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Intervention de Dominique Perben

Réunion du 18 janvier 2011 à 21h30
Garde à vue — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Perben :

Pour les parquets comme pour les juges, il serait nécessaire de renforcer les effectifs. Si l'on veut que la réforme, dans ses aspects pratiques, fonctionne bien, il faudra que des femmes et des hommes en nombre suffisant puissent la mettre en oeuvre, et cela ne pourra sans doute pas se faire à effectifs constants.

Il est dommage, mais c'est la règle de notre fonctionnement démocratique, que nous travaillions sur un texte qui définit les procédures sans parler des finances. C'est dommage, car une réforme sans financement peut ne pas être une bonne réforme. Je ne dis pas cela pour vous gêner, monsieur le ministre, mais au contraire pour essayer de vous aider. Je souhaite que le Premier ministre et le Président de la République entendent cette nécessité pour que, dès la loi de finances de l'année prochaine, et peut-être même au cours de l'année 2011, vous puissiez bénéficier de moyens supplémentaires pour mettre en oeuvre cette réforme.

Je voudrais maintenant évoquer notre méthode de travail parlementaire. La réforme constitutionnelle a permis un grand pas en avant en renforçant le travail de la commission et en posant le principe que c'est le texte voté par elle qui est débattu en séance. Sans esprit polémique, il me semble que nous n'en avons pas tiré toutes les conséquences. Il y a eu le texte du Gouvernement, un travail de la commission qui l'a sensiblement modifié, puis un débat entre le Gouvernement et sa majorité sur ce texte. Il aurait peut-être été utile que le débat entre le Gouvernement et sa majorité se déroule avant le passage en commission, et non après. Je n'adresse pas ce message au seul ministre de la justice, mais à l'ensemble du Gouvernement. Il faut que nous ayons une meilleure capacité d'anticiper, et chacun pourrait ainsi travailler dans de meilleures conditions.

Pour en revenir au texte, je souhaite évoquer quatre points.

Le premier concerne l'audition libre. J'ai toujours été très étonné par cette idée figurant dans le texte initial du Gouvernement. Je n'ai d'ailleurs pas réussi à savoir qui en était l'auteur. Il existe une forme de discrétion sur la paternité de ces quelques articles. (Sourires) N'en parlons plus, merci à M. le rapporteur d'avoir permis de supprimer ces dispositions.

Le deuxième point concerne le délai de carence. Nous avons prévu un délai de deux heures pour tenir compte de la situation concrète des barreaux et donner à l'avocat le temps de venir après avoir été contacté. Ici encore, l'idée est de sécuriser le processus, et non de gêner ou de favoriser les uns ou les autres. Il s'agit de faire en sorte qu'il n'y ait pas de contestation ultérieure du processus de la garde à vue.

Mon troisième point a trait aux longs débats – qui vont continuer dans les heures à venir, j'en suis convaincu –concernant le rôle respectif du procureur de la République et du juge. La spécificité française a beaucoup été critiquée à cette tribune, mais le parquet à la française est également un avantage. Il ne s'agit pas spécifiquement de la garde à vue, mais du fonctionnement général de la justice. Attention à ce que nous allons décider à ce sujet, dans ce texte et dans les années à venir. Veillons à préserver ce qui est de qualité pour n'abandonner que ce qui doit l'être.

Je veux rendre hommage à la qualité du travail accompli par les procureurs de la République et à la manière dont, avec les services de police et de gendarmerie, ils assument leurs responsabilités. Je conseille à mes collègues qui n'ont pas eu l'occasion de le faire de visiter un important tribunal de grande instance et d'y observer la permanence du parquet, le jour et la nuit, et le travail effectué par les magistrats de ces unités. C'est une tâche extraordinairement difficile, remplie de pièges qui peuvent ensuite avoir des conséquences redoutables dans les procédures, et qui est effectuée avec un dévouement remarquable et sans compter les heures. Il n'est pas inutile de le rappeler.

Dans ce texte sur la garde à vue, il nous faut, dans le respect des jurisprudences de la Cour européenne des droits de l'homme et de la Cour de cassation, trouver un dispositif qui définisse le plus précisément possible le rôle du procureur de la République et celui du juge. Je ne m'engagerai pas dans un débat théorique à ce sujet. Essayons d'être pratiques : nous devons mettre en place un dispositif juridique qui fonctionne. Dans le respect de la jurisprudence de Strasbourg, nous devons confier les responsabilités au procureur de la République au début du processus, et il faut que le juge puisse intervenir le plus rapidement possible.

Quatrième et dernier point : les questions de criminalité organisée et de terrorisme. J'ai bien compris que la jurisprudence de la CEDH, reprise par la Cour de cassation, imposait la disparition du principe de catégorie spécifique. Nous l'avions inscrit dans le texte de 2004, et cela avait été explicitement validé par le Conseil constitutionnel.

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