Monsieur le président, monsieur le ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, dans le cadre d'un budget général établi sur la norme « zéro valeur hors dette et pensions », le projet de budget de la mission « Culture » – qui ne progressera que de 1,1 % en crédits de paiement – prend sa part dans la réduction des dépenses de l'État Cette évolution intègre la progression de 1,9 % des dépenses de personnel. Hors dépenses de personnel, les crédits de la mission progressent de 0,8 %.
Les crédits budgétaires demandés pour la mission « Culture » sont de 2,67 milliards d'euros en crédits de paiement.
La légère progression profite essentiellement aux patrimoines, prolongeant l'effort de rattrapage entrepris depuis 2009. Les crédits destinés à la création accompagneront les nouveaux investissements, en cours ou en projet. Par contre les crédits de la transmission des savoirs seront en légère baisse. Ils avaient néanmoins connu une augmentation assez importante dans le budget pour 2010.
La mission participe à l'effort de réduction des emplois publics, avec 364 équivalents temps plein supprimés, un effort plus important que celui accompli l'année dernière.
La règle du non-remplacement d'un départ en retraite sur deux est observée partout, sauf pour les emplois d'enseignants des établissements d'enseignement supérieur. Elle se traduit, pour le ministère, par la suppression de 93 équivalents temps plein.
Les Entretiens de Valois, qui se sont déroulés en 2008 et 2009, ont eu cette année des prolongements, ce dont je me félicite. Des conférences dans les régions ont continué à réunir les financeurs – État et collectivités – et les représentants des structures du spectacle vivant.
Le ministère a entrepris et mené à bien la réécriture des cahiers des charges des dix labels soutenus par l'État et des réseaux, afin de renouveler et préciser les critères de soutien et d'évaluation pour chacun. Il s'agit de critères artistiques, culturels, économiques et administratifs. Chaque établissement disposera d'objectifs précis, notamment en matière de création, de diffusion, de rencontre avec le public.
Je tiens à saluer cette rénovation très importante des modalités d'intervention de l'État, que la Cour des comptes et la commission des finances de l'Assemblée avaient appelée de leurs voeux. Il est en outre important, comme le ministère l'a entrepris, de définir maintenant, région par région, une programmation sur trois ans des concours financiers de chacun, afin que les structures aient une visibilité quant aux moyens dont elles disposeront.
Le ministère s'attache à présent à susciter la coordination entre les structures géographiquement proches, théâtres en particulier, pour qu'elles coordonnent leur programmation. Il faut en effet que nos théâtres, nos maisons d'opéra, parviennent à élaborer des projets communs, à diffuser bien davantage leurs productions, afin que les spectacles gagnent un public plus large et, partant, une meilleure rentabilité. Nous avons encore beaucoup à faire dans cette direction.
En même temps, les structures subventionnées ont tout intérêt à mettre en commun des moyens administratifs, commerciaux, de communication, pour dégager des marges de manoeuvre financières et être plus efficaces.
Les crédits demandés pour le programme « Création » s'élèvent, avant transferts, à 753 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une hausse de 4,2 %, et à 736 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 1,8 %.
Le projet de budget prévoit des crédits déconcentrés de fonctionnement et d'intervention tout juste en reconduction. C'est selon moi la question la plus délicate de ce budget.
La création de nouvelles structures reste d'actualité. Ainsi, dix salles de musique actuelle sont en construction. La carte de nos équipements culturels continue à se densifier, ce qui est évidemment très demandé par les collectivités, mais j'attire l'attention, monsieur le ministre, sur le fait qu'on risque d'aboutir à une situation de déséquilibre et de frustration. L'équipement en salles et lieux sera abondant, mais on ne disposera pas de crédits suffisants pour soutenir les troupes artistiques ou les projets. C'est le risque que nous courons pour l'avenir.
La même réflexion peut être faite à propos de l'officialisation de l'existence de deux nouveaux labels : les centres nationaux des arts de la rue et les pôles nationaux pour les arts du cirque. Cette reconnaissance est évidemment légitime, car ces deux formes d'expression sont éminemment dynamiques et innovantes, mais elles élargissent le champ des structures qui feront l'objet d'un financement récurrent. Cette évolution suscitera la candidature au label de nouvelles compagnies et l'aide de l'État devra se disperser entre de nombreuses compagnies, car il est difficile de cesser le soutien à une structure bénéficiant d'un label.
Cette question est d'autant plus cruciale que la programmation triennale des finances publiques confirme la stabilisation des crédits. Tant le ministère que les collectivités devront donc rechercher un nouvel équilibre entre équipement, fonctionnement et intervention.
L'effort d'investissement est renforcé pour le programme « Création ».
Des travaux importants seront financés à l'Opéra comique, au Théâtre de Chaillot, au Centre national de la danse.
Le projet de Philharmonie de Paris a été entrepris, mais il est arrêté dans l'attente du plan de financement de l'État. Les travaux exigent l'ouverture d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement importants en 2011, mais les crédits ne sont pas prévus dans ce budget.
Pour les arts plastiques, l'investissement majeur sera l'aménagement du Palais de Tokyo, qui mobilisera 14 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 13 millions de crédits de paiement.
