Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Patrick Kron

Réunion du 15 mars 2011 à 17h00
Commission des affaires économiques

Patrick Kron, président-directeur général d'Alstom :

Je suis heureux d'intervenir dans le cadre de ce cycle d'auditions sur la filière nucléaire française, même si le contexte a évidemment changé.

Alstom réalise un chiffre d'affaires de 24 milliards d'euros et emploie 95 000 personnes, dont un tiers d'ingénieurs, dans 70 pays. Il s'agit d'un groupe à très forte composante technologique, qui dépense quelque 800 millions d'euros par an pour la recherche et le développement.

Nous exerçons trois métiers principaux. La production d'électricité représente la moitié de notre chiffre d'affaires global. La transmission de l'électricité par les réseaux à haute tension – activité que nous avons acquise il y a un an, conjointement avec Schneider Electric, auprès d'Areva – y contribue à hauteur de 20 %. Le reste relève du domaine ferroviaire : fourniture de TGV, métro, tramways, locomotives de fret, équipements, signalisations et infrastructures de transport.

S'agissant de la production d'électricité, Alstom Power est à l'origine du quart de la capacité électrique mondiale : une ampoule sur quatre dans le monde est alimentée grâce à nos équipements et à nos technologies. Cette activité génère un chiffre d'affaires de 14 milliards d'euros, emploie 50 000 personnes et couvre l'ensemble de la gamme des équipements disponibles : centrales à charbon, turbines à gaz, îlots conventionnels des centrales nucléaires, hydroélectricité, éolien et, depuis peu, solaire thermique. Nous suivons donc de près les mouvements de fond qui affectent ces technologies.

Des turbines Alstom sont installées dans une centrale nucléaire sur trois ; nous travaillons en coopération avec les différents acteurs du secteur, comme Areva NP, Westinghouse ou les sociétés chinoises.

En revanche, nous ne sommes pas partie prenante dans la sûreté nucléaire. Une centrale nucléaire est constituée de deux grands ensembles. L'îlot nucléaire, qui comprend le réacteur et les composantes liées au fonctionnement et à la sûreté de celui-ci, est fabriqué par des sociétés spécialisées, comme Areva ou Westinghouse ; quant à nous, nous intervenons sur l'îlot conventionnel, qui regroupe les équipements permettant de transformer en électricité la chaleur produite par la réaction en chaîne. Au cas où il faudrait interrompre le fonctionnement d'une turbine, soit parce que le réseau n'aurait plus besoin d'électricité, soit parce qu'un problème serait survenu, l'îlot nucléaire n'aurait plus de raison de fonctionner et serait arrêté. La conception d'un îlot nucléaire prévoyant la possibilité de démarrer et d'arrêter à tout moment un réacteur, les équipements qui interviennent en aval ne sont donc pas directement impliqués dans les questions de sûreté. C'est pourquoi je ne m'estime pas compétent pour commenter ce qui se passe au Japon ; il est préférable que vous vous adressiez à l'ASN, à Areva et aux exploitants des centrales.

J'ignore quelles seront les conséquences des événements actuels à court et moyen terme. Quoi qu'il en soit, dans le domaine de l'énergie, on se doit de raisonner à très long terme. Comme nous intervenons sur l'ensemble des équipements de production de l'électricité, la principale question qui se pose, pour nous, est de savoir comment évoluera la demande d'électricité et, subséquemment, quel mode de production permettra d'y répondre.

Il y a, dans le monde, un besoin massif en infrastructures en général, et en électricité en particulier, qui soulève d'énormes enjeux en termes de développement économique, de progrès social et de protection de l'environnement, sachant que 40 % des gaz à effets de serre sont émis lors de la production d'électricité. Même si l'on améliore l'efficacité énergétique et que l'on réalise des économies d'énergie, il n'y a aucune raison que la consommation par personne de l'Inde représente durablement le quart de celle de la Chine et une fraction infinitésimale de celles de l'Europe occidentale et de l'Amérique du nord. Or la solution miracle n'existe pas : le nucléaire pose des problèmes de sûreté, le charbon émet du gaz à effet de serre, le gaz a une disponibilité limitée et pose des problèmes géopolitiques en raison de la concentration des réserves, l'hydraulique noie les vallées, les éoliennes gâchent le paysage… La vraie question est de savoir comment faire pour produire l'électricité nécessaire aux besoins futurs de la planète ; il n'y a d'ailleurs pas de raison que la solution soit la même partout dans le monde, car les besoins, l'accès aux ressources et le niveau de maîtrise technologique varient considérablement d'une région à l'autre. En dernier ressort, la réponse est de votre compétence, non de la mienne !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion