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Intervention de Corinne Erhel

Réunion du 30 novembre 2010 à 21h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Erhel :

Le projet de loi que nous examinons vise à accorder une habilitation au Gouvernement afin qu'il puisse légiférer par voie d'ordonnance dans des domaines très variés, comme l'indique le titre même de ce texte.

Au nom du groupe socialiste, et comme l'a fait tout à l'heure M. François Brottes, je tiens à exprimer notre désaccord sur la procédure d'examen du projet de loi, qui regroupe des sujets très différents.

La Commission des affaires économiques n'est saisie que pour avis d'un sujet qui est une composante essentielle du secteur des technologies de l'information et de la communication. Nous ne pourrons que « discuter » de cette question, et non pas en « débattre » à proprement parler car, compte tenu de l'objet réel du projet de loi, le Parlement ne peut amender sur le fond la transposition, mais seulement modifier le périmètre des habilitations accordées au Gouvernement. Celui-ci nous opposera, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, l'impérieuse nécessité d'éviter que la Commission européenne n'engage contre la France un recours en manquement si notre pays ne transposait pas la directive dans les délais, soit avant le 25 mai 2011, ce qui nous exposerait à des sanctions pécuniaires. Face à l'inflation législative, nous sommes en droit de regretter que la surcharge du calendrier législatif puisse être invoquée pour justifier un recours aux ordonnances, ce dont ne peuvent se satisfaire des parlementaires, quel que soit leur bord.

La transposition par voie législative, en procédure accélérée, du « paquet télécoms », qui a été possible en 2004, ne l'est plus en 2010. Pourtant, la modification des textes européens intervenue en 2009 traite de sujets qui concernent directement nos concitoyens : il est en effet question de service universel, de traitement des données à caractère personnel et de protection de la vie privée. Notre Commission risque ainsi d'être privée de débats sur des points qui ont des échos importants, notamment sur le plan international.

Pour ce qui est de la neutralité des réseaux, il semblerait que vous souhaitiez procéder à une transposition a minima, alors même que la mission d'information, comme l'a rappelé Mme de La Raudière, montre bien que les différents acteurs ont des approches différentes de la neutralité et des apports du « paquet télécoms ». Le Gouvernement souhaitera-t-il rouvrir ce débat une fois la transposition effectuée a minima ? Il me semble que vous avez déjà répondu sur ce point. Cette question complexe touche cependant au fondement même de l'Internet, avec des implications sociétales, économiques et techniques. Un vrai débat parlementaire sur ce sujet, certes complexe, mais essentiel, serait un moment propice de discussion, car une prise de conscience s'impose.

Il semble également qu'il ait été décidé d'exclure de cette transposition les dispositions relatives à l'inclusion de l'accès Internet à haut débit dans le champ du service universel, à l'heure où le cadre de déploiement du très haut débit soulève encore de nombreuses questions.

Nous avons été nombreux, comme l'a rappelé Mme de La Raudière, à nous inquiéter des alinéas 5, 6 et 7 de l'article 11. Il semblerait en effet que vous souhaitiez légiférer par voie d'ordonnance sur des sujets touchant aux télécommunications, mais en dépassant le cadre de la transposition proprement dite des directives. Autoriser le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance « toutes dispositions de nature législative » propres à « renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques » est une habilitation très large et peut-être imprécise. Vous semblez disposé, monsieur le ministre, à améliorer cette rédaction, car vous avez déposé un amendement de précision. Néanmoins, si nous comprenons la nécessité d'assurer la sécurité des infrastructures de communications électroniques, nous ne comprenons pas pourquoi de telles mesures pourraient être prises hors des procédures législatives habituelles. Au risque de me répéter, je rappellerai que la sécurité des réseaux est un sujet crucial, mais qu'une grande prudence s'impose.

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