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Intervention de Jean-Patrick Gille

Réunion du 15 novembre 2010 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Patrick Gille :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, le budget de l'emploi repose, d'une part, sur une présentation trompeuse des crédits et, d'autre part, sur une vision exagérément optimiste des chiffres de l'emploi.

Le Gouvernement n'a de cesse de prétendre que les crédits du budget de l'emploi sont maintenus, voire augmentés. Or, ils subissent en réalité une diminution en crédits de paiement de 13 %. Car, pour comparer les deux exercices, il convient de rappeler que l'an passé le budget était abondé à hauteur de 1,8 milliard d'euros par les crédits du plan de relance et du plan d'urgence pour la jeunesse, qui ont cette année disparu. En outre, sur trois ans, c'est une baisse de plus de 3,5 milliards qui est annoncée !

Vous faites comme si la crise n'avait été qu'une parenthèse déjà refermée. Pourtant, les chiffres sont éloquents, notamment en ce qui concerne le chômage de longue durée, qui a crû de 25 % en un an et de 72 % en deux ans pour les jeunes. En fait de reprise de l'emploi, il s'agit simplement d'un ralentissement de la progression, largement dû à l'utilisation massive depuis quelque mois des contrats aidés, marchands et non marchands ; à tel point que leur utilisation est désormais fortement freinée et que le taux d'aide est revenu au niveau d'avant la crise. Cette fermeture brutale et anticipée du robinet va se traduire l'année prochaine par une baisse de 200 000 entrées en contrat aidé.

Cette politique de stop and go, dénoncée par tous, a des conséquences désastreuses sur les publics ciblés, et les associations, en particulier celles du secteur de l'insertion par l'économie, en font déjà les frais.

Le Gouvernement précédent a laissé une bombe à retardement, d'autant plus qu'il a aussi amorcé un désengagement de l'État dans le service public de l'emploi.

La mobilisation du 9 novembre dernier des salariés de Pôle emploi illustre le désarroi dans lequel ils sont plongés. Les moyens financiers prévus lors de la fusion en 2008 ne sont mystérieusement toujours pas mobilisés – 187 millions d'euros n'ont pas été versés par l'État ; manquent en outre 52 millions d'euros, dus au titre de l'accueil de 900 psychologues de l'AFPA. La situation est telle que le conseil d'administration n'a pas voté l'exécution du budget !

Si Pôle emploi est doté de la même enveloppe en 2011, on sait d'ores et déjà qu'il ne bénéficiera ni des frais de gestion de l'ASS, de l'AER et de l'AFDEF, ni du remboursement de la rémunération des psychologues de l'AFPA. On sait surtout, malgré les déclarations du ministre devant notre commission, qu'il perdra 1 800 emplois, au moment où les portefeuilles des conseillers explosent. On est bien loin du suivi personnalisé qui était prévu au moment de la fusion. C'est pourquoi le groupe socialiste demande une mission d'information sur Pôle emploi

Parlons également du lâche abandon de l'AFPA. Le transfert des psychologues de l'AFPA à Pôle emploi est un échec, car il engendre une crise du recrutement des stagiaires. Quant au transfert du patrimoine, il est, comme nous l'avions indiqué, bloqué par la Commission européenne, et le Conseil d'État, saisi par la région Centre, en demande l'examen par le Conseil constitutionnel. Enfin, 10 millions seulement sont prévus pour l'entretenir alors qu'il en faudrait 80 par an, soit un différentiel qui correspond à la disparition probable de 1 000 emplois à l'AFPA.

Un mot enfin du désengagement sur les politiques en direction des jeunes et des seniors. Derrière vos grands discours en faveur de ces catégories érigées au rang de publics prioritaires, il s'avère que les crédits ne sont pas à la hauteur des enjeux. Seulement 50 millions d'euros seront consacrés au nouveau dispositif d'aide à l'embauche des seniors créé par la loi sur la réforme des retraites.

Quant aux jeunes, les crédits les concernant n'ont pas évolué, et les 120 millions d'euros de crédits du plan « Agir pour la jeunesse » ont purement et simplement disparu. Cela se traduira très concrètement par le départ des 1 000 conseillers venus renforcer les missions locales. Si on y ajoute la disparition des 95 000 CIE jeunes et des 100 000 CAE jeunes, on comprend pourquoi le Gouvernement renvoie désormais la question de l'emploi des jeunes aux partenaires sociaux. Il a d'ailleurs d'ores et déjà décidé de piocher sans vergogne dans les fonds paritaires pour financer ses propres politiques au détriment des missions pour lesquels ils ont été créés : ponction illégale de 300 millions d'euros sur le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels ; renvoi à la renégociation de la convention UNEDIC du financement des nouvelles entrées dans les dispositifs d'allocation équivalent retraite, du CTP et pourquoi pas, demain, de l'ASS ; substitution de l'AGEFIPH à l'État comme contractant de l'AFPA pour le marché des demandeurs d'emploi reconnus travailleurs handicapés, soit 70 millions d'euros.

Ce budget, vous l'avez compris, se caractérise par des baisses considérables des actions en faveur des publics les plus fragiles et par un désengagement de l'État du financement des opérateurs du service public de l'emploi, alors que la suppression de l'exonération et de la défiscalisation des heures supplémentaires, dont le coût avoisine les 4 milliards d'euros, permettrait de construire une véritable politique de reprise de l'emploi et du travail pour tous. C'est pourquoi le groupe SRC votera contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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