Merci, monsieur le président, de donner la parole à la dissidence. (Sourires.)
Le budget européen est important, monsieur le secrétaire d'État : 134 milliards d'euros, en hausse de 3,1 %. On constate, une nouvelle fois, que la Commission ne s'applique pas à elle-même les règles qu'elle veut imposer aux États puisque, chaque fois, elle présente un budget qui augmente plus que l'inflation courante, dans la zone euro d'ailleurs.
La France contribue à ce budget à hauteur de 18,9 milliards d'euros, soit 500 millions de plus que l'année dernière. Ce prélèvement représente 6,8 % de nos recettes fiscales, comme l'a souligné le rapporteur général. Au passage, je signale que si nous consacrions cette somme à la sécurité sociale, nous n'aurions plus de déficit. C'est donc aussi un choix politique.
La France est le deuxième contributeur. Le « jaune » indique qu'en 2007, notre contribution nette était de 3,6 milliards. Il n'en demeure pas moins que les projections montrent que cette contribution nette représentera à terme 0,40 % du revenu national, c'est-à-dire qu'elle sera multipliée pratiquement par 2,5 et que, dans quelques années, notre déficit avec l'Union européenne s'élèvera à 10 milliards. On peut se demander si le système est toujours viable.
D'une année sur l'autre, le budget est toujours le même. Il est composé de deux piliers, la PAC et les fonds de cohésion, essentiellement les fonds structurels, le reste étant éparpillé dans une multitude de lignes complètement illisibles.
À l'origine, aux termes du Traité de Rome, les États décidaient mais ils mettaient en oeuvre eux-mêmes, à travers les budgets nationaux. Cela offrait une économie d'échelle formidable, qui n'existe plus aujourd'hui. Et, contrairement à ce que vous venez de dire, je ne pense pas que nous puissions continuer cette marche en avant.
Il est vrai que le problème de l'asymétrie de la zone euro va nous amener à une Union de transferts, qui donnera de l'argent à celles et ceux qui ne peuvent pas suivre le tempo imposé par la Banque centrale européenne. Le risque existe en effet que, par exemple, l'Allemagne paie pour l'Espagne.
Dans ces conditions, je crois qu'il faudra, si l'on veut réconcilier les Français et tous les peuples européens avec la construction européenne, reposer la question du budget européen et laisser la mise en oeuvre aux mains des États. La PAC serait toujours gérée au niveau central, parce que c'est une politique de soutien aux marchés, mais tout le reste devrait redescendre, y compris les fonds structurels, au niveau national. Vous conviendrez avec moi que faire monter de l'argent à Bruxelles et le faire redescendre ensuite pour financer les piscines du Pays basque ou d'ailleurs est une sacrée gageure. Ce n'est pas ainsi qu'on peut optimiser la dépense publique.
Je dirai un mot de la présidence française. Elle est sur la bonne voie avec le pacte de stabilité. Mais l'Union méditerranéenne, a été mise dans une impasse. Elle ne fonctionnera pas parce que vous l'avez intégrée dans un processus communautaire paralytique de l'Union alors qu'il fallait en faire une affaire sui generis. Je sais que nous ne sommes pas d'accord là-dessus mais je maintiens ma position. Je crois qu'à terme, compte tenu de ce qui s'est passé pour le processus de Barcelone, c'est moi qui aurai raison.
La présidence française a dû faire face à deux crises majeures – j'espère que cela s'arrêtera là : la crise géorgienne et la crise financière. Là encore, on nous vante l'Europe. Mais, s'il n'y avait pas eu un Président de la République dynamique qui voulait faire bouger les choses et qui a pris son portable pour informer ses partenaires européens, si on avait simplement suivi les processus communautaires, y compris en matière de coopération politique, on en serait toujours à la case départ. Il faut reconnaître que la France a donné le tempo et a bousculé les procédures.
Je pense la même chose de la crise financière. On a parlé là encore de victoire de l'Europe. Je ne suis pas d'accord. C'est le retour, à juste titre, des États dans la construction européenne, c'est le retour d'une présidence puissante qui a entraîné les autres nations. Vous connaissez ma devise : plus la France est indépendante, plus l'Europe est indépendante ; moins la France est indépendante et active, plus l'Europe est américaine. Cela marche aussi bien en matière de défense qu'en matière de politique étrangère.
Car ce qui vient de se passer traduit la faillite totale de l'idéologie qui a prévalu ces trente dernières années : faillite du « tout concurrence », faillite de l'idéologie de destruction de la PAC…