Je souhaite, madame la ministre, poursuivre une conversation que nous avions eue, il y a un an, au moment de la loi pénitentiaire. Je m'étais alors étonné – et vous m'aviez dit partager mon étonnement – des prix de location de téléviseurs pouvant varier de 6 à 41 euros selon les établissements pénitentiaires. Vous m'aviez d'ailleurs indiqué que vous ne compreniez pas un tel écart et que vous demanderiez une étude. J'imagine que ses conclusions vous ont amené à dire qu'il fallait harmoniser les coûts de locations. Après avoir évoqué une somme de 18 euros, vous avez parlé de 8 euros cette semaine. C'est un pas en avant – comme le fut la décision du précédent directeur de l'administration pénitentiaire de permettre aux détenus condamnés à de longues peines de pouvoir acheter un poste de télévision, ce qui était interdit jusque-là. Cette interdiction était pour le moins bizarre car, au prix de location du poste de télévision, ils auraient pu en acheter plusieurs !
J'appelle l'attention de nos collègues sur le fait que la télévision, aux dires mêmes de l'administration pénitentiaire, et ceux de nos collègues qui s'occupent de ces sujets le savent, est un élément important pour l'équilibre du détenu.
En proposant d'harmoniser à 8 euros, madame la ministre d'État, vous avez fait un premier pas. Cela étant, cela ne répond pas aux critiques de la Cour des comptes. Dans son rapport du 6 juillet 2010, la Cour s'est interrogée sur l'usage des sommes payées par l'ensemble des détenus pour la location de téléviseurs. Il faut savoir que cet argent n'est pas versé à l'administration, mais à des associations culturelles et sportives, propres à chaque structure et très souvent gérées par les personnels de la détention. Personne ne sait ce que devient cet argent et la Cour des comptes s'en est étonnée. À la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, l'association en question a ainsi déposé près de 600 000 euros à la banque, ce qui a pour le moins surpris, y compris dans la presse locale…
Je vous propose de faire un pas en avant supplémentaire, à l'instar de l'un de vos prédécesseurs qui, le 20 octobre 2006, avait annoncé la gratuité de l'accès à la télévision. Déjà, en 1985, Robert Badinter s'était battu pour faire entrer les appareils de télévision dans les cellules afin de briser, disait-il, « l'ennui carcéral qui commence au moment de la fermeture des portes à dix-neuf heures. »
Il y a deux ans dans cet hémicycle, nous avions déjà débattu de la question de la gratuité. Un amendement – retiré à la demande du Gouvernement – proposait d'exonérer les associations propriétaires de ces postes de télévision de la redevance audiovisuelle. Une instruction fiscale du 10 juillet 2009 prise à la demande du médiateur a décidé que les associations étaient exonérées.
À partir du moment où les associations sont exonérées du paiement de la redevance, pourquoi l'imposer aux détenus alors que TNT va permettre aux Français de bénéficier de la gratuité ; il n'y aura pas besoin de payer un abonnement à Canal Plus ou à je ne sais quel bouquet satellite. La TNT existe aussi dans les établissements pénitentiaires. Je vous demande donc de dispenser les détenus de ce paiement et d'aller dans le sens de la gratuité. Cela évitera les dysfonctionnements dénoncés par la Cour des comptes.
Je suis conscient de la fragilité de mon argumentation au plan financier. La minoration des crédits pourra être compensée en prenant sur l'aide juridictionnelle. Ce n'est pas le meilleur dossier.