« Quelle est la première partie de la politique ? L'éducation. La seconde ? L'éducation. Et la troisième ? L'éducation. » Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en empêchant la discussion en séance publique des crédits de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur, respectivement premier et troisième postes budgétaires de la nation, pour les reléguer à la confidentialité de simples commissions élargies, la majorité a démontré qu'elle était loin de faire sienne cette formule de Jules Michelet.
Ce mépris pour l'avenir de notre jeunesse se retrouve aussi au coeur du budget envisagé par le Gouvernement pour l'école, si ce n'est contre l'école. Si l'on exclut le coût des pensions, la hausse affichée de 1,6 % des crédits de paiement, comparée à la prévision d'inflation de 1,5 % pour 2011, correspond en réalité à une régression.
M. le ministre de l'éducation nationale a encore battu des records en matière de suppressions de postes : 16 120 équivalents temps plein, soit 65 520 suppressions de postes depuis 2007, tout en n'assumant pas totalement ses responsabilités puisqu'il laissera aux recteurs la basse besogne, autrement dit le soin d'identifier les leviers d'efficience, terme synonyme de rendement, que l'on doit avoir l'habitude d'utiliser chez L'Oréal mais qui est assez éloigné de la plupart des objectifs assignés à la formation scolaire par le code de l'éducation : favoriser l'épanouissement de l'enfant, lui permettre d'acquérir une culture, le préparer à l'exercice de ses responsabilités de citoyen.
Contrairement aux promesses renouvelées, et ainsi que la Cour des comptes l'a révélé, il a été redistribué aux personnels non pas la moitié des 396 millions d'économies réalisées en 2009 mais seulement 35 %. Ces personnels peuvent abandonner tout espoir de hausse du point d'indice, puisque le Gouvernement a annoncé un gel pour trois ans, et ils attendent encore la concrétisation des promesses présidentielles sur la réduction de la précarité.
Les conséquences des 8 967 suppressions de postes dans le premier degré seront lourdes, en particulier dans les zones rurales, pour la scolarisation des petits, les RASED et l'éducation prioritaire, alors que la Cour des comptes s'est indignée de l'écart croissant entre les meilleurs élèves et ceux qui sont en difficulté. Ces derniers seront sans doute aussi les premiers à souffrir de la nouvelle baisse de 10,8 % des crédits pédagogiques.
La formation des enseignants perd plus de 42 % de ses crédits, dans des conditions inimaginables puisque, dans un tiers des écoles, les directeurs ne disposeraient pas de décharge horaire, et que les enfants ont été confiés à temps plein à des stagiaires, dont certains n'avaient jamais reçu la moindre formation d'enseignant.
Pour répondre à la diminution du taux de remplacement qui continue, votre seule ambition est la création d'un vivier constitué de retraités ou d'étudiants.
Le second degré attend 48 500 élèves en plus mais vous supprimez 4 800 postes, en priorité dans les collèges et les lycées professionnels, faisant ainsi le choix d'aggraver les tensions déjà très fortes mais qui sont le prétexte à vos expérimentations, lesquelles nous inquiètent fortement car elles ressemblent à de véritables régressions : dépistage précoce de la délinquance, établissements de réinsertion, équipes mobiles de sécurité et autres cours de sport l'après-midi assurés par des prestataires extérieurs. Dans le même temps, vous diminuez encore de près de 4 % le programme « Vie de l'élève » qui permet, par exemple, le recrutement des conseillers d'éducation.
La majorité semble découvrir cette année la situation catastrophique de la médecine scolaire, alors que nous l'alertons systématiquement sur la baisse de la part des élèves bénéficiant du bilan de santé à six ans – 73 % en 2005 contre 66 % seulement en 2009 – et que c'est elle qui a supprimé 20 % de ces crédits lors du premier budget de la législature. Peut-être fera-t-elle de même dans trois ans avec l'apprentissage, dont elle va voter aujourd'hui la diminution du budget.
La casse du service public d'éducation menée par le Gouvernement est à l'exact opposé du projet de transformation progressiste de l'école que nous proposons de bâtir avec tous ceux qui sont engagés dans l'action syndicale et pédagogique, dans les organisations de jeunesse, de parents d'élèves, de professeurs, et avec tous les citoyens préoccupés des scolarités et de la formation permanente ; un projet qui part du postulat que les richesses existent afin de financer le système éducatif et de transformer l'école pour permettre la lutte contre les inégalités et la réussite de tous les enfants.
C'est pourquoi les députés communistes, citoyens, républicains et du Parti de gauche ainsi que l'ensemble du groupe GDR voteront résolument contre ce projet de budget, qui, loin de s'attaquer à l'ambition de la réussite pour tous, continuera à creuser les injustices. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)