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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 15 décembre 2010 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Monsieur le président, chers collègues, comme le disait un personnage qui, à coup sûr, compte beaucoup à vos yeux, monsieur Baroin, à savoir Mao Tsé Toung : « le fondement de la théorie, c'est la pratique ». Autrement dit, pour concevoir un projet qui tienne la route, il faut partir d'une analyse objective du réel. Or, monsieur le ministre, votre projet de loi de finances est très loin du réel. Il est loin de la réalité économique et encore plus loin des attentes de nos concitoyens.

Ainsi, vous affirmiez au mois d'octobre dernier que cette loi de finances pour 2011 « s'inscrit dans un contexte de reprise de la croissance française » et qu'il vient après la « crise internationale majeure que nous avons connue ». Manifestement, ce Gouvernement a un sérieux problème avec l'emploi des temps. Vous utilisez le présent pour parler de la croissance, dont l'avenir reste d'autant plus lointain que vous continuez à appliquer vos vieilles recettes. Et vous utilisez le passé composé pour parler de quelque chose qui reste, malheureusement, à venir. Je parle évidemment de la crise qui sévit depuis l'automne 2008 et dont la dernière, mais sans doute pas l'ultime, étape est l'épisode irlandais. Pas même deux mois après que vous avez affirmé que la crise était finie, la réalité vous rattrape de façon fracassante.

Quant à la croissance, il est presque indécent de nous présenter une hypothèse de 2 %. La seule croissance dont ce Gouvernement puisse s'attribuer le mérite, mes chers collègues – Jérôme Chartier le sait bien –, c'est la croissance des cadeaux fiscaux faits aux privilégiés, la croissance des exonérations de cotisations patronales et celle, de 70 % depuis 2004, des foyers redevables de l'ISF. Pour les plus riches, les choses vont bien. À dire vrai, le Gouvernement a également tout fait pour assurer la croissance du nombre de chômeurs dans notre pays : plus de 800 000 emplois ont été détruits depuis que Nicolas Sarkozy est monté sur le trône.

Si ce projet de loi n'est donc pas fondé sur la réalité économique, ni sur les attentes de l'immense majorité des Français, c'est parce que la réalité que connaissent ce Gouvernement, les membres de la majorité et, surtout, le Président Sarkozy s'arrête aux frontières de Neuilly ou de la villa Montmorency. C'est cette réalité qui a inspiré votre projet de loi. Du moins suis-je rassuré, monsieur le ministre, de constater que vous n'avez pas complètement oublié les leçons du grand timonier : le fondement de vos théories est bien une certaine réalité.

Le fondement de ce projet de budget, c'est la volonté d'enrichir les riches. Mais le contexte financier étant ce qu'il est, c'est-à-dire catastrophique, vous êtes bien obligé de faire semblant de vouloir améliorer un système fiscal que vous avez rendu vous-même de plus en plus inique.

Ainsi, vous prétendez vous attaquer aux retraites chapeau. Celles-ci seront désormais soumises à une contribution sociale de 7 % entre 500 et 1 000 euros par mois, et de 14 % au-delà. Quelle avancée ! Quel progrès pour la justice fiscale ! Ceux qui nous regardent sur internet, ou depuis les tribunes, vont, à coup sûr, être impressionnés. Non, mes chers collègues de la majorité, il ne s'agit que d'une manoeuvre grossière, c'est de la poudre aux yeux. Et cette taxation est d'autant plus insignifiante qu'elle ne touchera pas tous ces privilégiés qui bénéficient déjà du bouclier fiscal dont vous avez refusé la suppression.

Est-il nécessaire de rappeler qu'à trois exceptions près, tous les grands groupes français ont mis en place un système de retraite chapeau ? Au total, selon le décompte de Bercy, 761 présidents et directeurs généraux en bénéficient. Les trente les plus gâtés par votre système, toucheront en moyenne 720 000 euros de pension annuelle, l'équivalent de quatre-vingt-dix fois le minimum vieillesse et vingt fois la retraite moyenne d'un cadre. Monsieur le ministre, traitez-vous aussi bien les braves gens qui sont dans les tribunes de cette assemblée ? Non. Vous réservez vos cadeaux à ceux que vous aimez le mieux. Ce « vous », vous le comprenez bien, est un collectif. Il ne désigne pas François Baroin, au demeurant homme très sympathique, mais qui est du mauvais côté de la barrière : avec ses collègues du Gouvernement, il fomente tous ces mauvais coups qui ne bénéficient qu'aux privilégiés, pendant que ceux qui vivent de leur travail triment comme des malades. Ils n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois et ils en sont à se demander comment ils vont mettre dans les petits souliers de leurs enfants les cadeaux dont ils rêvent…

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