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Intervention de Armand Jung

Réunion du 18 janvier 2011 à 21h30
Garde à vue — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArmand Jung :

Non, elle ne l'est pas forcément ! C'est précisément une anomalie de notre code de procédure pénale. Les gardes des sceaux successifs que j'ai interrogés me l'ont confirmé.

Comptez-vous reprendre les propos et l'engagement de M. Karoutchi à votre compte ?

Mes chers collègues, je suis allé plus loin encore dans ma réflexion en déposant, le 20 décembre 2010, une nouvelle proposition de loi relative au renforcement de la place des parties civiles au sein du procès pénal, et non plus uniquement au moment de l'appel. À ce titre, je me félicite que la commission des lois ait introduit un article 7 bis dans ce projet de loi, qui prévoit que si la victime est confrontée avec une personne gardée à vue qui est assistée d'un avocat lors de son audition, elle peut demander à être également assistée par un avocat. Sauf erreur de ma part, c'est d'ailleurs la seule référence aux droits des victimes dans votre texte.

Je pense qu'il faudrait aller plus loin encore et offrir assistance et protection à la victime tout au long du procès pénal, de la garde à vue du mis en cause jusqu'à son procès. Je propose que l'on institue un véritable parallélisme des formes entre le gardé à vue, qui doit effectivement être assisté et entouré, et la victime, qui doit pouvoir bénéficier des mêmes droits, y compris la sollicitation de l'aide juridictionnelle.

Outre l'obligation d'informer les parties civiles de la tenue du procès en appel et l'assistance d'un avocat auprès de la victime, je veux approfondir encore deux autres aspects qui me semblent essentiels : le rôle du juge délégué aux victimes et l'information liée à l'aménagement de peine.

Par sa décision du 28 décembre 2009, le Conseil d'État a abrogé des prérogatives importantes en matière d'exécution des peines qui avaient été conférées au juge délégué aux victimes. Cette abrogation était motivée par le fait que ces prérogatives relevaient du domaine législatif. Le Conseil d'État lance donc un appel au législateur pour que les attributions du juge délégué aux victimes soient rétablies et renforcées légalement. À mon sens, celui-ci est l'un des symboles de la prise en considération des droits des victimes et de la partie civile. Il faudrait que les victimes puissent s'adresser directement à lui pour obtenir des informations sur les allégements ou les aménagements de peine légalement octroyés au condamné. Cette demande d'information devrait être obligatoire et non plus facultative.

Prendre en considération les victimes passerait aussi par la création d'une véritable action de groupe ; or personne n'a encore évoqué cette question depuis le début de la discussion. L'exemple récent du Mediator montre que, si cette procédure était en vigueur en France, les victimes de ce médicament pourraient faire porter leur voix plus haut et leur colère bien plus loin et bien plus efficacement.

La partie civile ne doit plus être considérée comme un intrus mais jouer un véritable rôle dans le procès. Il faut bouleverser l'équilibre traditionnel pour introduire un procès triangulaire dans lequel le procureur, le mis en cause et la victime joueraient tous les trois un rôle défini et reconnu.

À l'heure actuelle, ce sont essentiellement des associations, comme Accord à Strasbourg, qui sont chargées d'accompagner les victimes. Elles réalisent un travail remarquable que je tiens à souligner. Je sais, monsieur le garde des sceaux, que vous accordez une grande importance à l'aide aux victimes, en particulier par la création de bureaux d'aide aux victimes, mais je pense que c'est désormais à la loi d'aller plus loin et d'offrir un cadre plus protecteur aux victimes et aux parties civiles.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, il s'appelait Maxime Hugues ; ce jeune homme est mort au bord d'une route d'Alsace. Ses parents n'ont pas pu le défendre en procès d'appel parce que le code de procédure pénale ne le prévoit pas.

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