Madame la ministre, si les tendances démographiques récentes se maintiennent, la France métropolitaine comptera 73,6 millions d'habitants au 1er janvier 2060. Le nombre de personnes de plus de soixante ans augmentera, à lui seul, de plus de 10 millions. Ces tendances, qui ressortent d'une récente étude de l'INSEE, doivent conduire notre pays à ne pas attendre plus longtemps pour agir. D'où ma question, portant d'une part sur la méthode et les moyens dont l'État entend se doter dans ce but, d'autre part sur le rôle que les conseils généraux sont appelés à jouer dans cette perspective.
En effet, je suis assez inquiète devant les réformes successives qui s'opèrent ou s'annoncent sans que rien ne soit dit au sujet des moyens financiers et humains sur lesquels nous pourrons compter. Un jour, la CNSA annonce qu'elle va mettre en oeuvre une nouvelle pondération des critères de répartition du concours versé aux conseils généraux au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie, qui risque de pénaliser les bons élèves, c'est-à-dire les départements qui, depuis des années, ont consenti des efforts considérables pour proposer aux personnes âgées des services à domicile et des établissements d'hébergement de qualité. Un autre jour, l'agence régionale de santé annonce qu'elle envisage de passer par pertes et profit plusieurs centaines de places en EHPAD autorisées, mais qui attendent d'être médicalisées, et refuse de signer les conventions tripartites garantissant aux établissements leurs moyens de fonctionnement pendant cinq ans. Dans le même temps, on nous demande de nous impliquer dans les premiers appels à projets, alors même que les ARS n'ont pas encore arrêté leur projet régional de santé ni les schémas régionaux qui en découlent.
Qu'il faille engager un véritable effort de maîtrise des dépenses d'assurance maladie, nous en convenons tout à fait, mais cela ne doit pas se faire au prix d'une uniformisation des territoires et d'un regroupement à marche forcée des associations et des organismes prestataires d'aide et de soins qui maillent nos territoires et garantissent un service de proximité ; pas au prix non plus de l'appauvrissement des personnes âgées, qui ont souvent de petites retraites et auxquelles nous devons maintenir, quoi qu'il arrive, l'accès à un service de qualité et à un coût raisonnable en rapport avec leurs modestes ressources ; pas au prix, enfin, de l'étouffement des départements, qui ont un rôle essentiel à jouer pour garantir l'égal accès des personnes âgées et handicapées à des services et de soins de qualité proches de chez elles.
Ce rôle, c'est la loi qui l'attribue aux départements, mais pourrons-nous continuer à le jouer demain ? Le cas échéant, avec quels moyens ? Je vous remercie de bien vouloir nous faire connaître votre sentiment à ce sujet.