Monsieur le président, monsieur le ministre, les temps changent ! Il est loin, celui où le Gouvernement nous vantait les mérites du plan de relance de 26 milliards d'euros. Il en va de même du grand emprunt de 35 milliards d'euros à des fins d'investissement dans l'avenir.
Il y a, dans ce que nous examinons, une tentative de pirouette rhétorique, mais on ne pourrait y voir un changement d'époque que si l'on ne se souvenait pas que les dispositions en question sont très récentes : le plan de relance a été examiné ici même en février 2009 et l'emprunt national a moins d'un an, puisqu'il date de février 2010.
Donc, le langage est maintenant tout à fait différent. Il cache une réalité. Quelle est-elle ? Pour moi, elle tient en trois points.
Premièrement, les déficits.
Vous nous demandez de nous prononcer, pour l'avenir, sur des déficits que vous n'avez de cesse de dénoncer. Ces déficits sont moins le fait de la crise que de la politique injuste et inefficace du Gouvernement et de la majorité, qui consiste, depuis 2007 – mais c'est déjà le cas depuis 2002 –, à consentir des cadeaux fiscaux aux plus aisés tout en demandant aux plus modestes de se serrer davantage la ceinture. La crise, on l'a dit et il faut le redire encore, parce que telle est la vérité, n'explique qu'un tiers du déficit des finances publiques, que le Gouvernement a laissé filer quand d'autres pays européens le contrôlaient. Votre nouvelle obsession est de comparer sans cesse la France à l'Allemagne. Faites-le aussi pour le déficit ! Souvenez-vous, en effet, qu'en 2005 le déficit allemand était supérieur à celui de la France, mais que l'Allemagne l'a réduit tous les ans pour revenir, en 2007 et 2008, à l'équilibre. Aujourd'hui, alors que nous examinons le texte issu de la commission mixte paritaire, vous nous incitez à instaurer des règles de bonne gouvernance financière pour garantir, à moyen terme, l'équilibre des finances publiques. Pourquoi pas ? Je pense que des règles sont nécessaires. Mais encore eût-il fallu que vous les ayez vous-même respectées ! Or vous n'avez cessé, depuis 2007, d'augmenter le déficit, d'alourdir la dette à l'aide d'un paquet fiscal qui est, en réalité, une véritable « foreuse » fiscale tant les trous qu'il creuse dans nos déficits publics sont nombreux et profonds ! Vous n'êtes pas crédibles et l'on peut, par conséquent, s'interroger sur votre sincérité !
Deuxièmement, vous avez changé de discours, soit, mais votre politique demeure à peu près la même dans un contexte qui, lui, est différent. Ne nous voilons pas la face ! Le présent projet de loi de programmation est, avant tout, un projet de loi de programmation de la baisse injuste des dépenses publiques. Le retour à l'équilibre, complexe équation, comporte plusieurs composantes. Vous en avez oublié certaines, et je pense à la répartition des richesses. Vous avez aussi forcément omis la nécessaire politique d'investissement, dont vous étiez pourtant encore, voici quelques mois, d'ardents défenseurs. Les propos d'Aurélie Filippetti sur le sort du plan de relance sont, je crois, éloquents. En France, nous manquons d'une culture de l'innovation. Nous devons y remédier, mais ce n'est pas avec la diminution drastique des dépenses publiques que vous nous proposez que nous y parviendrons, bien au contraire. Comment peut-on relancer la croissance ? J'ai noté avec intérêt ce qu'a dit M. de Courson sur les prévisions qu'il estime lui-même, tout en votant votre texte, trop optimistes.