était de rééquilibrer les pouvoirs entre le Président et le Parlement. Aujourd'hui, on peut dire que de réelles avancées sont d'ores et déjà inscrites dans le texte en ce qui concerne l'ordre du jour, la revalorisation du travail des commissions, le contrôle de l'activité européenne du Gouvernement, notre capacité à nous appuyer sur le Conseil d'État et la Cour des comptes, le droit d'initiative, ou encore la limitation du recours au 49-3. Je suis sûr d'ailleurs que ceux qui prétendent que ces avancées ne sont qu'apparence seront les premiers à en user si le texte est adopté !
Pour sa part, le groupe Nouveau Centre s'est attaché à poursuivre le combat qu'il a toujours mené s'agissant de la Constitution. Sur les points que nous considérions comme essentiels, le texte a évolué positivement : l'impartialité des nominations du Président de la République, mais aussi des présidents des assemblées, qui feront désormais l'objet d'un vote et auxquelles nous pourrons nous opposer, si elles n'étaient pas fondées sur la compétence, à la majorité des trois cinquièmes – en réalité, politiquement parlant, la majorité suffira ; le pluralisme car, à l'issue des débats, ce n'est pas le bipartisme qui l'emporte, mais des droits reconnus à tous les groupes qui se constituent dans les assemblées parlementaires ; la règle d'or budgétaire, avec un principe de responsabilité du Gouvernement pour éviter qu'il ne dépense plus qu'il ne reçoit et ne laisse aux générations suivantes la charge de payer ses dettes. Si nous avons réussi s'agissant du budget de l'État, il nous faudra encore avancer pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale : de nombreux orateurs l'ont fait observer, y compris le rapporteur général du budget lui-même.
Enfin, nous avons également obtenu des avancées très importantes pour nos concitoyens avec le référendum d'initiative populaire et la possibilité pour tous de saisir le Conseil supérieur de la magistrature, ainsi que le Conseil constitutionnel afin que l'on ne puisse pas être condamné en vertu d'une loi inconstitutionnelle.
Le vote que nous allons émettre aujourd'hui sera le premier. Au regard des avancées dont je viens de faire état, le texte bénéficiera d'un a priori favorable de la majorité de notre groupe. Toutefois, il reste encore à convaincre sur certains points. La navette parlementaire doit en donner l'occasion. Avec nos amis de l'Union centriste du Sénat, nous souhaitons voir ce texte évoluer encore, par exemple, pour préserver le droit d'amendement, que l'écriture actuelle pourrait mettre en cause ; pour renforcer le pluralisme, auquel nous sommes très attachés et qui doit pouvoir trouver plus de place ; pour assouplir l'article 40, c'est-à-dire pour permettre aux parlementaires de répartir différemment les crédits budgétaires par mission de l'État sans modifier l'équilibre global. Enfin, nous souhaitons voir le droit des groupes parlementaires renforcé en leur donnant la capacité de saisir le Conseil constitutionnel.
Notre vote d'aujourd'hui n'est donc pas définitif. Pour la majorité de notre groupe, il sera positif, mais nous attendrons avec vigilance et exigence le retour du texte du Sénat. Comme tous les groupes de cette assemblée, je pense, nous souhaitons arriver à un rééquilibrage des pouvoirs et corriger les excès de la Ve République à ses débuts. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)