Toutefois, soyons complets, la situation peut varier d'un pays à l'autre selon le bouquet d'énergies utilisées, que l'on appelle aussi le « mix énergétique ». Le gaz produit localement peut se substituer au gaz importé ou au charbon, qui émet relativement plus de gaz à effet de serre pour la même énergie produite.
Localement, comme l'ont fait remarquer Annie Poursinoff, Martine Billard et Pierre Morel-A-L'Huissier, l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels peut être une activité industrielle qui présente des risques ou entraîne des nuisances en termes de pollution des nappes souterraines et des sols, de dégradation du paysage, de bruit et d'augmentation du trafic routier. Je reprends également là l'argumentaire de Christian Jacob.
C'est en outre une exploitation qui, compte tenu des techniques actuellement utilisées, consomme énormément d'eau : de l'ordre de 15 000 mètres cubes par forage horizontal.
Même si certaines technologies utilisées sont en fait, comme dans l'exploitation américaine, relativement anciennes, notre capacité collective à maîtriser les risques fait aujourd'hui débat. Cependant, nous n'avons pas l'assurance que d'autres nouvelles technologies existent ; en tout cas, rien ne le démontre. C'est d'ailleurs l'une des questions que nous avons posées aux industriels dans le cadre de la mission. Le documentaire Gasland, nominé aux Oscars, nous a tous impressionnés, notamment le passage où l'on voit une boule de feu sortir du robinet d'eau dans une maison américaine. Je suis surprise que vous n'ayez pas été plus nombreux à l'évoquer, mais je suis sûre que vous l'avez tous en mémoire.
Je le répète même si je sais que vous l'avez entendu – certains d'entre vous m'ont même fait la grâce de reprendre ces propos –, il est hors de question de faire de l'exploitation en France au moyen de procédés d'extraction qui auraient une incidence écologique désastreuse. Ce serait un retour en arrière par rapport à tout ce que nous avons fait et voulu ensemble. (« Bravo ! » et applaudissements sur divers bancs.)
Mais qu'en est-il exactement ? Le gaz qui, dans le film Gasland, se retrouve dans les nappes phréatiques venait de la fracturation hydraulique ou d'un forage conventionnel de mauvaise qualité ? S'agissait-il d'une production biogénique indépendante de tout forage ? Aurions-nous besoin, en France, de forer des dizaines de milliers de puits, comme aux États-Unis où – Stéphane Demilly l'a signalé – le droit du sol emporte celui du sous-sol, contrairement à ce qui se passe ici ? Les produits chimiques utilisés pour la fracturation hydraulique ont-ils un impact sur la ressource en eau potable ? Peut-on les sélectionner pour éliminer ceux qui sont dangereux ? Est-il possible ou non d'avoir une exploitation propre et sûre, sous le contrôle rigoureux de l'administration, dans le cadre d'une réglementation française particulièrement protectrice de l'environnement ?
Toutes ces questions sont posées, elles sont en débat : un débat dont on voit bien qu'il fait écho à de très fortes inquiétudes et qu'il n'est ni échu ni cristallisé. Les industriels et certains experts se veulent rassurants. Je reviens sur mon propos qui a été détourné tout à l'heure par Germinal Peiro.