Lors de la discussion générale, j'ai développé un certain nombre d'arguments pour exprimer notre profond désaccord avec l'article 6. Vous me répondrez, madame la secrétaire d'État, qu'il ne s'agit que de transposer une directive européenne. Certes, mais voilà encore un domaine où le Gouvernement aurait pu invoquer ce que l'on appelle des « raisons impérieuses d'intérêt général ». En l'occurrence – ai-je besoin de le rappeler au Gouvernement et au rapporteur ? –, les objectifs de politique culturelle ont été reconnus au niveau européen comme susceptibles de relever de la notion de « raisons impérieuses d'intérêt général ».
L'introduction d'un tel article de dérégulation caractérisée d'un secteur ô combien sensible, marqué par une précarisation de celles et ceux qui y travaillent, vous fait courir un grand risque. Le spectacle vivant, puisque c'est de lui qu'il s'agit, n'a effectivement pas bénéficié à Bruxelles du soutien d'autres lobbies culturels, ce qui doit être regretté.
Autre élément d'inquiétude, la licence d'entrepreneur de spectacle vise un objectif de professionnalisation. Elle met en oeuvre la présomption de salariat inscrite dans le code du travail et vise aussi à éviter que des spectacles ne soient produits sur notre territoire sans que soient respectées un certain nombre de règles essentielles du code du travail et du code de la sécurité sociale. Nous ne pouvons être qu'inquiets en constatant que l'étude d'impact se borne à reconnaître que les incidences sociales « apparaissent difficilement mesurables ». Certes, la formulation ne manifeste que de la prudence, mais elle ne peut que susciter chez nous encore davantage d'inquiétude à propos de l'inégalité de traitement entre les entrepreneurs européens établis hors de France et les entrepreneurs français établis dans notre pays. Nous courons un grand risque, dans un domaine marqué par le paritarisme et qui, jusqu'à présent, grâce au dispositif en vigueur, d'autorisation et non de simple déclaration, répondait parfaitement à la volonté de l'Union européenne de lutter contre le travail illégal et contre toute déréglementation.
C'est un mauvais coup porté au spectacle vivant dans notre pays. Il est encore temps, en supprimant cet article, d'éviter de charger la barque, si j'ose dire, mais peut-être aurais-je dû utiliser l'expression à propos des eaux de baignade que nous évoquions à l'instant. (Sourires.)