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Intervention de Yves Cochet

Réunion du 29 mars 2011 à 15h00
Débat sur les conséquences environnementales de l'exploitation des huiles et gaz de schiste en france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

Existe-t-il une autre technique d'exploration et d'exploitation que le forage horizontal, ou même dirigé, et l'hydrofracturation ? Pour ma part, je n'en connais pas d'autre. Du reste, les exploitants éventuels font appel à des entreprises comme Halliburton, Baker Hughes ou Schlumberger, qui sont plutôt américaines et ne connaissent que ces techniques. Si vous en connaissez d'autres, vous pourrez peut-être nous les citer.

La fracturation hydraulique horizontale nécessite trois ingrédients nocifs bien connus maintenant : des quantités d'eau phénoménales, des produits chimiques toxiques pour attaquer la roche et des microbilles de sable à injecter pour maintenir ouvertes les failles.

Nous sommes face à une catastrophe potentielle que nous pouvons prévenir au lieu de tenter de pallier ses effets. En mars 2010 – mais cela avait été préparé bien avant –, le Gouvernement a octroyé des permis d'exploration dans trois zones concernant les départements de l'Hérault, de l'Aveyron, de la Lozère, de l'Ardèche et de la Drôme, ainsi que, pour les huiles de schiste, dans le bassin parisien.

Tels sont les dangers environnementaux et sanitaires, assez connus aujourd'hui, notamment aux États-Unis d'Amérique.

Le deuxième point sur lequel je voudrais insister concerne le manque de démocratie. Il faut en effet dénoncer de nouveau l'opacité qui a entouré les procédures d'attribution des permis de recherche de gaz et huiles de schiste non conventionnels, et l'absence de procédure de ratification par le Parlement de l'ordonnance du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier, qui encourage cette opacité.

Les permis d'exploration semblent enfreindre les lois suivantes : l'article 5 de la Charte de l'environnement, que vous connaissez très bien, madame la ministre ; la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 ; la loi du 12 juillet 1983, dite loi Bouchardeau, qui prévoit une grande consultation publique – vous avez d'ailleurs parlé vous-même de consultation publique, j'aimerais avoir des détails sur les grandes lignes de ce que vous projetez d'inscrire dans le projet de loi que vous semblez préparer ; la convention d'Aarhus du 25 juin 1998.

Les demandes d'exploitation du sous-sol devraient non seulement être soumises à enquête publique locale mais faire l'objet d'un débat national organisé par la commission nationale du débat public. En sera-t-il ainsi ?

Un troisième point est peu évoqué : il s'agit de l'échec économique. Voilà déjà plusieurs années que les gaz et huiles de schiste sont exploités aux États-Unis ou au Canada. Or, pour les entreprises américaines du secteur, notamment la plus grande d'entre elles, Chesapeake, c'est un échec commercial : leurs actionnaires commencent à se mordre les doigts en pensant qu'ils sont plutôt perdants. Les opérateurs ont entretenu une sorte d'illusion du succès en avançant des chiffres bidons de production et de réserves, en subventionnant leur activité par l'endettement et la dévaluation des actions des actionnaires. Beaucoup croient encore que les taux initiaux de production, qui sont assez élevés, démontrent le succès de l'exploitation des hydrocarbures de schiste, mais, si elle monte très vite pendant deux, trois ou quatre ans, la courbe atteint ensuite un pic et redescend ensuite très rapidement. Autrement dit, on ignore ou on feint d'ignorer que le déclin de la production est très rapide, à moins de forer encore et encore. Cela coûte donc très cher et ce n'est pas profitable pour les entreprises elles-mêmes.

Certes, il est possible que la ressource soit assez grande – encore que, en Europe et notamment en France, les estimations soient totalement pifométriques –, mais il y a une différence entre la ressource géologique et la réserve économiquement exploitable, qui, à notre avis, est très petite.

Bref, l'exploitation des gaz et pétroles de schiste n'est ni commerciale, ni sanitaire, ni environnementale, ni démocratique. Il faut donc l'abandonner avant même qu'elle ne commence. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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