Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget « Soutien et logistique interarmées » est, chaque année, l'occasion d'étudier la mutation du ministère de la défense. Le plus éclairant me semble donc de suivre l'évolution des principaux dossiers couverts par cet avis budgétaire : les cessions immobilières, le projet de Balard, l'évolution des systèmes d'information, la création des bases de défense, mais aussi la situation de services interarmées plus anciens, tels que le service de santé des armées ou le service des essences des armées. Enfin, je conclurai en quelques mots au sujet de nos engagements extérieurs.
En ce qui concerne la politique immobilière, je constate que, en 2010, le Gouvernement a, une nouvelle fois, construit un projet de budget sur des prévisions de ventes immobilières excessivement optimistes. En deux années, alors que près de 1,4 milliard d'euros ont été annoncés, seulement 170 millions d'euros de cessions ont été réalisés, auxquels s'est opportunément ajoutée la soulte de la société nationale immobilière, ce qui nous laisse bien en deçà des 500 millions d'euros. Pour 2011, les projections semblent moins hasardeuses, mais je constate qu'un gain de près d'un milliard d'euros est attendu pour les trois prochaines années. Or les épisodes survenus précédemment posent clairement le problème de la confiance que l'on peut avoir dans ces prévisions, voire dans leur sincérité.
À cet égard, monsieur le ministre, pourriez-vous clarifier les perspectives de cession de l'usufruit de l'hôtel de la marine ? On a entendu évoquer toutes sortes de projets, parfois peu en phase avec la dimension historique et culturelle du bâtiment. La quête de revenus fonciers ne justifie pas, en effet, que l'on méprise le patrimoine. Le critère financier ne doit pas être le seul retenu : il importe de considérer à la fois l'intérêt national, l'intérêt culturel et l'intérêt patrimonial. Je souhaite donc que la commission de la défense et des forces armées soit tenue précisément informée de l'évolution de l'appel à projet et de la nature des candidatures concernant l'hôtel de la marine.
J'en viens maintenant au projet de Balard, qui doit regrouper les sites parisiens du ministère de la défense sur un site unique à l'horizon 2014. Pour des raisons budgétaires, le Gouvernement a retenu un mode de financement s'appuyant sur un partenariat public-privé. Même si le projet est construit de façon intéressante, l'État contracte une dette implicite auprès de partenaires privés de près de 900 millions d'euros sur trente ans.
Autre grand chantier : les systèmes d'information et de communication. Cette année a vu la mise en place du logiciel Chorus. Il sera commun à tous les ministères et celui de la défense a été désigné pilote pour le mettre en oeuvre. Le ministère a relevé le défi, mais avec des retards de paiement massifs au détriment de bon nombre de PME. On sait maintenant qu'il faudra débourser plusieurs dizaines de millions d'euros d'intérêts moratoires ; on parle de 30 millions d'euros pour la seule année 2010. À mon sens, il serait normal de faire jouer la solidarité interministérielle, le ministère de la défense ayant assumé un rôle d'éclaireur utile à tous. Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, dans quelle mesure le Gouvernement a prévu de se montrer solidaire de votre ministère pour prendre en charge ces intérêts moratoires ?
Le point suivant concerne le rapprochement interarmées.
Les bases de défense doivent se généraliser le 1er janvier prochain, alors même que nous ne disposons toujours pas d'évaluations précises des économies qu'elles ont permises, ni même d'indicateurs pour étudier les expériences en cours.
Tout cela donne le sentiment d'une réforme conduite à l'intuition et j'observe que ce processus inquiète les armées. Si le montage intellectuel de la masse des dépenses peut se concevoir, s'apprécier, voire être partagé, les critères d'évaluation de la réussite – ou la non-réussite – d'un certain nombre d'expériences sont quasiment inconnus.
Lorsqu'on interroge les personnes en charge de ce dossier, il apparaît que, si elles sont incapables de fournir une évaluation précise sur le plan financier et sur celui de la gestion des moyens, elles ont en revanche le souci – et c'est bien normal – de faire en sorte que l'opérationnel puisse être aussi bien géré que par le passé. Cela engendre parfois de petites difficultés. On sent bien que, s'il n'y a pas d'opposition à la mutualisation des moyens, chacun semble se soucier d'une dégradation des moyens affectés au soutien, notamment à l'entretien des bases, dont beaucoup pensent qu'elles serviront de variables d'ajustement. Pourriez-vous nous rassurer sur ce point ?
Les services interarmées que sont le service des essences et le service de santé des armées ont, eux aussi, connu une année riche. Je note avec satisfaction que la politique d'achat de produits pétroliers pourrait enfin s'assouplir, ainsi que nous le recommandons depuis plusieurs années.
Pour ce qui concerne le SSA, l'année 2010 a vu la Cour des comptes produire un rapport relativement critique sur le coût de fonctionnement de ses hôpitaux militaires, même s'il était élogieux pour le reste. Au fond, ce rapport met en lumière l'inadaptation de la T2A à l'activité hospitalière militaire.