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Intervention de André Vallini

Réunion du 18 janvier 2011 à 21h30
Garde à vue — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Vallini :

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le 25 mars dernier, m'adressant de cette tribune à Michèle Alliot-Marie, je déclarais : « À différer sans cesse la réforme de la garde à vue, la France est, à notre grande honte, de plus en plus souvent condamnée par la Cour de Strasbourg. »

Aujourd'hui, monsieur le ministre, c'est donc sous la contrainte que vous êtes dans l'obligation de légiférer enfin. Mais hélas, comme l'a excellemment démontré cet après-midi Dominique Raimbourg, vous le faites a minima, avec une réforme décevante. Peut-être les débats parlementaires pourront-ils l'enrichir, mais je veux, pour ma part, évoquer quelques affaires qui jalonnent notre histoire pénale et nous rappellent que la garde à vue est une phase cruciale du procès pénal et qu'elle peut conduire aux pires erreurs judiciaires.

En 1949, Jean Dehays, docker à Pornic, est accusé d'avoir assassiné un vieillard. Il reconnaît les faits lors d'une garde à vue dans les locaux de la gendarmerie, mais se rétracte dès le lendemain. Le 9 décembre, la Cour d'assises de Loire-Atlantique le condamne à vingt ans de travaux forcés. En 1952, trois ans plus tard, une dispute dans un café permet à la police de découvrir les véritables auteurs du crime. Rejugé, Jean Dehays, surnommé « le bagnard innocent », est acquitté. Il aura passé six ans en prison.

C'est ensuite l'affaire Deveaux. En 1961, à Bron, près de Lyon, une petite fille de neuf ans est trouvée morte dans une cave ; elle a été frappée de plusieurs coups de couteau avant d'être égorgée. Le jeune apprenti boucher de ses parents, Jean-Marie Deveaux, est aussitôt soupçonné par la police. Il n'a pas d'alibi, ne sait pas se défendre, il s'embrouille, se contredit, Au bout de plusieurs heures d'interrogatoire en garde à vue il avoue, mais se rétracte quelques jours plus tard, Il est condamné à vingt ans de réclusion. Après trois pourvois en cassation, Jean-Marie Deveaux est acquitté le 27 septembre 1969. Il a passé huit ans en prison.

En 1987, Patrick Dils passe aux aveux au bout de 48 heures de garde à vue pour le meurtre de deux enfants tués à coups de pierre. Il est condamné à a réclusion criminelle à perpétuité. Interrogé sur la raison pour laquelle il a avoué et réitéré ses aveux, Patrick Dils dit qu'il s'est retrouvé « dans un univers qu'il ne connaissait pas, avec des gens qui voulaient à tout prix entendre certaines choses ». Il affirme en outre que ses aveux ont été suggérés par les enquêteurs, qu'il était « tout seul, sans personne pour le conseiller ». Le 24 avril 2002, la justice reconnaît son erreur et annule la condamnation. Patrick Dils a passé 15 ans en prison.

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