Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais commencer mon propos, au risque de vous surprendre un peu, par une citation d'Edgard Pisani. Dans la Revue française de sciences politiques, celui-ci a écrit qu'« aménager le territoire c'est prendre conscience de l'espace français comme richesse et comme devoir ».
Au vu du budget concocté par M. Mercier, le ministre en charge de ce domaine dans le gouvernement précédent, il apparaît que ce gouvernement n'a pas tout à fait conscience de ce que représente cette richesse, cet écrin français. En effet, comme souvent – et ce projet de loi de finances n'échappe pas à la règle – toute une série d'objectifs plus ambitieux les uns que les autres sont affichés. Mais, comme toujours, les crédits ne suivent guère.
Comme j'imagine, monsieur Baroin, que vous n'avez pas eu le temps de vous plonger en détail dans ce budget, je vais essayer, dans les quatre minutes qu'il me reste, de vous en livrer une lecture un peu synthétique.
Deux programmes y sont référencés, mais le second est trop spécifique pour que je m'y attarde vraiment. Je me consacrerai donc au premier, le programme 112, celui qui a trait aux politiques d'aménagement du territoire.
Parlons chiffres. Le programme 112 subit dans sa globalité une diminution des crédits d'un peu plus de 10 %.
Il consacre d'abord la DATAR comme coquille vide. J'ai noté que le budget qui correspond à son activité fléchit de près de 24 %. C'est ce qu'il ressort de l'action 01 de ce programme, qui pourtant couvre une bonne partie du champ d'action de la DATAR.
Il consacre ensuite l'agonie des grandes politiques d'aménagement du territoire et la mort pure et simple de la valorisation du patrimoine. L'action 02 représente en effet le coeur de ce projet de loi de finances. Or ce coeur semble battre de plus en plus difficilement. Son budget inscrit fièrement une hausse de 0,6 %. Cependant, il ne couvre pas l'inflation prévue de 1,5 %. Concrètement, nous pouvons parler de décote.
Il consacre enfin, ici comme ailleurs, la RGPP. Les personnels vont subir une coupe budgétaire. La masse salariale ne représente ici que 3,5 % d'une action qui ne pèse elle-même que 8 % dans le programme. C'est, là encore, une réduction.
Le problème, c'est que la politique de rigueur de ce gouvernement ne peut même pas se vanter d'être rationnelle. Bien au contraire ! Non seulement elle se fait au détriment des besoins et de l'intérêt des Français – ces derniers commencent à en avoir l'habitude –, mais elle produit également parfois des effets inverses à ce qui est escompté.
Je prendrai un tout petit exemple, mais qui en dit long sur ces contradictions que je viens de signaler. Et pour une fois, ce ne sera pas ma ville de Saint-Denis mais, sans doute à cause de mes origines bretonnes, le Mont-Saint-Michel, sans vouloir relancer la polémique sur la territorialisation de ce site.
Sur ce projet de réaménagement, le Gouvernement nous dit : « Il faut restaurer le caractère maritime du site afin de préserver son identité et son attractivité touristique ». Soit ! Mais pourquoi alors – si ce n'est faire plaisir à une entreprise privée – consentir à augmenter de cinq à huit euros le prix d'un parking qui sera un kilomètre plus loin du site qu'auparavant ? Tous les professionnels du tourisme s'accordent à dire que, face à un monument – si exceptionnel soit-il – dont l'accès est plus compliqué et plus cher, une diminution des fréquentations est à craindre. Est-ce cela la valorisation du patrimoine ?
Ce projet de loi de finances peut néanmoins se féliciter d'une certaine cohérence. Il dévoile en effet une stratégie très en phase avec la politique gouvernementale. Au-delà de cet exemple de cadeau sans contrepartie à une entreprise privée, qui n'en demandait pas tant, jamais il ne fait référence aux inégalités sociales. Jamais il ne rentre dans le concret des différences territoriales. Et surtout, à aucun moment, il ne place les Français au centre de sa réflexion.
Où sont donc les crédits pour des hôpitaux en zones rurales ?