Il s'agit d'une proposition de loi du groupe SRC, simple, courte et au champ bien circonscrit.
Chaque scrutin est aujourd'hui l'occasion d'un taux d'abstention élevé. Il y a de multiples raisons à cela ; l'une d'elles, très marginale, peut être corrigée en facilitant tout simplement le vote par procuration.
Le vote par procuration est une faculté ouverte par la loi et dérogatoire au droit électoral. Il devient indispensable à la vie démocratique dans une société à la fois vieillissante, avec de nombreuses personnes qui ne sont pas en mesure de se déplacer, et mobile, avec des électeurs qui ne se trouvent pas forcément dans leur commune le dimanche. Il a déjà fait l'objet d'une simplification en 2003, mais mal appliquée : la police et la gendarmerie continuent en effet dans certains départements à exiger des justificatifs des personnes qui demandent une procuration, alors qu'une attestation sur l'honneur suffit désormais.
Notre proposition comprend trois séries de simplifications.
En premier lieu, il s'agit d'autoriser le mandant à désigner un mandataire inscrit dans une autre commune que la sienne. La justification de l'obligation actuelle d'être inscrit dans la même commune s'explique par le fait que le maire contrôle qu'aucun mandataire ne dépasse le nombre maximal de procurations autorisé. Mais aujourd'hui, ce contrôle pourrait parfaitement être réalisé via un registre départemental ou national. Cela permettrait de répondre aux nombreux cas où des enfants voudraient voter pour leurs parents, ou réciproquement.
Il s'agit, en deuxième lieu, de porter à deux le nombre maximal de procurations par mandataire. Actuellement, l'article L. 73 du code électoral prévoit que chaque mandataire ne peut disposer de plus de deux procurations, dont une seule établie en France. Dorénavant, les deux procurations pourraient être établies en France ou à l'étranger. Là encore, il s'agit de résoudre des difficultés pratiques : celles d'un enfant qui veut voter au nom de ses deux parents, d'un parent qui doit voter pour ses deux enfants faisant leurs études dans une autre ville, d'un couple en vacances qui veut donner procuration à un ami commun, par exemple.
En troisième lieu, la proposition de loi vise à permettre l'établissement des procurations en mairie. Aujourd'hui, celles-ci sont faites au tribunal d'instance – très rarement –, mais surtout au commissariat de police ou à la brigade de gendarmerie. Cela pose un problème à la fois aux électeurs, qui ont souvent le réflexe de se présenter à la mairie, et aux commissariats et gendarmeries, qui se trouvent ainsi mobilisés pour des tâches qui ne sont pas au coeur de leur métier, et sans aucune justification depuis qu'ils n'ont plus à vérifier les formalités exigibles avant 2003. L'établissement des procurations en mairie permettrait aux électeurs de gagner en proximité et en simplicité, puisque tout ce qui concerne l'élection s'effectuerait alors en mairie. Cette solution est tout sauf iconoclaste. Elle est proposée depuis plusieurs années par nombre de parlementaires, y compris de la majorité, sous forme de questions écrites ou de propositions de loi. Elle a même été proposée par des députés de la majorité lors de la discussion, à l'automne dernier, de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2).
Je sais pourquoi cette solution n'a pas été retenue : on a pu craindre que certaines mairies ne fassent un usage partial de cette nouvelle prérogative. Pour y répondre, nous proposons trois garanties.
D'abord, il sera précisé par amendement que, si les demandes de procuration sont déposées à la mairie auprès du maire, d'un de ses adjoints ou d'un agent de la commune, ces autorités ne remplissent qu'un rôle de guichet : l'établissement de la liste des procurations appartiendrait à la commission administrative chargée d'établir et de réviser les listes électorales, prévue à l'article L. 17 du code électoral, qui comporte notamment un délégué du président du tribunal de grande instance. Je vous proposerai de bien clarifier ce partage des tâches. Le maire et les personnes habilitées recevront les demandes exactement comme le font les commissariats aujourd'hui. La liste sera validée par la commission, ce qui impose d'ailleurs des délais d'envoi par la poste.
Ensuite, il faut distinguer entre les personnes qui ne seront pas présentes le jour de l'élection et celles qui ne peuvent pas se déplacer et qui doivent fournir un certificat médical. Pour celles-là, nous proposons que le travail de collecte des procurations continue d'être assumé par la police ou la gendarmerie, et non par les élus municipaux.
Enfin, je vous proposerai, également par amendement, cette garantie supplémentaire que les décisions de la commission administrative qui valide la liste des procurations soient susceptibles d'être contestées devant le juge de l'élection par tout électeur et par le préfet.
En conséquence, je vous invite à adopter cette proposition de loi, car les difficultés actuelles d'établissement des procurations conduisent un nombre très important, et qui ira croissant, de citoyens à renoncer à déléguer leur vote.