La personne mise en cause aura-t-elle la possibilité ou non d'être assistée d'un avocat ? Quelle est la durée maximale de cette audition ? Quelles sont les garanties en termes de respect de la dignité de la personne suspectée ?
Dans un cas de ce genre, où la personne suspectée n'est pas obligée de rester dans les locaux de la police, le minimum est bien de lui signifier ce droit. Ce qui n'est pas prévu dans le texte de votre amendement portant article additionnel après l'article 11.
La personne sera-t-elle informée de son droit de quitter les locaux à tout moment ? Quelles garanties lui sont apportées pour que ce droit puisse être effectivement et librement exercé ? Qu'est-ce qui empêchera les policiers de prolonger cette audition, éventuellement en menaçant de prononcer la mesure de garde à vue si la personne veut s'en aller sans répondre à des questions ?
Je voudrais citer ici un avis très récent de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, organisme gouvernemental, à propos des présentes dispositions : « Le régime de l'audition hors garde à vue tel qu'envisagé dans le projet de loi ne répond pas aux exigences du procès équitable consacré par l'article 6 de la Convention européenne. Le projet de loi doit prévoir des garanties au premier rang desquelles figure la notification de sa liberté d'aller et venir, qui implique le droit de mettre fin à tout moment à l'audition, du droit au silence, mais aussi de celui de téléphoner à un proche ainsi qu'à son employeur. De même, la personne doit pouvoir, si elle le souhaite, être entendue assistée d'un avocat. La Cour européenne estime qu'aucune déclaration auto-incriminante effectuée en l'absence de l'avocat ne peut servir de base au prononcé d'une condamnation. Or, il peut exister des “raisons plausibles de soupçonner que la personne [entendue sous ce régime hors garde à vue] a commis ou tenté de commettre une infraction”. Ainsi les informations recueillies pourront servir à alimenter des soupçons déjà existants. À partir du moment où des charges pèsent sur une personne, et afin d'éviter des annulations de procédure par les juridictions nationales et une nouvelle condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, cette personne doit pouvoir exercer pleinement les droits de la défense. »
Autant de questions sur lesquelles nous aimerions obtenir des réponses précises.
L'adoption de l'amendement du Gouvernement poserait de sérieux problèmes. Notre sous-amendement propose une formulation, plus proche des exigences de la Cour européenne des droits de l'homme rappelées dans différents arrêts récents.
En tout état de cause, il importe, pour tous ceux qui sont hostiles à l'audition libre, de repousser, lorsqu'il nous sera soumis, l'amendement du Gouvernement portant article additionnel à l'article 11 si rien ne change d'ici là : il reviendrait à introduire l'audition prétendument « libre » en dépit de vos déclarations solennelles devant la représentation nationale, monsieur le garde des sceaux, selon lesquelles le Gouvernement ne reviendrait pas sur la question de l'audition libre.
J'ai donc pris prétexte de la discussion de l'amendement 20 portant article additionnel avant l'article 1er, et de la présentation de notre sous-amendement n° 233 , pour vous demander ces précisions.