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Intervention de Marie-Hélène Amiable

Réunion du 15 novembre 2010 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Hélène Amiable :

L'aide publique au développement est un pilier essentiel de notre politique extérieure. Alors que 133 millions d'êtres humains ont basculé dans l'extrême pauvreté depuis le début de la crise et que les inégalités entre les pays et à l'intérieur des sociétés explosent, l'aide publique traduit notre volonté d'un monde de paix, de solidarité et, avant tout, de justice. Or, il est difficile de trouver une trace affirmée de cette volonté dans la loi de finances pour 2011, comme l'a souligné mon collègue François Asensi en commission.

Le Président de la République a annoncé, l'an passé, que l'aide publique au développement ne servirait pas de variable d'ajustement face à la crise. Cet engagement a été jeté aux oubliettes devant les contraintes de réduction des déficits.

La France se targue d'être le premier contributeur européen à l'aide publique en volume, avec 8 milliards d'euros, mais son effort au regard du PIB est bien inférieur à celui de nos partenaires. Ce pourcentage – environ 0,46 % de la richesse nationale – stagne depuis maintenant quatre ans. La France reporte sans cesse aux calendes grecques l'engagement des 0,7 % du PIB pour l'aide au développement, engagement pourtant pris devant les Nations unies et que respectent nos voisins suédois, belges et hollandais.

Dans le budget qui nous a été présenté, la mission « Aide publique au développement » enregistre une baisse sensible des crédits de paiement de ses trois programmes, de l'ordre de 176 millions d'euros, selon le document de politique transversale. Le programme « Solidarité à l'égard de pays en développement », coeur de notre aide, enregistre la plus forte baisse, avec moins 7 %. Alors que nous aurions la possibilité de contribuer à faire reculer la pandémie du sida, les moyens alloués au Fonds mondial restent faibles. Les maigres crédits de développement solidaire – 30 millions d'euros – démontrent que le développement des pays d'origine des migrants n'est clairement pas la priorité du Gouvernement et de sa politique migratoire répressive.

La hausse optique des autorisations d'engagement du programme « Aide économique » en 2011, en raison du traitement de la dette et des contributions aux banques multilatérales, ne masquera pas éternellement le relâchement de l'effort français. Les prévisions du document de politique transversale envisagent, ainsi, une chute de 1 milliard de notre aide en 2013. Cette chute vertigineuse nous placerait au ban de la communauté internationale. De plus, la sincérité budgétaire n'est toujours pas de mise dans la loi de finances pour 2011, comme vient de le rappeler M. Janquin.

Les annulations de dettes, généralement étrangères à l'APD, gonflent de 15 % notre effort, alors que ces dettes résultent parfois d'achats d'armement ou de créances illégitimes contractées par des dictateurs corrompus et sont depuis longtemps remboursées par les pays pauvres.

De la même manière, il est inacceptable que l'accueil des demandeurs d'asile en France, les opérations de maintien de la paix ou encore l'aide aux départements d'outre-mer continuent à figurer dans nos statistiques. Notre aide réelle au développement ne dépasse donc guère un désolant 0,3 % de notre PIB.

Les orientations stratégiques sont, elles aussi, en cause.

La part des dons régresse d'année en année, alors que les prêts ont bondi à 3,1 milliards en 2010. Délivrés par l'Agence française de développement en fonction de critères largement financiers, ces prêts permettent à la France d'engranger des bénéfices sur le dos des populations des pays pauvres, dans l'indécence la plus complète. Ces prêts s'orientent désormais vers les pays émergents et n'aident plus les pays les moins avancés. Comment justifier ainsi que la Chine soit le deuxième bénéficiaire de nos prêts ?

Autre indécence : une grande partie de nos prêts bilatéraux est conditionnée à la passation de marchés avec des entreprises françaises et financent in fine notre propre croissance. Il faut mettre fin à ce néocolonialisme économique et favoriser un développement réellement endogène. Comment parler de solidarité des États les plus riches ?

L'aide au développement atteint difficilement 100 milliards par an, soit deux fois moins que les transferts des migrants à leurs familles restées au pays et quatre fois moins que le service de la dette acquitté chaque année par les pays en développement auprès des riches prêteurs des pays industrialisés.

En définitive, l'aide n'est pas du côté que l'on croit. Pour garder le cap des objectifs du millénaire du développement et leur but de réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2015, nous devons mettre fin à la politique du laisser-faire des institutions internationales, FMI et OMC en tête. Il convient de dégager au plus vite des sources de financement autonomes et additionnelles, telles que la taxation des transactions financières.

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