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Intervention de Gilbert Le Bris

Réunion du 4 novembre 2010 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Défense

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilbert Le Bris :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la défense est, comme d'autres, confronté à une impasse budgétaire qui conduit à faire des choix. Parmi ceux-ci, il en est un qui m'apparaît dommageable pour notre pays : la restriction progressive de la marine nationale à son seul rôle d'armée de mer.

De livre blanc en plan bleu, de loi de programmation en RGPP, de loi de finances en contrats opérationnels, le format de la marine est abaissé : réduction du nombre de bateaux, concentration sur ce qui est considéré comme son coeur de métier, à savoir la préparation de la guerre. Or nous espérons échapper à la confrontation armée. Certes, il faut tenir les équipements prêts. Mais il ne faut pas perdre de vue que les missions civiles s'imposeront à nous à coup sûr.

Prenons un exemple. Il revient à la marine nationale d'assurer notre souveraineté étatique sur l'espace maritime de notre pays, qui est le deuxième au monde par sa taille. Or ce budget pour 2011 ne prévoit ni commandes ni livraisons pour nos forces de souveraineté.

L'arrestation fort heureusement réussie des preneurs d'otages du Ponant en 2008 s'est faite avec des bateaux gris de vingt-sept ans d'âge en moyenne et des hélicoptères qui, pour moitié, étaient d'une génération remontant à un demi-siècle.

Trois jours après le séisme du 12 janvier 2010 à Haïti, le BATRAL Francis Garnier appareillait depuis Fort-de-France. Celui-ci est aujourd'hui désarmé et les trois BATRAL restant doivent subir le même sort d'ici à 2014. Mais peut-être prolongera-t-on leur durée de vie jusqu'en 2020 afin d'attendre la construction des unités du programme BIS.

La rupture capacitaire est toutefois bien là. L'Audacieuse, La Boudeuse, La Glorieuse de la classe des P400 sont désarmés : la marine y perd non seulement des noms poétiques mais aussi des moyens d'intervention car le jeu des chaises musicales consistant à envoyer des navires de métropole vers l'outre-mer ne pourra durer jusqu'à la mise en place du programme de remplacement BATSIMAR prévu entre 2018 et 2025.

Plus de BATRAL, plus de patrouilleurs P400 – les neuf bâtiments en service doivent être retirés du service actif d'ici à 2016 –, plus de patrouilleurs du service public : ce ne sont pas seulement les bateaux qui seront désarmés, mais les moyens de la France !

Devant notre commission, le chef d'état-major des armées a indiqué que le nouveau schéma de l'outre-mer engendrera une réduction de 23 % des effectifs des forces de souveraineté d'ici à 2020. Où est la logique dans tout cela alors que la France veut placer 20 % de ses eaux sous souveraineté sous le statut d'aires marines protéges faute de pouvoir assurer la défense de ces espaces ? N'oublions pas qu'en mer, le droit ne renvoie pas seulement à la possession, mais surtout à la capacité d'agir.

Dans ces conditions, comment défendre nos droits souverains acquis depuis que la convention de Montego Bay a consacré, en 1982, la patrimonialisation des ressources maritimes ?

Sous prétexte de réorganisation et de redistribution des moyens, c'est une lourde diminution de nos capacités d'agir, de notre possibilité de montrer pavillon, qui se profile, en contradiction totale avec les objectifs affichés par le Président de la République dans son discours du Havre de 2009 où il insistait sur l'importance géostratégique de la mer.

Il faut réagir pour éviter de perdre, sur notre territoire maritime, notre statut de « grande puissance moyenne » dont parlait le président Giscard d'Estaing.

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