Les crédits d'investissement déconcentrés iront à la construction de nouveaux fonds régionaux d'art contemporain, à la modernisation de scènes nationales et à la construction de scènes de musique actuelle.
Le fait que les projets majeurs d'investissement soient concentrés dans la capitale – il y a peu d'exceptions, le théâtre de Strasbourg notamment – peut susciter des incompréhensions de la part des acteurs culturels des régions.
Au terme des projets déjà lancés, comme la Philharmonie de Paris ou le Palais de Tokyo, il conviendra d'ouvrir une réflexion sur l'équilibre qui doit être trouvé entre Paris et la province, pour ce qui est des investissements comme du fonctionnement. Je rappelle que les subventions pour charges de service public représentent 43 % des crédits de l'action 1 du programme, et qu'elles vont presque intégralement à des institutions parisiennes.
La réflexion en termes de pôles régionaux devrait être, à l'avenir, beaucoup plus prégnante qu'aujourd'hui. Le domaine des arts plastiques semble, quant à lui, avoir établi un bon équilibre entre centre et régions, et ce grâce aux crédits déconcentrés, qui profitent largement aux FRAC.
Les crédits prévus pour le programme « Transmission des savoirs » s'élèvent à 489 millions d'euros en autorisations d'engagement et 450 millions d'euros en crédit de paiement, en hausse respectivement de 6 % et de 1 %.
Le ministère a conçu un dispositif, « Culture pour chacun », qui comporte des actions d'éducation artistique et culturelle et un soutien renforcé à l'enseignement supérieur. L'initiative est bonne. Elle devra, à mon sens, comporter des expérimentations afin que l'on trouve les bons leviers d'action en cette période de restrictions de crédits.
L'enseignement supérieur bénéficie d'une augmentation de 3 % des crédits pour continuer l'intégration dans le schéma licence-master-doctorat et les investissements indispensables dans les écoles.
Les fonctions supports du ministère sont à présent toutes inscrites dans l'action 7 de ce programme : les crédits sont en forte diminution – 6 % –, selon un principe applicable à toutes les administrations.
Je souligne la volonté et l'habileté dont font preuve les services du ministre de la culture et de la communication. Ils conduisent en effet des investissements ambitieux au plan national, procèdent à une refondation essentielle du soutien de l'État au spectacle vivant, conduisent une rénovation progressive des écoles d'architecture et l'adaptation des écoles au schéma européen LMD. Tout cela dans un contexte de rareté de la ressource humaine et budgétaire.
En effet, les effectifs de l'administration centrale ont diminué de 20 % en quelques années seulement : 1'ampleur des réformes et des réorganisations en cours aurait justifié des ressources humaines plus importantes. Le ministère mène cependant avec détermination l'ensemble des chantiers, dont on a compris qu'ils ne sont pas uniquement architecturaux.
Je veux aborder rapidement deux dossiers sur lesquels je me suis penché cette année et qui doivent à mon sens trouver une conclusion rapide.
Ces dossiers n'ont que peu ou pas d'enjeux financiers pour l'État, mais concernent des procédures intervenant dans la vie quotidienne des acteurs du spectacle vivant, et pour lesquelles l'administration connaît un certain nombre de dysfonctionnements.
Les structures culturelles associatives ont, pour un certain nombre d'entre elles, connu une situation difficile à la suite de revirements d'interprétation des services fiscaux, concernant en particulier les modalités de taxation des subventions.
À l'initiative de la direction de la législation fiscale, les services fiscaux demandent aux associations de prévoir dans quelle mesure la subvention à recevoir sera ou non une subvention « complément de prix » soumise à la TVA ou une subvention de fonctionnement soumise à la taxe sur les salaires, sur la base d'une anticipation des rentrées financières attendues de la vente de billets ou de spectacles. Le problème, c'est qu'il y a une vérification a posteriori, qui peut bien sûr entraîner des redressements.
J'ai reçu du ministère l'assurance qu'une solution serait trouvée par les deux administrations, avec un système de déclaration et de taxation praticable pour les structures, surtout les petites. Je rappelle donc au Gouvernement son engagement de trouver un règlement de la situation actuelle, extrêmement confuse, difficile à gérer pour les associations et incertaine pour les collectivités territoriales qui les soutiennent.
J'avais souligné la nécessité de procéder à une réforme du régime actuel des congés payés du secteur du spectacle, avec la suppression de la Caisse des congés spectacles, dont la Cour des comptes avait d'ailleurs sévèrement critiqué la gestion.
Les administrations – travail et culture – ont souhaité maintenir la mutualisation des congés, mais avec un transfert de leur gestion au groupe de protection sociale Audiens.
Pour le moment, il semble que la personne morale Caisse des congés spectacles serait maintenue, avec une modification de ses statuts.
Je ne suis pas encore convaincu par cette demi-réforme, car une bonne réforme doit permettre à la fois un versement rapide et sûr des congés ; une baisse des coûts de gestion et donc une baisse des taux de cotisation, actuellement fixés à 14,3 % pour un versement au salarié de 10 % ; un allégement, enfin, des procédures déclaratives.