Un étranger soumis à une obligation de quitter le territoire français – OQTF – dispose, pour contester la mesure d'éloignement, de 30 jours dans le cas d'une OQTF avec délai de départ volontaire, mais de 48 heures seulement s'agissant d'une OQTF sans délai de départ volontaire. Or, dans ce dernier cas, l'intéressé peut être amené à contester dans un même recours non seulement l'obligation de quitter le territoire mais aussi la décision relative au séjour, la décision refusant un délai de départ volontaire, celle mentionnant le pays de destination et, le cas échéant, celle concernant l'interdiction de retour sur le territoire français et le placement en rétention, soit six décisions administratives différentes. Il est clair qu'en raison de la complexité de la procédure et de la brièveté des délais de recours, la plupart des étrangers n'auront pas la possibilité de déposer leur recours dans les délais. Le dispositif formé par les alinéas 11 à 32 de l'article 23 n'offre donc pas aux étrangers un droit au recours effectif ; c'est pourquoi il doit être supprimé.
Par ailleurs, tout étranger qui a fait l'objet d'une mesure d'éloignement peut être frappé, sur décision de l'administration et sans examen individuel approfondi, d'une interdiction de retour sur le territoire français – IRTF – allant de 2 à 5 ans. Contrairement aux dispositions du droit communautaire, une telle interdiction serait la règle et non l'exception.
En droit français, il existe déjà une interdiction judiciaire du territoire français – ITF – qui peut être prononcée pour entrée et séjour irréguliers. Cette disposition est contraire à la directive « retour » qui dispose que les décisions doivent être prises au cas par cas et tenir compte de critères objectifs, ce qui implique que l'on prenne en considération d'autres facteurs que le simple fait du séjour irrégulier.
Malgré la gravité de la mesure, le projet de loi ne prévoit en outre aucune catégorie de personnes explicitement protégées de ce bannissement. Il n'est pas non plus prévu de possibilité de contester la décision d'IRTF en même temps que l'OQTF, alors même que ces deux décisions peuvent être édictées en même temps. Un tel recours commun permettrait pourtant de conférer à la requête formée contre l'IRTF le même caractère suspensif que pour l'OQTF. Enfin, aucune allusion n'est faite à la possibilité de solliciter la suspension de l'IRTF, alors même que cette possibilité est prévue par la directive.
Ainsi, lorsque l'étranger fait l'objet d'une OQTF avec un délai de départ volontaire, il dispose d'un recours suspensif. Mais s'il n'obéit pas à ce délai de départ volontaire, le préfet peut prononcer une interdiction de retour, laquelle ne peut faire l'objet d'un recours suspensif. Si l'étranger qui a fait l'objet d'une OQTF assortie d'une interdiction de retour, non contestées ou confirmées par le tribunal administratif, s'est maintenu sur le territoire ou est revenu, alors même que l'interdiction court, le préfet peut proroger cette interdiction. Cette prorogation ne peut faire l'objet d'un recours suspensif. Cette carence législative tend à nouveau à renier toute intervention extérieure d'un juge, seule autorité compétente pour prononcer la suspension de l'exécution des décisions administratives. Je propose donc la suppression des alinéas 22 à 32, contraires à l'article 13 de la CEDH sur le droit au recours effectif.