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Intervention de Georges Tron

Réunion du 1er février 2011 à 21h30
Simplification et amélioration de la qualité du droit — Article 146 bis, amendement 67

Georges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique :

Si vous me le permettez, madame la présidente – ce sera la dernière fois –, je souhaiterais répondre à M. Vidalies avec un maximum de précisions, d'abord parce qu'il a eu la gentillesse de développer son argumentation de façon précise, ensuite parce que, comme il l'a rappelé, nous sommes dans une logique qui me conduit à projeter l'intervention de mon prédécesseur André Santini devant la commission.

Ce n'est pas désobligeant de ma part, mais j'ai été un peu surpris, monsieur Vidalies, par la façon dont vous avez introduit votre propos. De quoi s'agit-il en réalité ?

J'évoquerai trois points qui iront du général au particulier.

Cette réforme n'est pas issue de la volonté du Président de la République qui se serait levé un matin en disant : « Comme je ne sais pas quoi faire aujourd'hui, je vais modifier le classement de sortie de l'ENA ! » Le sujet est porté par à peu près toutes les promotions de l'École nationale d'administration, depuis grosso modo quarante années. Je le dis à mes anciens collègues députés, j'ai moi-même, en tant que rapporteur du budget de la fonction publique, reçu pendant des années les représentants des élèves de l'École nationale d'administration, qui venaient dire très clairement que le classement de sortie de l'ENA leur paraissait inadapté et assez injuste. Il aboutissait en effet à sanctuariser quelques places en tête de classement pour des résultats assez approximatifs. Il ne s'agit donc pas d'une volonté subite du Président de la République, mais d'un ensemble de récriminations et de requêtes portées par de nombreux élèves de l'École nationale d'administration, et cela, je le dis clairement, sans aucune forme de sensibilité politique affichée.

Par ailleurs, monsieur le député, nous sommes dans une logique qui ne vise pas seulement la réforme du classement de sortie de l'École nationale d'administration. Nous sommes en train de modifier tout le dispositif des concours de la fonction publique, avec l'objectif clair et précis de permettre à celle-ci de s'ajuster et de se moderniser sur plusieurs points.

Si je devais citer d'autres réformes concernant les concours, je citerais, toujours dans le même esprit, tout ce que nous faisons dans le domaine des CPI – les classes préparatoires intégrées – pour permettre à des jeunes femmes et à des jeunes gens de quartiers défavorisés d'accéder aux grandes écoles. Ainsi la CPI de l'ENA compte-t-elle quinze élèves.

Je citerais aussi la suppression des limites d'âge aux concours, qui permet, notamment à des femmes ayant des carrières sans perspectives, d'avoir à nouveau un déroulement de carrière plus intéressant.

Je pourrais citer de la même façon tout ce que nous mettons en place actuellement dans le cadre de la reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle.

Comme vous pouvez le constater, en partant de l'idée que l'on modernise la totalité des concours, les requêtes formulées pendant des années par les différentes promotions de l'ENA se sont inscrites dans ce cadre.

Je ferai une dernière observation pour répondre directement à votre propos, monsieur Vidalies. J'aurais pu comprendre que vous vous inquiétiez si rien n'avait été prévu pour remplacer le dispositif de sortie de l'ENA. En réalité, l'observation faite par l'ensemble des interlocuteurs qui se sont penchés sur le dossier est la suivante : les administrations d'État sont les seuls employeurs à ne pas avoir de contact direct avec leurs futurs agents et à être soumis au choix de ces derniers. Les administrations employeurs n'ont pas la possibilité de dire, en fonction de la personnalité, du caractère, du profil de ces élèves, lesquels seraient les plus adaptés.

Notre dispositif vise en réalité à ce qu'il y ait un appariement. D'une part, les élèves doivent pouvoir exprimer un choix au sortir de leur scolarité à l'École nationale d'administration ; d'autre part, l'administration doit pouvoir exprimer la volonté d'avoir un contact avec les élèves à la sortie de l'École. Mesdames et messieurs les députés, la modification de la procédure de sortie de l'ENA que nous mettons en place actuellement tend à ce qu'il y ait un tel appariement entre les élèves et l'administration de sorte que cette dernière – je le répète – ne soit pas le seul employeur sans contact avec les élèves.

Vous avez évoqué une question sous-jacente, monsieur Vidalies : peut-on, oui ou non, considérer que le dispositif comporte des risques d'inégalité de traitement en fonction des relations des uns ou des autres ? C'est un sujet que nous avons pris très au sérieux et qui nous a conduits, comme vous le savez sans doute, monsieur le député, à mettre en place une commission ad hoc, présidée par M. Jean-Pierre Jouyet dont chacun connaît les qualités morales et professionnelles.

Cette commission de transparence a précisément pour objectif d'être le filtre qui évite un contact direct entre l'administration et les élèves. La commission devra recueillir, d'une part, les choix exprimés par les élèves concernant leur affectation dans une administration ; d'autre part, elle devra prendre en compte les profils déterminés par les administrations pour les élèves qu'elles souhaitent recruter. À la fin du processus, c'est la commission et la commission seule qui établit l'appariement entre le choix des élèves et le choix des administrations à l'issue de ces entretiens. C'est encore elle qui transmet au Premier ministre la liste qui fera l'objet d'un décret.

Monsieur Vidalies, je puis vous assurer que cette réforme ne sort pas d'un chapeau ! Elle va dans le sens de toute notre action pour une modification et une modernisation de l'administration. Enfin, elle corrige, dans des conditions de transparence parfaitement établies, un système totalement obsolète qui faisait de l'administration française le seul employeur qui n'avait strictement aucune possibilité de déterminer quels seraient les agents les plus aptes à le servir.

J'estime qu'il faut défendre l'article 146 bis. C'est pourquoi, au nom du Gouvernement, je suis défavorable à cet amendement de suppression.

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