Comme l'a rappelé le rapporteur, la commission des lois a fait le choix de permettre à la victime de se faire assister d'un avocat lorsqu'elle est confrontée, au cours de la garde à vue, à un suspect lui-même assisté. Sans attendre cette hypothèse, les députés du Nouveau Centre vous proposent d'aller plus loin, monsieur le garde des sceaux, pour les crimes et délits les plus graves – je pense aux délits punis d'une peine de plus de deux ans d'emprisonnement – en prévoyant que la victime puisse se faire représenter par un avocat au cours de la garde à vue. Je rappelle qu'il s'agit là des conclusions du comité Léger, qui préconisait d'offrir à la victime la possibilité de devenir « partie à l'enquête » et de couper court à cette logique qui voudrait que la justice se montre sourde à la souffrance des victimes, laquelle ne peut à terme qu'alimenter l'incompréhension de nos concitoyens, voire une défiance en tous points regrettable à l'égard de notre institution judiciaire. Je voulais, au nom de mes collègues du Nouveau Centre, évoquer les victimes. C'est d'autant plus nécessaire que le projet de loi prévoit un renforcement sans précédent des droits de la défense en garde à vue.
Je ne reviendrai pas sur l'actuelle définition de l'article 63-4 du code de procédure pénale. Avec ce projet de loi, ce sera différent. Nous ouvrons à toute personne gardée à vue un droit effectif à se faire assister d'un avocat, lequel pourra continuer à s'entretenir avec elle. L'avocat disposera désormais également, avec le procès-verbal de placement en garde à vue, des éléments à même d'aider cette personne dans la préparation de sa défense. Il aura la possibilité d'assister la personne gardée à vue au cours des auditions. Il pourra, au terme de chacune d'entre elles, formuler des observations et ce, monsieur le ministre, conformément aux préconisations de la Cour européenne des droits de l'homme, qui s'appuie sur la Convention européenne des droits de l'homme dont nous avons célébré, au mois de décembre dernier, le soixantième anniversaire.
Avec ce projet de loi, il s'agit, au fond, de donner enfin à la présomption d'innocence sa pleine et entière traduction en la consacrant comme un principe cardinal du procès pénal opérant dès les premiers instants de la procédure. C'est donc un progrès indéniable qui devra s'accompagner d'évolutions quant au déroulement même de la garde à vue.
Au nom de mes collègues du Nouveau Centre, j'ai déposé des amendements auxquels le rapporteur et vous-même, monsieur le ministre, avez été sensibles, qui visent à assurer la dignité de la personne gardée à vue. Je pense à la pratique actuelle de la fouille au corps, à des actes humiliants pour la personne gardée à vue et qui sont indignes des principes auxquels vous et moi sommes attachés. M. Vallini m'écoute attentivement et je pense aux moments que nous avons connus lorsqu'il a présidé la commission d'Outreau, aux témoignages des personnes innocentes pourtant condamnées, qui nous expliquaient que les moments cruciaux avaient été ceux où elles étaient gardées à vue, pendant lesquels elles avaient été tutoyées, humiliées, déshabillées, fouillées au corps, et qu'elles avaient dû faire des aveux parce qu'elles avaient craqué.